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Les leçons tactiques de Pays-Bas – France

Par Markus Kaufmann
Les leçons tactiques de Pays-Bas – France

Au cœur d’une Europe qui a la tête ailleurs et dans une Amsterdam marquée par le décès de l’un des siens, Bleus et Oranje ont livré un combat terne et haché – onze changements – enjolivé par cinq minutes de folie. Dans un contexte spécial et face à une sélection dont le talent s’est échappé au cours du temps, Deschamps a pu tout de même recevoir quelques informations. Griezmann, Giroud et Martial ont confirmé leurs bonnes conditions, Lass et Kanté ont rempli leur mission, tandis que Payet en a profité pour signer une performance de cowboy en recherche de reconnaissance.

Quel contexte ! Trois jours après les attentats de Bruxelles et au lendemain du décès de Johan Cruyff, les Pays-Bas et la France ont joué un match de foot à Amsterdam. Un match « un peu spécial » et « des moments de recueillement et d’émotion » , résumera le sélectionneur Didier Deschamps, pour qui l’enjeu était double. D’une part, développer une dynamique de groupe positive, gagner de la confiance et si possible des certitudes. D’autre part, accumuler des informations précieuses pour être en mesure de prendre la meilleure décision possible sur les six places qui restent en suspens : un latéral gauche (Digne, Trémoulinas, Kurzawa), un défenseur central (Mathieu et Mangala depuis la blessure de Zouma), un milieu défensif (Kanté, Schneiderlin, Kondogbia) et deux attaquants (Payet, Coman, Gignac, Ben Arfa, Valbuena, Benzema ?). Alors que Van Nistelrooy et Van Basten sont mis en évidence sur le banc orange, difficile de ne pas pleurer le manque de qualité des joueurs présents sur la pelouse aux côtés du capitaine Sneijder. Enfin, Blaise Matuidi est le seul à porter le numéro 14 en cette soirée hommage. Un détail plutôt drôle quand on pense à la finesse technique de Cruyff et à celle de Blaise. Mais surtout un joli clin d’œil : s’il y a un joueur qui n’existerait pas sans le mouvement cruyffien, c’est bien lui, le numéro 14, capitaine français et mangeur d’espaces, Blaise Matuidi.

Le plan défensif de Blind, la réaction française

Côté local, Dirk Franciscus Blind aligne un 3-5-2 avec trois missions : densifier le milieu pour contrer la construction bleue, limiter les un-contre-un face aux flèches offensives françaises et placer deux points d’ancrage (les milieux latéraux) dans une position avancée pour faciliter les sorties de balle. Côté Deschamps, les Bleus sortent un 4-3-3 classique. Sans Karim Benzema, DD fait confiance à Giroud en pointe, épaulé par les agitateurs de jeu Griezmann et Payet, eux-mêmes soutenus par un trio Lass-Pogba-Matuidi. Là, le premier s’occupe de l’organisation et de la couverture, et les deux autres font les relais et le pressing. Enfin, Jallet et Évra occupent les couloirs, tandis que Koscielny et Varane protègent les cages de Mandanda.

Les cinq premières minutes ne sont pas positives. Varane doit réaliser un sauvetage à toute vitesse dès la première action, Payet manque ses premières transmissions, Pogba est coupable d’une faute : tout, ou presque, part en touche. En phase défensive, le plan de jeu de Blind est ambitieux. Lass est laissé libre de tout marquage, et Varane et Koscielny n’ont aucune difficulté à trouver les pieds du petit moteur de l’OM. En revanche, dès que Diarra lève la tête, il voit Pogba et Matuidi se faire attaquer par Sneijder et Klaassen. Impossible de construire des triangles dans ces conditions, mais les Bleus réagissent bien et démontrent rapidement que les Oranje n’ont pas les moyens de leurs ambitions. S’ils tentent quelques longs ballons – plutôt bien négociés par Griezmann – ils trouvent vite une façon de sauter le pressing hollandais en allant chercher directement Giroud ou Payet, dos au but. Ici, la précision des longues passes au sol de Lass, Varane et Koscielny (et Sakho s’il doit jouer) est cruciale.

Le break des Bleus, l’hommage de De Jong à Cruyff

Sur l’une de ces constructions, à la 6e minute, le franchise player de West Ham contrôle, se retourne, accélère dans l’axe et frappe avec autant d’impact et de swag qu’en Premier League. Corner. Quelques instants plus tard, Griezmann protège son ballon et tombe à l’entrée de la surface, touché par l’insouciance de Klaassen. La nouvelle idole de l’Atlético envoie le coup franc dans la lucarne de Cillessen. Cinq minutes plus tard, les Bleus obtiennent un nouveau corner à la suite d’une montée percutante de Jallet. La courbe de Payet est repoussée, mais Matuidi s’impose dans les airs et sert Giroud, étonnamment esseulé dans la surface. 0-2. On joue la 14e minute, celle de l’hommage au joueur virtuose et entraîneur visionnaire.

Le reste de la première période suit le même schéma. Les Bleus gèrent la possession dans leur camp et ne parviennent pas à connecter leur triangle du milieu. Mais dès qu’ils font sauter le verrou, une occasion se présente. Matuidi mène la charge au pressing et part récupérer des ballons dans les pieds néerlandais, Griezmann nous laisse admirer son sens du jeu sans ballon estampillé Simeone et brouille aisément la construction orange, tandis que Payet distille des ballons dangereux à chaque opportunité. Les Français pourraient mener 0-4 à la pause, mais le match est bien trop amical pour devenir entraînant. Au retour des vestiaires, Depay envoie un coup franc dans la surface. Lâché par le marquage inattentif de Koscielny, De Jong dévie la trajectoire du ballon avec le bras et rend hommage à sa façon à Cruyff, qui avait marqué de la main un but similaire en finale de Coupe des clubs champions 1972 contre l’Inter à Rotterdam. Comme Maradona, le héros avait levé les mains en l’air pour célébrer l’exploit, mais l’arbitre avait tout vu et refusé logiquement l’avantage.

Le début de Kanté, Matuidi en sauveur

Alors que le score est maintenant de 1-2, les Français ont vu Martial, Kante et Digne remplacer Griezmann, Lass et Évra, poste pour poste. En face, Blind passe à un 4-3-3 plus rapide avec les entrées d’Afellay et Memphis Depay. À la 35e minute, Sneijder avait dû quitter les siens et rejoindre Robben dans la catégorie des « derniers grands joueurs néerlandais (mais indisponibles) » . Sans Griezmann, les Bleus ont moins de contrôle et font moins le lien entre l’attaque et le milieu : les profils de Payet et Martial poussent à l’offensive dès la récupération. À l’heure de jeu, les deux joueurs ne sont pas loin de marquer le troisième but français à la suite de slaloms identiques. Derrière, Kanté a remplacé Lass et joue aux élèves appliqués. Deschamps voulait le voir « récupérer des ballons, sentir les trajectoires, bien se positionner » et le poumon de Leicester ne décevra pas : 4 interceptions et 3 tacles réussis (personne n’a fait mieux vendredi soir). Avec le ballon, cela joue simple et tout en retenue : 97% de passes réussies, zéro transversale ou long ballon. Dans ce profil d’organisateur devant la défense, Lass a une nouvelle fois convaincu vendredi soir par sa capacité à changer le jeu rapidement et à trouver les ailes avec talent (5 longs ballons réussis sur 6). Il faut dire que dans cette position et dans ce 4-3-3 élaboré, Kanté n’a pas la possibilité de servir ses ailiers directement comme dans son 4-4-2 en Angleterre, à moins de prendre des risques sur des longs ballons.

À un quart d’heure de la fin, un timide Gignac (4 ballons touchés) remplace un Giroud toujours aussi habile dans les déviations et la conservation du ballon. Une nouvelle mission accomplie pour le Gunner, qui devra toutefois attendre la résolution de la question Benzema pour savoir s’il sera titulaire en juin. Enfin, comme l’a dit Deschamps, il faut souligner que les Bleus n’ont pas su « gérer la rencontre » et ont commis des « fautes d’inattention » . L’égalisation néerlandaise arrivera sur un nouveau coup de pied arrêté : Afellay reprend un corner seul à l’entrée de la surface. Blaise Matuidi, qui avait sauvé les siens d’un retour éclair quelques instants plus tôt dans sa surface (concédant le corner qui mènera à l’égalisation) répondra dans la foulée : percée de Payet, passe aveugle de Martial et appel génial de Matuidi, parti de très loin, qui finit du bout du pied gauche.

De Payet et des coqs français

Alors que Deschamps devra faire des choix cruciaux concernant son animation offensive dans les prochaines semaines, nul doute que le récital de Dimitri Payet vendredi soir sera pris en compte. Marqué par le rythme de jeu de la Premier League, le numéro 8 s’est montré très vif dans ses prises de décision, transmettant l’impression d’être devenu un ailier moderne qui sait ce qu’il faut faire et à quel moment. 87 ballons touchés (personne n’a plus participé au jeu vendredi), 6 passes clés, 4 tirs, 6 centres réussis sur 11. Que ce soit dans le jeu ou sur coup de pied arrêté, tous ses centres se sont transformés en courbes diaboliques pour les Oranje, plongeant dans la surface comme le poison d’un serpent. Surtout, le Français a joué comme un leader qui n’a peur de rien. Et c’est peut-être ici que Deschamps a le plus apprécié sa prestation : alors que Pogba manque d’influence à la création, les slaloms arrogants et les frappes présomptueuses de Payet sont bons à prendre pour des Bleus qui s’apprêtent à subir la pression d’accueillir une compétition internationale à la maison. De la même manière que le sang-froid et la justesse de la performance de Martial sont rassurants – 4e passe décisive sur ses 5 derniers matchs en bleu et 96% de passes réussies – l’envie de briller de la nouvelle star française de Londres tombe à pic.

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