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- Costa Rica-Zambie (1-3)
Les quatre plaies de la Zambie
Éliminée dès la deuxième journée après avoir pris 5-0 contre le Japon et l’Espagne, la Zambie a vécu une Coupe du monde cauchemardesque, secouée par de nombreuses affaires en tout genre. Une aventure océanienne bien loin des espoirs fondés sur la belle expérience olympique en 2021, même si la victoire finale contre le Costa Rica (3-1) apportera un peu de baume au cœur.
Annoncée comme l’une des nations sensations de cette Coupe du monde, la Zambie a tenu toutes ses promesses sur le papier, mais pas vraiment au sens sportif, malgré une victoire face au Costa Rica lors du dernier match. Les Copper Queens, qui vivaient le premier Mondial de leur histoire, garderont la parenthèse néo-zélandaise comme un lointain souvenir, dans l’espoir que les polémiques ayant ponctué ce moment soient résolues d’ici la prochaine grande compétition. Petit résumé.
1. Le sélectionneur accusé d’abus sexuel
La nouvelle est tombée le 8 juillet dans The Guardian, alors que la Zambie était en préparation de son premier Mondial depuis plusieurs semaines en Allemagne : Bruce Mwape est accusé d’abus sexuel. Des témoignages seraient parvenus à la FIFA, qui aurait alors décidé d’ouvrir une enquête. Dans le journal britannique, une joueuse raconte sous couvert d’anonymat : « Si Mwape veut coucher avec quelqu’un, vous devez dire oui. Il est « normal » que l’entraîneur couche avec les joueuses de notre équipe. » D’autres sources évoquent au Guardian et à Sport des menaces de sanctions envers les joueuses si celles-ci osent « parler de ce qu’il s’est passé ». La fédération zambienne, devant aussi gérer les accusations visant son entraîneur U17 féminin, n’a pas souhaité commenter et préfère rappeler qu’elle n’a pas formellement reçu d’accusations. Relancé à maintes reprises sur le sujet avant le match contre l’Espagne, Bruce Mwape a répondu qu’il ne préférait pas répondre à des « rumeurs ». « La fédération ferme les yeux parce que les femmes ont eu de bons résultats, assure une source au Guardian. C’est leur façon de montrer au public et aux autorités leur réussite et leur bonne image. Mais en coulisses, c’est très moche. » Le dossier est actuellement entre les mains de la FIFA et de la police zambienne.
2. Des joueuses non payées depuis près de deux ans
Comme révélé par The Guardian le 20 juillet dernier, les joueuses zambiennes n’ont pas été payées par la Fédération depuis près de deux ans. Le litige remonte aux Jeux olympiques de Tokyo, où les Copper Queens avaient terminé troisièmes de leur groupe. Selon le média britannique : « La plupart des joueuses n’ont pas encore été payées pour les matches et les 100 jours d’entraînement depuis leur retour des Jeux olympiques en août 2021. » Une situation qui a poussé les joueuses à ne pas s’entraîner pendant deux jours après leur match amical face à l’Allemagne, le 7 juillet dernier, un match qu’elles avaient d’ailleurs remporté sur le score de trois buts à deux. Face à la hausse de la contestation, Hakainde Hichilema, président zambien, a annoncé vouloir résoudre cette situation au cours d’un meeting le 17 juillet dernier, toujours selon le Guardian : « Faites votre part et votre gouvernement fera la sienne », tout en ajoutant « Oui, j’ai entendu dire qu’il y avait une ou deux choses qui n’avaient pas été faites, mais elles le seront, croyez-moi sur parole. Croyons en l’équipe. » Une situation délétère qui aurait fait des victimes au sein du vestiaire zambien, à la tête de la contestation : Barbra Banda la superstar des Copper Queens, Grace Chanda vice-capitaine et Hazel Nali la gardienne titulaire de la Zambie. Sur les trois joueuses, deux ont été écartées du groupe pour blessure mais le doute continue de régner sur la véritable cause de leurs départs. À l’heure actuelle, aucune information ne permet d’affirmer ou d’infirmer que les primes ont été versées aux joueuses comme l’a annoncé le président zambien, ni quand cela devra être effectif. Une seule chose est certaine c’est que la Zambie et d’ores et déjà éliminée de la Coupe du monde.
3. Le calvaire des gardiennes
Après une préparation réussie d’un point de vue sportif, conclue par un match nul face à la Suisse et une victoire contre l’Allemagne, la FAZ annonce le forfait de sa gardienne titulaire, Hazel Nali, victime d’une rupture des ligaments croisés. Un diagnostic que la portière elle-même remet très vite en cause dans une interview pour ZambianFootball : « Ma blessure n’était pas grave au point que je doive quitter la Coupe du monde. » Elle explique que le staff n’aurait pas cru à sa première blessure et qu’il aurait attendu qu’elle reçoive un second coup pour obtenir des examens médicaux. Examens qui auraient alors annoncé cette grave blessure au genou. « Ils ne m’ont pas montré les résultats de l’IRM, assure Nali, qui émet un doute sur la véracité des examens. Ils m’ont dit que je devais rentrer en Zambie puis repartir pour me faire opérer en Inde ou en Afrique du Sud. Finalement ils m’ont dit que je devais passer d’autres examens en Zambie… » Une situation qui pourrait être liée selon elle à son engagement aux côtés des leaders Chanda et Banda pour réclamer à la FAZ les primes dues. Refusant dans un premier temps de lâcher la sélection, elle a quitté le groupe et laissé son rôle de numéro 1 dans les cages zambiennes à la pauvre Catherine Musonda, qui en prend cinq dès son premier match du Mondial face au Japon. La gardienne de 25 ans va même finir par être exclue à une minute de la fin (90+7e) pour une sortie kamikaze. C’est donc la troisième gardienne dans la hiérarchie, Eunice Sakala, 21 ans, qui affrontera l’Espagne quatre jours plus tard et en encaissera elle aussi cinq. Sans doute abattu par cette première ratée en Coupe du monde, le gouvernement zambien a fait savoir qu’il paiera pour l’opération de Hazel Nali, en Inde ou en Nouvelle-Zélande. Une opération des croisés finalement ?
4. Grace Chanda : le flou artistique
À la veille de l’entrée en lice de la Zambie face au Japon, la Fédération zambienne a annoncé, via la docteur de l’équipe Faith Chibeza, le départ de Grace Chanda, vice-capitaine des Copper Queens. Dans son communiqué, la Fédération indique que la joueuse est tombée malade et est forfait pour le reste de la compétition. Une version que confirme la joueuse dans un autre communiqué publié sur ses réseaux sociaux. La joueuse fait état de sa tristesse de ne pouvoir disputer la compétition. « Ces derniers jours ont été très difficiles pour moi, devoir être admis à l’hôpital et passer à côté de la préparation du tournoi dont je rêvais de jouer mais la santé passe avant tout », explique-t-elle avant de donner de plus ample précisions : « Ma maladie pour le moment ne peut pas me permettre de jouer un autre rôle à ce tournoi. C’est très douloureux, mais je suppose que cela fait partie de la vie humaine et je dois me concentrer sur la récupération et encourager l’équipe jusqu’au bout. »
Copper Queens Team Doctor Faith Chibeza provides update on Grace Chanda and Hazel’s injury. ➡️ https://t.co/YH7q6sUpZL via @YouTube pic.twitter.com/lRaT7eSQfG
— FAZ (@FAZFootball) July 21, 2023
Parallèlement, le média espagnol Relevo a annoncé que la joueuse avait été écartée pour avoir mené une contestation interne – aux côtés de Barbra Banda et de Hazel Nali – suite aux primes non versées depuis deux ans et qu’elle était « indisciplinée et avec une mauvaise influence », selon les propos de la fédération zambienne rapportés par Relevo. Selon son agence de représentation, Grace Chanda aurait bien contracté une maladie qui « devrait la rendre convalescente durant quelques mois ». La maladie en question n’a pas été révélée et le flou continue de persister sur l’origine de cette maladie ainsi que sur les conditions de départ de la joueuse. Une absence qui a pesé sur les résultats zambiens, même si la dernière victoire contre le Costa Rica doit donner l’espoir à ces filles qu’elles avaient toute leur place dans la compétition et qu’elles pourront à l’avenir mieux défendre leurs chances.
Par Léna Bernard et Anna Carreau