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Les noces funèbres de Mauro Icardi
Capitaine et joueur incontournable d'une Inter qui a toujours pu compter sur lui, Mauro Icardi joue certainement son meilleur football. Reconnu par ses pairs, désiré par toute l'Europe, l'attaquant de 24 ans n'arrive cependant pas à reconquérir le cœur de ses propres ultras malgré ses performances hors normes. Preuve que dans le foot, tout ne se pardonne pas.
Dans 99% des cas, prouver sur le terrain permet de gagner ou même de regagner l’amour de ses propres supporters. Parmi le 1% restant, on trouve des « traîtres » passés d’un club rival à un autre, des joueurs qui ont tapé leurs propres supporters tout en étant mauvais sur le pré et puis Mauro Icardi. Indiscutable depuis son arrivée dans une Inter malade en 2013-2014 et convalescente jusqu’à cette année, le natif de Rosario n’a jamais déçu. Avec 86 buts en 140 matchs sous le maillot nerazzurro, des triplés en pagaille même dans les derbys et des buts contre tous les gros, l’attaquant de 24 ans est déjà un grand. D’ailleurs, dans sa vie, il a toujours réussi à obtenir ce qu’il voulait à force de travail, et aussi de talent : un club historique européen, une épouse d’abord promise à un autre et une vie de famille paisible la plupart du temps. Tout, sauf le cœur des supporters historiques de l’Inter. Une plaie invisible lorsqu’il joue à San Siro, sauf pour celui qui s’aventure dans la Curva Nord. Le 16 octobre 2016, l’histoire d’amour entre Icardi et ses plus fidèles supporters s’est brisée. Et la flamme n’est pas près de se raviver.
« Aucun cœur pour cet infâme argentin »
La scène de la discorde remonte à février 2015, lors d’un Inter-Sassuolo perdu (1-3) par le club milanais. Mauro Icardi se dirige vers le parcage interista pour filer sa tunique à un enfant, mais voit celle-ci lui revenir en mode boomerang pour finir sa course sur la pelouse. Icardi en est sûr, c’est l’un des chefs des ultras qui l’a renvoyée de colère, provoquant celle du joueur au passage. Même si les rapports ne sont plus au beau fixe, Icardi a encore du crédit, notamment en ayant marqué 22 buts cette saison-là en championnat. Mais un an et demi plus tard, le torchon brûle. Le samedi 16 octobre 2016, l’Inter d’un Frank de Boer déjà en difficulté reçoit Cagliari à San Siro. Mauro Icardi vient alors de publier son autobiographie Sempre Avanti, dans laquelle il revient avec véhémence sur cet épisode : « Je suis prêt à les affronter un par un. Ils ne savent pas que j’ai grandi dans des quartiers avec le plus haut taux de criminalité en Argentine. »
Le match contre les Sardes est un calvaire pour Icardi : le joueur est hué sur chacune de ses prises de balle et des banderoles comme « Tu utilises un enfant pour te justifier et nous balancer de la merde au visage. Tu n’es pas un homme, tu n’es pas un capitaine, tu es une pauvre merde » ou « Tu inventes des conneries pour vendre plus, sale mercenaire » sont déployées à son encontre. Après le match, le buteur argentin essaye de tempérer ses propos, mais rien n’y fait. Au club, personne n’ose alors prendre vraiment le parti d’Icardi. Javier Zanetti, vice-président, préfère garder les fans avec le club, expliquant que « les supporters sont les plus importants, ils sont derrière nous et nous leur devons le respect » pendant que De Boer expliquait qu’il « fallait trouver une solution tout en respectant Icardi et les supporters, car ce n’est pas bon pour le club » . Le torchon brûle, et malgré les buts, Icardi ne peut rien y faire.
Un Scudetto pour tout arranger ?
Même avec 16 buts en 15 matchs de Serie A, et une première place au classement pour son Inter à laquelle il est attaché, les supporters historiques n’ont pas oublié. Lorsque son nom est scandé par le speaker, tout le stade s’exécute sauf plusieurs centaines de fans de la Curva Nord. Dans une revue distribuée au sein de la tribune début septembre, il était notamment stipulé de ne pas « hurler le nom de l’infâme argentin » , et de ne pas trop en faire non plus lorsqu’il marque. Le mot d’ordre est clair pour poursuivre cette politique : « Qu’Icardi ou un autre marque, c’est pareil car on exulte pour le maillot, et non pas pour un joueur. Ils ne méritent rien » Sur ce coup-là, Icardi ne cherche plus d’excuse et envoie un scud sur Instagram, publiant une vidéo du speaker criant son nom.
Pour Álvaro Recoba, Icardi « lui rappelle Vieri qui marquait tout le temps, mais qui était toujours le problème » . Car aujourd’hui au club, tout le monde est derrière Icardi. Les rumeurs d’un départ en fin de saison au Real Madrid, son entraîneur Luciano Spalletti ne veut pas y croire et met en avant « son amour pour l’Inter. Demandez-lui s’il veut rester ici pour toujours, sa réponse sera une et une seule. » En matière d’amour depuis le début de la saison, Icardi a toujours donné en acceptant de ne jamais recevoir. Face à la Juventus dans le Derby d’Italia ce samedi et plus largement cette saison, Icardi peut une nouvelle fois prouver sur le terrain son amour pour l’Inter. Même s’il n’a aucune garantie de recevoir de l’affection en retour.
Par Andrea Chazy