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Les rayons de soleil
Ils ont tous gagné ce week-end et squattent un rang qui ne leur est pas réservé. Eux, ce sont les petits clubs silencieux, mais terriblement méritants. Bonne nouvelle : on en trouve dans tous les gros championnats.
Guinguamp. Leipzig. Eibar. Atalanta. Watford. Cologne. Hoffenheim. Le point commun de ces clubs ? Tous illuminent le ciel de leur championnat, alors qu’on ne les attendait pas le moins du monde. Tous font partie des meilleurs de leur pays, pendant que d’autres favoris galèrent. Tous défient la logique du ballon rond en s’invitant à une fête où ils ne sont pas forcément conviés. Tous squattent un rang qui n’est prétendument pas le leur. Encore une fois, tous ont cartonné ce week-end. Et la plupart n’ont pas les moyens de leurs concurrents.
Guingamp, 7 000 habitants et quatrième meilleure équipe de France
Le meilleur exemple vient peut-être de chez nous. Après onze journées, l’En Avant de Guingamp pointe à la quatrième place de Ligue 1, trois points seulement derrière les mastodontes parisien et monégasque, et loin devant l’Olympique lyonnais ou l’Olympique de Marseille. Guingamp, 7000 habitants, soit un 121e de la population de Marseille et un 69e de celle de Lyon. L’EAG, 26 millions d’euros dans les caisses, soit le deuxième plus petit budget de première division. Bah oui, mais le club breton a encore gagné ce week-end. Sans faire de bruit bien entendu, sur le plus petit des scores face à Angers, encore moins friqué. Mais force est de constater que Guingamp fait son petit bonhomme de chemin, avec les moyens du bord, et procure du kif. À son entraîneur, à son public et à tous ceux qui apprécient tout simplement le sport. « C’est vraiment un mois d’octobre superbe. C’est la première fois de ma carrière que je vis ça. Mes joueurs me rendent fier » , s’est ému Antoine Kombouaré. Combien de voix empruntent la sienne ?
Les Français ne sont pas les seuls à être gâtés. En Italie, l’Atalanta Bergame a explosé le Genoa trois buts à rien. Dans l’anonymat le plus complet, l’équipe de Gian Piero Gasperini propose du beau football, ou au moins un bel état d’esprit, et montre sa trogne au sixième rang de la Serie A, à quelques unités des gros bras Roma-Milan-Lazio-Naples. L’Inter ? La Fio ? Dans le rétroviseur. Déjà cinq rencontres qu’elle n’a plus perdu. En Angleterre, c’est Watford qui joue le rôle de l’épouvantail. Watford, vainqueur à l’arrachée de Hull City sur un CSC, septième du championnat, quinze points en dix journées, soit autant que l’ogre Manchester United. Watford, seizième budget de Premier League, qui a dépensé 26,6 millions d’euros cet été quand MU en lâchait environ 180.
Donnez-nous un nouveau Leicester !
Et l’Allemagne dans tout ça ? Rassurez-vous, la Bundesliga aussi a droit à ses petits clubs qui bousculent les hiérarchies. De manière assez dingue, le RB Leipzig suit le rythme du monstre Bayern Munich. Invaincu en championnat, Leipzig se pose en dauphin le plus crédible du pays. OK, le club a de l’argent, mais on parle quand même d’un promu. Par ailleurs, comment expliquer les bonnes perfs de Hoffenheim et Cologne, troisième et quatrième, qui ont encore récupéré les trois points dimanche, alors que le Borussia Dortmund, le Bayer Leverkusen ou Schalke 04 patinent dans la semoule ? Même en Espagne, Eibar, huitième et 27 000 habitants, se distingue dans une Liga destinée aux dictateurs madrilènes et barcelonais.
Oh bien sûr, certains de ces rebelles finiront sans doute par descendre de leur piédestal pour retourner à la réalité de leur mission maintien. D’autres rentreront dans le rang sans faire plus de boucan que quand ils ont commencé à emmerder les géants européens, comme le SCO d’Angers la saison dernière. Reste qu’à l’heure où l’OM fantasme sur un avenir annoncé radieux à coups de billets et offre des 0-0 absolument immondes en attendant, où les consultants se demandent pourquoi le PSG n’a pas posé 150 millions sur Neymar ou sur un autre, d’autres prouvent que les finances ne font pas nécessairement la loi du moment, qu’il est possible d’offrir du plaisir en toute simplicité, même si ce n’est qu’éphémère. Jusqu’au Graal, dans des cas exceptionnels. Autant le dire clairement : ça fait du bien. Tant qu’il y aura des Leicester ou des Islande, le foot sera sauf.
Par Florian Cadu