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Les vraies questions existentielles du football – épisode 8
Les questions les plus bêtes sont parfois, souvent, les meilleures. Sofoot.com a décidé, tous les semaines, de répondre à trois interrogations fondamentales de tout amoureux de la balle ronde et même des néophytes. Pas de discrimination, surtout pas en ce moment.
Comment ramène-t-on les 3 points ?
Si on écoute bien les discours d’avant-match, impossible d’échapper au sempiternel dialogue langue de bois : « Ils ont une bonne équipe, mais on a bien travaillé cette semaine. L’objectif, c’est bien évidemment de ramener les trois points pour sortir de notre mauvaise passe/continuer sur notre dynamique » . Reste à savoir comment les rapatrier à la maison. Étant donné que bien souvent, « plus vite on ramène des points, mieux c’est » , la piste de la soute du bus s’avère bancale, surtout qu’entre les sacs, les maillots et les plots, c’est souvent bondé. « Personne n’a vu mon sac, les gars ? Maxime, tu prends les ballons, s’il te plaît. » Et puis Knysna a prouvé que le bus n’était pas toujours sûr. Idem en cas de transport en avion, à cause notamment du vol 370 et du surcoût lié aux bagages supplémentaires en soute. Parce qu’on peut partir du principe que les trois points sont assez lourds et volumineux, étant donné qu’on a souvent besoin d’une équipe, ou d’un joueur très fort pour se les mettre dans la poche, et qu’ils décident bien souvent du destin d’une saison. Reste alors à se tourner vers les professionnels. Alain, coursier à vélo, a pour avantage de pouvoir slalomer entre les voitures : « C’est sûr que ça peut aller plus vite dans l’idée, surtout s’il y a des embouteillages. Après si c’est lourd, ça peut être vraiment galère. Et puis si on doit ramener un truc de Saint-Étienne à Lille, bonjour la balade. On n’est pas Lance Armstrong non plus » . Rapé donc. Tablez donc plutôt sur les derniers esprits libres, compagnons des bandes grises d’auto, nat et dép, poètes de la nuit et de l’ennui, soldats au volant : les routiers. Ou plutôt une routière, Sophie, dans le métier depuis 12 ans : « À condition d’y mettre le prix, on peut tout transporter, ou presque. Rien d’illégal, hein. Par exemple, j’ai déjà ramené un camion entier de télés de Pologne. Faut juste faire attention à ne pas se faire braquer, ça arrive souvent avec les cargaisons précieuses » . Toujours se méfier des braquages, au Vélodrome ou ailleurs.
À quoi sert le poteau de corner ?
Trop souvent dans l’histoire, l’importance du poteau de corner a été sous-estimée. « Déjà, on ne dit pas poteaux de corner, mais poteaux de coin » , s’enflamme Lucien Bouchardeau, ancien arbitre international de renom : « Ils ont parfois l’air inutile, mais on ne peut pas s’en passer » . Qu’est-ce qui le rend donc si indispensable ? Déjà, ça sert à guider le jeu et orienter les décisions depuis 1930 : « Le poteau sert à délimiter les lignes de touche et de but et à guider visuellement l’arbitre qui doit décider s’il y a six mètres ou coup de pied de coin » , reprend le Nigérian, bientôt complété par Eric Borghini, le président de la commission des arbitres de la FFF, tout heureux de se replonger dans ses cours de district : « Il y a trente ans, quand on passait l’examen, on nous a posé la question : et si le ballon roule sur le poteau de corner et l’écrase ? Dans ce cas, c’est avantage à la défense ! » D’accord, mais c’est tout ? « Non, ils ont aussi un côté esthétique indéniable. Ils servent à délimiter le terrain de manière précise. Auparavant, il y avait même deux autres drapeaux de part et d’autre de la ligne médiane, mais on les a progressivement enlevés » . De manière générale, le poteau de coin a subi de multiples transformations pour se présenter aujourd’hui tel qu’il est réellement, à la fois aguicheur et séduisant : « Ils sont obligatoires, ils sont au nombre de 4, avec une hauteur minimum de 1m50, à l’appréciation du club. Ils sont complétés par une étoffe de couleur vive de 45 centimètres sur 45 centimètres, et construits dans un matériau qui ne présente aucun danger pour le joueur » . Arme de choix pour les bagarres générales lorsqu’il était encore en bois, le poteau en PVC est aujourd’hui devenu l’accessoire indispensable du buteur en quête d’originalité. Planté dans son coin, il peut selon les humeurs servir de punching-ball, de mitraillette ou de partenaire de danse. Inspiré, le Nigérian Georges Finidi a même eu un jour la brillante idée d’y mimer un chien qui urine. « Il y en a même qui jouent à la guitare avec, vous savez ! » s’énerve Lucien Bouchardeau, ulcéré par ces conduites inconvenantes envers l’équipement homologué : « Pour moi, c’est carton jaune direct » .
Se prendre un râteau fait-il nécessairement mal à l’égo ?
Le geste est presque anodin. Une touche du gauche, une autre du droit, ou l’inverse, suffit à sa réalisation. Pourtant, le râteau, maîtrisé à merveille par Marco Verratti et Bouna Sarr, est une arme aussi efficace que destructrice. Combien d’esprits malmenés, combien de corps chahutés par le mouvement sibyllin de ces pieds sans scrupules ? Alors forcément, se prendre un râteau laisse des traces. Pourtant, il apparaît presque inévitable selon Patrick Harris, coach en séduction : « Les gens qui viennent me voir avec le désir de trouver l’âme sœur ou des conquêtes sont obligés de multiplier les rencontres. Donc ils s’exposent nécessairement aux râteaux » . 90 minutes durant, le risque existe. Pourtant, en fonction de l’auteur du rembarrage, la blessure peut se faire plus ou moins intense : « Il y a deux grands groupes, les affectives et les communicantes. L’affective peut répondre par un sourire et dire : « ça ne m’intéresse pas, merci ». La communicante elle, indique au dragueur qu’il faut vite tourner les talons, elle le blesse dans son amour propre, elle le rejette. C’est une échelle douloureuse » . Que l’auteur se fasse discret ou véhément, Patrick Harris n’envisage de toute façon pas l’échec. Car se prendre un râteau sert de toute façon un autre dessein : celui de progresser. « Il faut se dire que si un homme subit un échec, puis deux, puis trois, puis vingt, la vingt et unième il va trouver la femme de sa vie, théorise Patrick. S’il compare l’intensité du plaisir de la réussite avec l’intensité de la douleur des 20 échecs, qui l’emporte ? Évidemment le succès. Chaque échec a été une étape indispensable vers le succès. » Là réside tout le travail d’approche vis-à-vis du râteau. En concéder un n’est pas un drame, puisque la prochaine tentative de l’adversaire sera un échec. Connaître la douleur, s’en servir pour rebondir. En gros, ne jamais éviter le contact. Car comme le rappelle Patrick Harris, « pour prendre confiance, il faut que l’inconscient arrête d’associer la rencontre avec la souffrance » . Victimes de râteaux, n’ayez donc plus peur. Car retenter sa chance est la seule solution pour regonfler son amour-propre. Même si la cible s’appelle Marco Verratti ou Bouna Sarr.
Par CG, RG et CAL