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Les leçons tactiques de Dortmund-PSG

Par Maxime Brigand
Les leçons tactiques de Dortmund-PSG

Alors qu’il avait décidé d’installer un 4-4-2 depuis début décembre, l’entraîneur allemand a choisi de relancer mardi soir, à Dortmund, un système à trois défenseurs qu’il n’avait plus utilisé au coup d'envoi d'un match depuis le mois d’avril 2019. Résultat : cette décision, à double tranchant, a vu le PSG s’incliner (2-1) sans que le technicien parisien ne bouscule ses plans en cours de match.

Ils disaient qu’il était proche du burn-out, usé par cette remise en cause permanente, lui, le technicien perfectionniste embourbé dans un drôle de tourbillon où chaque faux pas déclenche depuis quelques semaines une remise en cause immédiate de son travail. Interrogé en janvier, dans un hôtel de Marbella, par So Foot, Lucien Favre préférait rassurer son monde et ne cessait de rappeler sa capacité à voir du positif dans chaque instant. « Moi, je ne suis pas dans le négatif » , soufflait-il alors, à quelques semaines d’affronter un PSG qu’il a sans aucun doute retourné dans tous les sens pour mieux le cueillir. Un PSG qui avait, en plus, réservé une petite surprise à l’entraîneur suisse du Borussia Dortmund : le retour d’une défense à trois, que Thomas Tuchel n’avait plus utilisée au coup d’envoi d’une rencontre depuis une défaite à Montpellier en avril 2019, et ce, alors que le technicien allemand travaillait centimètre par centimètre un 4-4-2 demandé par ses propres joueurs depuis plusieurs semaines.

Alors oui, cette animation, installée depuis la réception de Galatasaray début décembre, n’était pas parfaite, dépendante des replis défensifs des deux joueurs de côtés (Neymar et Di María), mais avait le mérite de filer aux joueurs parisiens des repères qui se solidifiaient progressivement. Pourquoi maintenant ? Pour s’adapter à l’adversaire du jour, principalement en renforçant la couverture des côtés (notamment l’aile droite du Borussia Dortmund, animée par la paire Hakimi-Sancho) et en misant sur la capacité de ses hommes à exploser en transition tout en profitant des faiblesses défensives supposées d’un BvB. Après la rencontre, Tuchel a refusé de se planquer et a affirmé « ne pas avoir de regrets » sur son plan. Problème : si ce système devait permettre de mieux couvrir les half spaces, il a principalement craqué sur ce détail.

Le PSG a testé une animation, le BvB l’a appliquée

Tactiquement, ce Borussia-PSG a été assez facile à lire, les deux équipes affichant un 5-4-1 en phase défensive et cherchant à faire péter l’adversaire en transition. Seul souci, le BvB joue de la sorte depuis le mois de novembre et maîtrise cette animation. Le PSG, non, et ça s’est vu, notamment dans le cœur du jeu, où le duo Witsel-Can a rayonné dans le jeu, avec et sans ballon, tout en affichant une complémentarité certaine. C’est cette doublette qui a construit le succès du soir du club allemand, qui n’est pas non plus la meilleure attaque d’Europe à domicile pour rien : dans son stade, le Borussia est une machine de guerre, une équipe capable de résister à tous les coups et d’enchaîner les vagues offensives.

Mardi soir, cela a été facilité par le plan bancal du PSG, mangé dans l’axe (ce qui n’a pas empêché les Parisiens d’insister dans ce secteur et donc de se casser les dents à plusieurs reprises), à la rue en transition (si ce n’est sur le but de l’égalisation de Neymar) et largement inoffensif. D’abord, parce que Kylian Mbappé, posé en pointe, n’a touché que des ballons dans des situations de décrochage et a été avalé dans le jeu dos au but, et ensuite, car le trio offensif (Di María-Mbappé-Neymar) a trop souvent été immobile, les trois joueurs parisiens restant sur la même ligne. Bizarrement, sur l’une des seules fois où Di María et Neymar sont venus ensemble se mettre dans le cœur du jeu, le PSG a égalisé. Le principal problème du plan offensif de Tuchel s’est situé ici, mais aussi dans l’incapacité logique des milieux parisiens à trouver les trois têtes de devant.

L’échec de la structure, les flèches d’Håland

Ce qui nous amène ensuite au plan développé par Lucien Favre qui, lui, a vu ses joueurs parfaitement exécuter leur affaire, en piquant notamment le PSG autour de Verratti et Gueye, et non entre (dans les half spaces, donc, où Di María et Neymar ne sont que trop rarement venus se situer). Aucune surprise, finalement, dans ce qu’on a vu de Dortmund mardi soir, l’actuel troisième de Bundesliga ayant réussi, en plus, à déjouer sans trop de difficulté le pressing parisien. En cassant à plusieurs reprises les deux premières lignes de pression du PSG, le BvB a réussi à répéter ce que le Real Madrid avait réussi à faire le 26 novembre au Bernabéu (2-2) : c’est-à-dire à jouer entre la ligne défensive et celle du milieu de terrain des Parisiens, les joueurs de Tuchel étant en plus beaucoup plus éloignés que ceux de Favre. Soit pile à l’endroit où les Allemands excellent, eux qui attaquent en permanence avec cinq pions sous cette forme :

Sur plusieurs séquences, Hakimi a ainsi été trouvé entre Gueye et Kurzawa, même chose de l’autre côté pour Guerreiro entre Verratti et Meunier, alors que Thiago Silva a, comme souvent lors de ce genre de rendez-vous, fait reculer le bloc défensif parisien. Cette attitude du capitaine parisien, et donc de l’ensemble de la base arrière du PSG, en plus largement gênée par la gestion difficile d’un Jadon Sancho intenable, a ouvert les Parisiens à tous les vents et sans la maladresse allemande, le Borussia aurait pu mener à la pause. Il a finalement fallu attendre la 69e minute, instant où Erling Braut Håland n’a pas été suivi par Silva et a lancé l’un des circuits offensifs classiques du BvB.

Trouvé par Emre Can, laissé libre de toute pression, Håland sert de point d’appui à Guerreiro, qui peut ensuite trouver Sancho et Hakimi, lequel a ensuite la liberté de centrer pour l’ouverture du score du BvB.

Huit minutes plus tard, et deux seulement après l’égalisation de Neymar, le PSG a de nouveau craqué sur une phase similaire : libre à la relance, Hummels a alors trouvé le jeune Reyna entre Kurzawa et Verratti, puis l’Américain a touché Håland en profondeur, sous le nez de Silva, avant d’allumer Navas.

En deux passes, le PSG est déséquilibré et Håland profite de l’espace immense laissé par Thiago Silva, qui recule de nouveau. Il n’a plus qu’à armer tranquillement.

En première période, le PSG avait été alerté sur la capacité de Dortmund à briller en transition, notamment au quart d’heure de jeu, où, à la suite d’un corner parisien, les hommes de Favre se sont retrouvés dans une situation de cinq contre trois, gâchée par Sancho malgré un superbe appel d’Håland qui avait ouvert un espace en or à l’international anglais pour servir Hakimi.

Idéalement placé, Jadon Sancho préfère tirer à côté plutôt que de décaler Hakimi ou Guerreiro.

Toujours mise en avance depuis son arrivée à Paris, Thomas Tuchel n’a jamais vraiment réussi à tenir sa « structure » et a vu son PSG être exposé sur les failles soulignées avant la rencontre (l’implication de Di María et Neymar sur les phases défensives, notamment). Plus inquiétant, le technicien allemand a décidé de maintenir son 3-4-3 tout au long de la rencontre, préférant tomber avec son idée de départ plutôt que de revenir à un 4-4-2 où Kylian Mbappé aurait peut-être pu trouver plus d’espaces. « Personne ne sait ce que ça aurait donné avec un 4-4-2, a-t-il soufflé en conférence de presse à la suite de la défaite des siens. On en est à 2-1, on peut faire un meilleur match. Ce n’était pas un match décisif, pas une finale. C’est ma responsabilité d’avoir mis en place ce système.(…)On manque un peu de confiance, j’ai la même impression que vous. On a joué aujourd’hui avec trop de peur de faire une erreur, ce n’est pas bien, on doit penser à la solution. Si tu penses trop à ne pas faire d’erreurs, tu fais trop d’erreurs. On a perdu notre confiance avec les ballons trop faciles. Je ne sais pas pourquoi. » S’il repart de Dortmund avec un résultat loin d’être irréversible pour son PSG, Tuchel, qui a perdu 25% des 24 matchs qu’il a disputés avec une défense à trois têtes, a maintenant trois semaines pour faire revivre ce que Favre a présenté ce soir à l’Europe du foot : la fameuse force collective, un monstre impalpable, mais qui a permis au BvB de sortir de cette manche aller avec une performance aboutie.

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Par Maxime Brigand

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