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Les quatre fils du docteur Löw (et un chien)
Avec toute une série de joueurs blessés ou en méforme parmi les internationaux allemands, Joachim Löw commence à se demander quelles seront ses roues de secours brésiliennes. Alors le match contre le Chili va servir de pistes d'essai : quatre nouveaux à bord, et un revenant à un nouveau poste. Attention, l'heure tourne, les places sont à prendre.
Matthias Ginter
Ginter a tout ce qu’il faut pour une Allemagne qui gagne : sobre, sans grande fantaisie, sans faire de vagues, et surtout terriblement efficace. Autant dans l’axe de la défense qu’un cran plus haut sur le terrain, il est ce grand blond aux yeux bleus, profil racé pour défi physique de qualité, qui ratisse et relance sans faute. En trois ans et deux prix Fritz-Walter plus tard, Ginter est devenu l’assurance tous risques de son club formateur, le SC Fribourg. Le joueur progresse à vue d’œil. Et il ne semble pas décidé à se contenter de beurrer les tartines à l’avenir. La plupart des clubs allemands et anglais du premier tiers l’ont bien compris et songent à Matze. Arsenal a fait une tentative de dernière minute l’été dernier, les rumeurs l’envoient successivement à Dortmund ou United, qui vient de le superviser. Quoi qu’il en soit, ce Kehl 2.0 a franchi une nouvelle étape : la première convocation chez les A, après quelques sélections remarquées chez les U21. Pas de hasard donc dans l’appel de Löw, si on observe le parcours rectiligne de Ginter. Mais aussi parce que le sélectionneur allemand est un Fribourgeois convaincu, souvent en visite au Dreisamstadion. Et surtout parce que Ginter peut être la caution Allemagne vraie.
Shkodran Mustafi
L’inconnu du mac. Jogi fait un coup de pute en nous claquant un défenseur qui compte une quarantaine de matchs de Serie A à peine tassée, aux origines albano-macédoniennes, formé à Hambourg mais parti dès 17 ans à Everton pour une apparition ‒ en Europa League ‒ sur trois ans de service. Autant dire qu’on en connaît autant sur lui que sur le deuxième gardien de Paderborn. Mais bon, tout de même, le gars a fait toutes les sélections de jeunes avec l’Allemagne et s’est calé un titre de champion d’Europe avec les U17, en 2009. Cette saison, Mustafi s’est même imposé comme titulaire avec la Samp’ et joue depuis au poker menteur sur son choix de sélection. Aux quelques appels du pied albanais, Mustafi se montre ni insensible ni intéressé. Il attend la réaction allemande, la décision de Löw. Celle-ci vient de lui arriver. Löw a compris quoi faire : donner un peu d’espoir à Mustafi avant la Coupe du monde, calmer ses ardeurs, lui promettre un futur allemand. S’il n’ira probablement pas au Brésil, il trouvera l’occasion d’une sélection lors des qualifs à l’Euro 2016. Et advienne alors que pourra avec la Mannschaft. Mais pas d’Albanie pour Mustafi.
André Hahn
« Quand Hansi Flick m’a appelé, j’ai d’abord cru à une blague » . Eh bien non : l’adjoint de Joachim Löw a bel et bien appelé André Hahn pour le convoquer pour le match face au Chili. Cette sélection, c’est non seulement pour récompenser le bon parcours du FC Augsburg cette saison (9e place, 35 points, à quelques encablures de l’Europe), un parcours auquel l’ailier droit n’est pas étranger, bien au contraire : 10 buts et 5 passes décisives en 22 rencontres. Ce petit-fils d’amoureux du cheval galope tellement sur son côté qu’il est à coup sûr l’un des joueurs les plus rapides de Bundesliga. De plus, il est doté d’une superbe frappe et d’un très bon jeu de tête. Et s’il continue à ce rythme, il pourrait très bien être l’invité-surprise au sein de la Nationalmannschaft. Tout comme David Odonkor en 2006, qui lui aussi était ailier droit. En attendant, André savoure le coup de fil de la DFB : il en est même fier comme un coq.
Pierre-Michel Lasogga
« La la la la Lasogga, il les marque tous tranquillement, la façon dont il joue, c’est juste la classe ! » Début novembre, les mecs de la NDR (média de la région de Hambourg) craquent leur slip et remixent « La Bamba » pour célébrer le nouveau héros du HSV : Pierre-Michel Lasogga. Il faut dire qu’après six buts en six rencontres (dont un triplé en neuf minutes à Nuremberg), l’attaquant au physique de buffle prêté par le Hertha Berlin, tout juste revenu de blessure, fait les choses comme il faut. Seulement voilà, depuis, le natif de Gladbeck (passé chez les jeunes de Schalke 04 et du Bayer) brille par son inconstance. Et ses longues minutes sans but se traduisent par une chute au classement de Hambourg. Revenu il y a quelques semaines sur les terrains après une vilaine déchirure à la cuisse, le « Lasso » a fait trembler les filets à deux reprises au cours des trois dernières rencontres. Joachim Löw, en quête d’un nouveau buteur pour pallier une éventuelle fragilité physique de Mario Gómez et Miroslav Klose (coucou Stefan Kiessling!), a décidé de convoquer Pierre-Michel Lasogga pour le match face au Chili. Et tant pis s’il ne pourra pas honorer sa première cape avec la Nationalmannschaft. Le fait d’être appelé, c’est déjà un grand bonheur pour sa maman Kerstin, dont il s’est fait tatouer le nom.
Kevin Großkreutz
Le malheur des uns fait le bonheur de Kevin, dont la dernière sélection remonte à février 2011. Phase 1 : Lukasz Piszczek se fait opérer de la hanche en mai 2013, avec une indisponibilité de six mois à la clef. Großkreutz en profite pour s’installer sur le flanc droit de la défense du BVB et enchaîne les bonnes performances. Phase 2 : tous les relayeurs habituels de la Mannschaft se pètent les uns après les autres (Khedira et Gündogan sont toujours out, Schweinsteiger revient tout doucement, Lars Bender s’est fait mal à la cuisse). Phase 3 : pareil au Bayern, où Guardiola installe Lahm en 6 pour pallier les absences de Schweini et Javi Martínez. Phase 4 : grand fan du coach espagnol auquel il a déjà piqué l’idée du faux neuf, Löw suit la tendance et appelle Kevin pour jouer latéral droit. Simple comme bonjour. Évidemment, KG n’est qu’un second couteau. Mais il est affuté. Volontaire et dévoué, Kevin pourrait bien voir le Brésil grâce à sa polyvalence. Capable de dépanner à tout un tas de postes, du latéral à l’ailier en passant par le récupérateur, il amène de la hargne à cette Allemagne presque trop romantique. Et puis c’est toujours bien d’avoir un mec prêt à se vider les tripes : cela donne l’exemple. Faudra juste éviter de l’interviewer.
Par Ali Farhat, Charles Alf Lafon et Côme Tessier.