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Les tribunes lyonnaises sont-elles racistes ?

Par Mathis Healy et Alexandre Ross

Septième de Ligue 1 à six points de l’Europe, l’Olympique lyonnais traverse une saison compliquée sur le terrain comme en tribunes. Ces dernières semaines, ses supporters ont à nouveau été mêlés à des propos racistes rappelant le climat social tendu qui règne en ville.

Les tribunes lyonnaises sont-elles racistes ?

Le 23 avril dernier un Groupama Stadium en fête honore la mémoire de Paul Bocuse, figure de la gastronomie locale, à l’occasion de la réception de l’OM. Quatre-vingt-dix minutes et une défaite dans le temps additionnel plus tard, ce sont des scènes bien moins joyeuses qui agitent le parvis du stade. Dans une vidéo publiée le lendemain sur les réseaux sociaux, un homme identifié plus tard comme un supporter de l’OM est roué de coups par des Lyonnais. Un lynchage sur fond d’insultes racistes, faisant écho aux propos tenus quelques jours auparavant par Karl Toko Ekambi, parti à Rennes cet hiver après quatre ans passé sous le maillot de l’OL, qui sous-entendait très fortement la présence de supporters racistes dans les tribunes lyonnaises : « Bizarrement, ceux qui sont pris pour cible, ce ne sont pas des Lyonnais. Je ne vais pas dire le mot fort auquel je pense, mais voilà… Ce sont toujours les mêmes profils qui sont ciblés. » Alors, le racisme dans les tribunes lyonnaises : phénomène isolé ou vraie tendance collective ?

Un mal récurrent

Une banderole « Refugees not welcome » lors de la réception du LOSC à Gerland en 2015, une banane gonflable mise en évidence derrière le but de Steve Mandanda lors d’un Olympico en 2017, des saluts nazis en tribune pendant un OL-CSKA Moscou en 2018… Les actes racistes dans les tribunes lyonnaises sont légion ces dernières années. Un constat qui semble faire consensus dans les virages. « Ce serait mentir de dire qu’il n’y a pas de racisme dans les tribunes lyonnaises », constate Arthur, ancien adhérent du groupe supporter Lyon 1950 qui anime le virage Sud depuis 2009. « Effectivement, une partie des supporters doit être un peu radicale », embraye Thierry Boirivent vice-président de l’Amicale des Rouge & Bleu, autre groupe pensionnaire du virage Sud. « Quand j’ai vu la vidéo, j’étais presque content d’entendre des propos racistes. Je pense que c’est ce qu’il fallait pour que ça bouge enfin », ajoute cet ancien habitué des virages qui préfère préserver son anonymat et qui vit désormais les matchs depuis les tribunes latérales en raison de l’ambiance délétère qui règne derrière les buts du Groupama Stadium. « Un jour il y aura un drame, il faut faire attention », ajoute-t-il. Pour ne pas en arriver là, Hermann Ebongue, secrétaire général de SOS Racisme, invitait le club après les évènements du dernier OL-OM à « faire le ménage dans ses tribunes », estimant que le club rhodanien est « victime de la situation ».

Aujourd’hui, il suffit de prendre une place et d’aller voir comment ça se passe en virage Sud, et vous allez être servi.

Supporter anonyme

Si effectivement, les paroles entendues dans cette vidéo sont « injustifiables et condamnables », Xavier Pierrot, stadium manager de l’Olympique lyonnais, refuse de faire de ce cas une généralité : « Ce ne sont pas avec des grandes phrases qu’on travaille, mais plutôt avec des heures d’échanges. À ce jour, je n’ai pas eu cette saison de plaintes ou de remontées d’information comme quoi il y aurait eu des actes racistes au Groupama Stadium. Si des supporters ont d’autres informations que les nôtres, on est preneurs. » Le 17 juillet 2021 lors d’une rencontre amicale entre Lyon et Wolfsburg, c’est une ramasseuse de balle d’origine maghrébine qui est visée par des insultes racistes. « À chaque fois qu’elle allait chercher le ballon, les cris de singes fusaient, raconte un témoin de la scène qui se déroule alors au pied du virage Sud. Ce jour-là, j’ai fini par aller voir le principal responsable pour lui demander d’arrêter et je me suis retrouvé pris en grippe par plusieurs gars. Finalement, les stadiers m’ont demandé de sortir pour que ça ne parte pas en cacahuète. »

(Photo by Anthony Dibon/Icon Sport)
(Photo by Anthony Dibon/Icon Sport)

Ce virage Sud occupé par une multitude de groupes de supporters cristallise les actes de racisme. « Je n’ai jamais eu de problème au Nord (occupé par les Bad Gones, NDLR), par contre, aujourd’hui il suffit de prendre une place et d’aller voir comment ça se passe en virage Sud et vous allez être servi. Je pense qu’il n’y a pas besoin de faire cinquante matchs pour voir des débordements là-bas », poursuit ce supporter. La faute à des pseudos supporters indépendants que la direction lyonnaise a toutes les peines du monde à canaliser. « Je vais être précis, c’est un fait qu’au virage Nord, il y a 6000 encartés. Donc quand vous discutez avec des leaders d’un groupe (les Bad Gones), les messages sont ensuite relayés à l’intérieur du groupe. Au virage Sud, le groupe de supporters le plus gros, Lyon 1950, représente un quart du virage. Donc autour il y a d’autres individus comme certains qu’on peut appeler les indépendants qui peuvent être présents et avec lesquelles nous n’avons pas de discussion possible », explique Xavier Pierrot. Ces « indéps », comme on les appelle dans le monde du supportérisme et qui véhiculent pour la plupart des idées d’extrême droite, sont souvent les mêmes qui agissent ces derniers temps à 20 kilomètres du Groupama Stadium, dans le centre-ville de Lyon.

Un miroir des rues lyonnaises

Ces dernières années, les affrontements entre groupes d’extrême droite et d’extrême gauche se sont multipliés dans les artères de la ville. Le 27 avril dernier, en marge d’une « casserolade antifasciste » se déroulant place des Jacobins, une rixe a éclaté entre des manifestants « antifas » et des partisans de l’extrême droite. Dans un pays où un parti de ce bord obtient plus de 40% des voix au second tour des élections présidentielles, la présence de cette opinion politique au sein des tribunes est un reflet de la société. « Je ne vais pas nier que dans le stade, il y a sans doute des gens d’extrême droite et des racistes, mais le Groupama Stadium est comme n’importe quel grand stade : ce n’est ni plus ni moins qu’un lieu où vous avez des dizaines de milliers de citoyens qui s’y retrouvent », analyse Xavier Pierrot. Néanmoins, cela ne s’est pas traduit dans les urnes à Lyon, où le Rassemblement national avait seulement récolté 20% des voix lors du deuxième tour. Dans les hautes sphères politiques de la ville du Rhône – bien qu’elle soit notamment un des bastions du GUD (mouvement initialement étudiant d’extrême droite) -, ce courant reste marginal. Cela n’empêche en rien sa présence dans les rues de la ville la semaine et, dans une moindre mesure, dans les virages du Groupama Stadium le week-end. Un phénomène que tente de réguler le club, d’abord par le dialogue puis en prenant des sanctions quand la situation le réclame. « Quand une personne vient au stade, je ne sais pas quelles sont ses opinions politiques et à la rigueur, c’est pas mon problème. Nous, ce qu’on essaye d’inculquer à nos supporters c’est : à partir du moment où vous arrivez dans le stade, la seule philosophie que vous devez avoir, c’est de mettre en avant les couleurs de l’OL », affirme Xavier Pierrot. Depuis les incidents qui ont suivi le match contre l’OM, le parquet de Lyon a ouvert une enquête pour violences aggravées. Dans ce cadre, le club a reçu une réquisition des forces de l’ordre et a transmis les images filmées par les caméras de vidéosurveillance. L’enquête n’a pour l’heure pas encore rendu son verdict.

Dans cet article :
19 personnes interdites de stade après les incidents lors de Lyon-Nantes
Dans cet article :

Par Mathis Healy et Alexandre Ross

Tous propos recueillis par Alexandre Ross et Mathis Healy sauf ceux de Hermann Ebongue via BFM Lyon.

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