- International
- Prix Puskás
Les quatre autres merveilles de Gauthier Hein
Grâce à son but fou inscrit face aux Chamois niortais, Gauthier Hein est en lice pour le prix Puskás, qui rendra son verdict le 18 décembre. Oui, mais voilà, le natif de Thionville, en Lorraine, n'en est pas à son coup d'essai : de ses débuts dans le foot, au FC Thionville, à sa confirmation dans le football pro, à Metz, Tours, Valenciennes ou Auxerre, l'Arjen Robben de la vallée de la Fensch a déjà planté un certain nombre de golazos. Quatre témoins de ses exploits racontent.
« Avec Gauthier, quand on était jeunes, on jouait au foot tout le temps, dans le jardin, dans la maison ou avec des amis. On s’entraînait au sein du même club, le FC Thionville, mais on n’a pas joué ensemble, puisque Gauthier a deux ans de plus que moi et qu’en plus, il était surclassé avec la génération 1995. Quand il était jeune, il slalomait un peu entre tout le monde, il se retrouvait face au gardien et il marquait. Un jour, lors d’un tournoi à Thionville, sur un petit terrain, il manquait un joueur dans l’équipe 3 : mon frère, qui avait 8 ans, a dû faire le nombre et on l’a placé dans les buts. Sauf que Gauthier jouait alors avec l’équipe 1 et sur le coup, il a trouvé que ses coéquipiers n’étaient pas assez bons. Il en a eu marre de rester dans les buts, il a pris la balle et a commencé à dribbler tout le terrain. Mon grand-père lui criait : « Reste au but, fais jouer ! » Finalement, il est allé marquer tout seul. À l’époque, il était beaucoup plus petit, moins musclé, mais il filait partout. Il compensait son petit gabarit par sa vitesse et sa technique supérieure à celles des autres. Sa plus grande inspiration, c’était Messi : assez classique, mais au niveau du style de jeu, du gabarit, du pied gauche, c’est la perfection. On a grandi dans une famille très portée sur le foot, donc Gauthier a sans doute de bons gênes. Et ensuite, je pense que c’est quelqu’un qui aime le foot plus que tout le monde : il prenait énormément de plaisir à jouer, il avait toujours un ballon dans les pieds. C’est un énorme travailleur, qui a une hygiène de vie irréprochable. Déjà à quinze ans, à un âge où d’autres aiment sortir, il ne mangeait pas de McDo, il ne sortait pas. Il savait ce qu’il voulait et il mettait toutes les chances de son côté. »
Laurent Heyd, éducateur de Gauthier Hein au FC Thionville // France-Russie (2-0), Danone Nations Cup, 7 septembre 2008« Pendant quatre ans, j’ai été l’éducateur de Gauthier Hein dans les catégories de jeunes du FC Thionville, avant qu’il ne parte en sport-études au FC Metz et au collège Arsenal. C’est d’ailleurs son regretté grand-père qui m’avait à l’époque demandé de devenir éducateur et c’est comme ça que j’ai rencontré Gauthier, il avait sept ans. Je le voyais déjà souvent au bord des terrains avec son papi ou son papa : le club était une petite famille et tout le monde se connaissait. Ce que je retiens principalement de Gauthier, c’est qu’il était humainement exceptionnel, il avait des qualités qu’un adulte peut avoir. Sur le plan sportif, quand j’ai vu arriver Gauthier avec sa petite taille, j’ai tout de suite compris qu’une fois un ballon au pied, il était un être à part, largement au-dessus du lot. À mon humble niveau et dans une petite ville, je n’ai jamais revu un joueur de ce talent. Gauthier avait le sens du placement, le sens du geste : c’est comme son but contre Niort, quand il fait une roulette. Qui ferait une roulette à cet endroit-là ? Ils ne sont pas cinquante sur Terre à faire ça. Et quand vous connaissez Gauthier Hein depuis tout petit, vous comprenez tout de suite : il est capable de vous sortir un geste à n’importe quel moment, et vous ne vous y attendez jamais, notamment dans les grands matchs. À l’époque, les gros matchs, c’était entre Thionville et Metz, et dans la même catégorie d’âge, il y avait Maxwel Cornet à Metz et Gauthier Hein à Thionville, et les deux faisaient ce qu’ils voulaient sur le terrain. Et donc, il y avait un combat : parfois, c’était Maxwel qui faisait la différence, parfois c’était Gauthier. Et les deux ont eu l’occasion de jouer ensemble lors de la Danone Nations Cup 2008, puisque Gauthier jouait avec le FC Metz, qui avait gagné le droit de représenter la France. En finale, contre la Russie, Maxwel marque le but, et le second, c’est bien évidemment Gauthier. Il est sur le côté gauche, il y a un défenseur dans l’axe, Gauthier fait semblant de faire une passe à Maxwel et en fait, il fait un passement de jambes, continue, arrive devant le gardien en angle fermé et il marque. Ça résume tout de Gauthier : le placement, l’explosivité, la vision, le geste juste… et l’humilité. »
Le but de Gauthier Hein à 01:58 :
Jeff, supporter du FC Metz // Metz-Lyon (1-0, match arrêté), 16e journée de Ligue 1, 3 décembre 2016« Je me souviens de son pion face à Lyon à domicile, en 2016. On se les gelait, côté classement c’était pas la joie, et on voit Gauthier partir côté droit. Face à lui, tu as Jérémy Morel en mode piquet ou cône de chantier. Il laisse Gauthier repiquer plein axe et enrouler une spéciale Robben. Lopes se détend sur son côté droit, mais là où il la met, tu n’as quasiment aucune chance de la détourner. En tribune, ça s’est réchauffé direct, tu penses bien, ouvrir le score face à Lyon, ça avait un petit côté Noël avant l’heure. Plus tard, j’avais revu les images avec les commentaires de beIN, le type qui s’enflamme en parlant du petit prodige messin, tandis que Cohade, Diallo ou encore Mandjeck le félicitent. Après, vous connaissez la suite : un pétard, un match arrêté, et un but – son premier – qui comptera pour du flan… Gauthier, c’était un jeune du cru. Une fois que tu as dit ça, ça ne présuppose en rien de ses qualités, sportives ou humaines. Tu peux être made in local et avoir deux agglos à la place des pieds et l’intelligence d’une éponge. N’empêche, lui, j’ai toujours eu l’impression qu’il avait la tête sur les épaules. Un pied gauche sympa, et son côté court sur pattes, avec un centre de gravité bas, tu ajoutes une pointe de technique, tu secoues le tout, et tu as un petit bonhomme que j’aurais bien vu casser des hanches chez nous. Du coup, je n’ai pas trop compris pourquoi on ne l’avait pas gardé… C’est dommage. »
Le but de Gauthier Hein à 02:10 :
Joffrey Cuffaut, coéquipier de Gauthier Hein au VAFC // Valenciennes-Nancy (1-1), 2e journée de Ligue 2, 2 août 2019« Ça ne m’étonne pas que Gauthier Hein soit en lice pour le prix Puskás : il a toujours su mettre de très jolis buts par le passé. Parce que c’est un super joueur avec beaucoup de qualités, avec un super pied gauche et très polyvalent : j’ai apprécié jouer avec lui et puis que ce soit à l’entraînement ou en match, c’est le joueur qu’il vous faut dans votre équipe. En 2019, lors de notre premier match à domicile de la saison, contre Nancy, il a réalisé un geste magnifique. Nous, on voit les choses un peu de l’extérieur, mais lui, il est dans sa course, en train de faire l’appel. Il est lancé dans la profondeur sur le côté gauche, à l’extérieur de la surface, il prend très bien l’information, et puis derrière, il réalise le geste juste : il reprend le ballon en une touche et lobe le gardien qui s’était avancé. Vraiment, le geste qu’il a réalisé… Parce qu’il n’est pas tout proche, il est à un bon 25/30 mètres des buts. Mais on sent qu’il y va pour finir l’action, aller au bout de ses idées, et c’est ça que j’ai apprécié en lui. D’ailleurs, le fait que ce soit contre Nancy a compté pour lui : c’est un pur produit messin, et il me disait que quand il jouait contre l’ASNL, ça lui réussissait bien, que ce soit avec Tours, avec Valenciennes ou cette année avec Auxerre. Et d’ailleurs, moi qui ai beaucoup joué à l’ASNL (de 2013 à 2018) et lui beaucoup à Metz, on se charriait un petit peu : lui avait tendance à dire que voilà, Metz était au-dessus de Nancy, et moi, j’aimais bien lui rappeler un derby qu’on avait gagné 4-0 en Ligue 1. On s’appréciait, et en plus d’être un bon joueur, c’est une super personne dans le vestiaire. »
Soutenez Gauthier Hein dans sa quête du prix Puskás de la FIFA en allant voter ici. #GauthierNumeroHein
Propos recueillis par Valentin Lutz