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C'est quoi cette affaire Negreira qui secoue le Barça?
La manière dont le Real Madrid est arbitré fait souvent parler, mais le FC Barcelone a totalement supplanté son rival en la matière. Le club catalan est soupçonné d’avoir versé quelque sept millions d’euros à l’ancien vice-président de la commission espagnole des arbitres pour obtenir un coup de main sur le terrain. Rien que ça.
San Mamés, ton univers impitoyable. En déplacement à Bilbao dimanche, le FC Barcelone a été mis à l’honneur – ou au déshonneur – par les supporters basques, qui ont fait pleuvoir les faux billets bleus et rouges des tribunes – comme les aficionados de Séville au Sánchez-Pizjuán. Des billets marqués du logo barcelonais et de l’inscription « mafia $ ». Un clin d’œil appuyé à une encombrante affaire, dont le Barça essaie tant bien que mal de se défaire. Le club est en effet suspecté d’avoir versé des pots-de-vin à José María Enriquez Negreira, ancien vice-président de la commission espagnole des arbitres, jetant l’opprobre sur la manière dont le géant catalan aurait garni son palmarès national entre 2001 et 2018. Un boulet qu’il devrait encore traîner un bon moment au pied.
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Así fue la lluvia de billetes en San Mamés con la que la afición del @AthleticClub protestó por todo lo sucedido con el Caso Negreira 💶💶#ElPostDeDAZN ⚽️ pic.twitter.com/ijTiD5YF7q
— DAZN España (@DAZN_ES) March 12, 2023
Qui veut gagner 7,3 millions ?
Central dans cette affaire, José María Enriquez Negreira a occupé ses fonctions de 1994 à 2018. Via son entreprise Dasnil 95, il fournissait théoriquement des rapports sur des questions d’arbitrage au FC Barcelone. « Tous les clubs ont besoin d’une analyse du point de vue arbitral, tous les clubs le font », s’est défendu l’ancien président blaugrana Josep Maria Bartomeu. Demander des rapports relatifs à l’arbitrage, oui. Mais en interne. « Nous avions deux délégués arbitraux, (dont) un ex-arbitre de première division, expliquait un ancien président de l’Athletic. Ils produisaient des rapports internes, ils étaient sous contrat avec l’Athletic. C’était un contrat de 40 000 euros par an. Ils indiquaient quel arbitre était plus enclin à donner des cartons, ou quel arbitre était trop agacé par les protestations. Je le répète, ils étaient des employés de l’Athletic. »
Les sommes évoquées dans l’affaire Negreira grimpent bien plus haut : le parquet estime les versements à 7,3 millions d’euros entre 2001 et 2018. Problème : aucune preuve de l’existence des fameux rapports n’a pu être apportée. Negreira est ainsi soupçonné d’avoir utilisé une partie de l’argent versé par le Barça pour pousser certains arbitres à siffler dans le sens des Catalans. Selon El Confidencial, il aurait en effet retiré de grosses sommes en liquide (550 000 euros entre 2016 et 2019). L’intéressé a balayé les allégations : non, il n’a jamais fait en sorte que quiconque bénéficie d’un traitement de faveur. « Le Barça n’a jamais acheté d’arbitres et n’a jamais eu l’intention d’en acheter », a appuyé Joan Laporta. Une tentative pour riposter, mais la pression ne fait que s’accentuer.
📺🏟️ La manifestación en los aledaños del Bernabéu contra el FC Barcelona y Joan Laporta por el Caso Negreira
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— Carrusel Deportivo (@carrusel) March 2, 2023
« Tout cela est en train de faire beaucoup de mal au football espagnol »
La justice est passée à l’action vendredi en inculpant le FC Barcelone, José Maria Enriquez Negreira, ainsi que Sandro Rosell, Josep Maria Bartomeu, Oscar Grau et Albert Soler. Le motif : corruption, abus de confiance et faux en écritures de commerce. « Je ne sais pas si les résultats des matchs ont été directement affectés. Mais pour l’image de La Liga, cela ne me plaît pas. L’enquête doit aller au bout car tout cela est en train de faire beaucoup de mal au football espagnol, déplorait Javier Tebas, président de LaLiga, le mois dernier. C’était une chose d’avoir recours à d’anciens arbitres, mais c’en était une autre d’avoir recours à un ex-arbitre toujours en activité au sein du comité technique des arbitres. Il faut donner une explication. »
Laporta lui a froidement répondu : « Tebas est en train de fomenter une campagne contre le Barça et ma personne. Il a fait tomber son masque. Il continue avec son obsession envers le Barça. En 2005 déjà, en tant que vice-président d’Alavés, il avait porté plainte parce qu’il ne voulait pas que Messi joue au Barça. Il ne nous pardonne pas que l’on n’ait pas voulu signer leur contrat avec CVC, qu’il pilote lui-même. Il ne supporte pas non plus que nous soyons en faveur de la Super Ligue. » Le dossier est remonté jusqu’au Premier ministre Pedro Sánchez, invité à s’exprimer sur le dossier au cours d’un déplacement à Ljubljana.
Le Real, majesté « lésée »
De nombreux clubs ont exprimé leurs inquiétudes et demandé des clarifications. Le comité directeur du Real, réuni dimanche, a accouché d’un communiqué où la Maison-Blanche a fait part de « sa profonde préoccupation concernant la gravité des faits ». Florentino Pérez ne comptant pas rester spectateur, le club « demandera à faire partie de la procédure d’investigation quand le juge l’ouvrira aux parties lésées », histoire d’avoir accès au dossier et de « défendre ses intérêts légitimes ». Il ne sera a priori pas question de sanctions sportives, puisque les faits remonteraient à plus de cinq ans et que la prescription (d’un délai de trois ans) serait dépassée dans ce cadre. Mais si les faits de corruption étaient avérés, on peut imaginer que la note serait salée – les personnes inculpées encourent des peines de prison.
CLOS GOMEZ, ex- árbitro aragonés. Responsable de Implementación del videoarbitraje VAR del Comité Técnico de Árbitros. Video #RMTV pic.twitter.com/a9J0kCCx0N
— RNMJ TV #6 Real Madrid (@rnmjtv6) March 10, 2023
Le rival merengue ne s’est pas privé de rajouter un peu d’huile sur le feu en diffusant, sur Real Madrid TV, une compilation d’erreurs arbitrales défavorables à la Maison-Blanche quand Clos Gómez était au sifflet. Un sous-entendu à peine voilé que Gómez aurait sciemment nui aux Madrilènes à l’époque où le Barça rémunérait Negreira. « Enríquez Negreira n’avait aucun pouvoir ou influence sur les arbitres », a rétorqué l’ancien arbitre Eduardo Iturralde González sur Carrusel Deportivo. La séquence montre au moins une chose : personne ne fera de cadeau. « Le Barça est victime d’une campagne, qui implique désormais tout le monde, pour nuire à son honneur, a tweeté Laporta. Ce n’est pas une surprise, nous allons défendre le Barça et prouver que le club est innocent. » Il est attendu au tournant.
Par Quentin Ballue