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Les enseignements du match des Bleus contre la Côte d’Ivoire
Pour cette première de l'année, l'équipe de France a fini par venir à bout des Éléphants (2-1), Giroud et Tchouaméni répondant à Pépé. À sept petits matchs du Mondial au Qatar, cette rencontre amicale a été riche d'enseignements. En voici les cinq principaux.
Une nouvelle génération décomplexée et décomplexante
De mémoire d’éléphants, impossible de se souvenir d’une soirée où Didier Deschamps avait lâché trois petits nouveaux d’un seul coup. Le général des Bleus a déjà « oxygéné » son groupe depuis la faillite à l’Euro : Aurélien Tchouaméni, Moussa Diaby, Jordan Veretout, Theo Hernández et Mattéo Guendouzi avaient ainsi goûté aux honneurs de la sélection sur le deuxième semestre de 2021. À Marseille, ce sont Christopher Nkunku – titularisé aux côtés de Giroud et Griezmann, en l’absence de Karim Benzema et Kylian Mbappé -, William Saliba – entré à l’heure de jeu pour suppléer Varane touché au pied – et Jonathan Clauss – pour une poignée de minutes – qui se sont dévergondés au Vélodrome. Le Lensois est devenu à 29 ans et 181 jours le joueur le plus âgé à faire ses débuts depuis Steve Savidan contre l’Uruguay en 2008, tout juste trentenaire à l’époque. Si l’attaquant de Leipzig s’est montré à son avantage entre les lignes et par ses capacités d’accélération, le défenseur de l’OM a lui impressionné le sélectionneur par « son calme olympien » au milieu des ovations que lui avait réservées le Vélodrome à chacune de ses interventions, au même titre que Matteo Guendouzi. « J’ai trouvé ça sympa, souriait le « vieux » Lloris. Cette génération nous apporte beaucoup d’énergie, du talent, et ils ont beaucoup de personnalité malgré leur jeune âge. Ils ont un historique avec les Espoirs, mais il y a toujours des attentes différentes avec les A. C’est de bon augure pour la suite et ça donnera un élan supplémentaire à l’équipe. » Mais « maintenant qu’ils ils sont internationaux », que « les regards qui sont portés sur eux vont changer », l’important est, selon Deschamps, de voir comment ils digéreront « les lendemains, qui ne sont pas toujours heureux ». Gloups.
Giroud efface tout malentendu
Par définition, il ne faut jamais enterrer un phénix. Et celui de Grenoble l’a une nouvelle fois prouvé. Buteur sur sa première véritable occasion pour revenir à quatre unités du record de Thierry Henry (47 contre 51) et devenir le seul international tricolore à avoir marqué au-delà de ses 35 ans avec Roger Marche, pas loin du doublé en fin de partie et essentiel en point d’appui : l’attaquant du Milan s’est offert un joli come-back, alors qu’il était mis à l’écart depuis l’Euro. Et puisque c’était le statut de remplaçant qui ne lui seyait guère, Didier Deschamps l’a laissé sur le pré toute la durée du match pour la première fois depuis le 17 novembre 2019, et un déplacement en Albanie lorsque la Covid n’existait pas. Marseille a donc vu ce qui ressemble à un rabibochage en règle entre un coach et son joueur. « Je suis très heureux, évidemment, concédait le premier. Si je mets Olivier, ce n’est pas pour que ça se passe mal. Il a toujours été bon et décisif en club, même quand il n’était pas avec nous. Il aurait même pu encore faire grimper davantage son compteur. » Mais le plus intéressant est à venir : comment DD arrivera à faire cohabiter à nouveau Benzema et Giroud dans son groupe ? Réponse avant le Qatar ?
Tchouaméni impose sa patte
Oubliez l’absence de N’Golo Kanté : Aurélien Tchouaméni a fait plus qu’assurer l’intérim pour épauler Paul Pogba au milieu. Le Monégasque, tentaculaire à la récupération, utile avec le ballon et buteur en fin de match, a certainement réalisé ce soir LA prestation qui pourrait lui assurer une place pérenne dans ce collectif. « Ce qu’a fait Aurélien dans ce match, c’est du haut niveau, assurait Deschamps. Il a un potentiel énorme, avec beaucoup de maîtrise, et il l’avait déjà montré sur les matchs précédents. Son binôme avec Paul fonctionne bien. Il a cette agressivité dans la récupération supérieure à Paul, qui est lui plus porté vers l’avant, donc c’est bien. » Le Rouennais de 22 ans est bien conscient du conte de fée qu’il vit : « C’est vrai que c’est beau ce qui m’arrive. J’ai différents objectifs, marquer mon premier but en était un. » Il ne reste plus qu’à dire à ce fameux Paul qu’il peut désormais porter ses valises tout seul au moment de monter les marches de Clairefontaine, et on aura un futur taulier en puissance dans l’entrejeu français.
Des pistons qui commencent à être bien huilés
Pour le huitième match consécutif, Didier Deschamps a aligné une défense à trois, flanquée de deux pistons dans les couloirs. Ce vendredi soir, Kingsley Coman et Theo Hernández étaient aux manettes, avec des styles bien différents – le Munichois virevoltant et chaloupant pendant que le Milanais percutait, frappait (3 tirs pour lui) et trouvait une passe décisive – apportant tous deux satisfaction. « Ils nous permettent de bien occuper la largeur et nous amènent beaucoup de solutions », assurait Deschamps. Theo aurait bien pu signer un deuxième but en Bleu sans les exploits de Sangaré ou son cafouillage en début de deuxième mi-temps, mais qu’importe, offensivement, le job a été fait. Reste tout de même à peaufiner l’aspect défensif, où l’ensemble du bloc a été malmené par Zaha et surtout Pépé. « Je ne veux pas qu’on soit à cinq derrière, quitte à se retrouver dans des un-contre-un, clarifiait le maître d’œuvre. La Côte d’Ivoire avait un système comparable à celui de l’Espagne avec deux joueurs très excentrés. Il y a encore des ajustements à faire. » Un coup de clé à mollette qui passera certainement à l’avenir avec ces deux bonhommes, même si Lucas Digne, Ferland Mendy, Jonathan Clauss et Léo Dubois auront leur mot à dire… tant que Koundé et Pavard n’ont pas à s’y coller et peuvent officier tranquillement dans l’arrière-garde.
La Côte d’Ivoire, plus qu’un sparring partner
Dignement représentée en tribune et sur le terrain, la Côte d’Ivoire n’a pas à rougir de son match, dont elle aurait pu, à quelques secondes près, s’en sortir avec un résultat nul et donc positif. « Le très haut niveau se joue sur ces détails. On y travaille au quotidien et ça ne paye pas pour le moment, regrettait Patrice Beaumelle. Malgré tout, ce soir, je suis fier. Cette équipe a une âme, les garçons ne lâchent pas. À l’avenir, sans qu’on change beaucoup de choses, on sera récompensé. » Du buteur Nicolas Pépé au gardien Sangaré, les Éléphants ont posé une vraie colle aux champions du monde, malgré les cicatrices d’une CAN décevante et d’une élimination pour le prochain Mondial. « C’est bien d’avoir été mis autant en difficulté. On était plus proche d’un match de compétition qu’amical, dans l’intensité et la technique. Ça nous servira pour la suite », reconnaissait Deschamps. Pour son homologue Beaumelle, avant d’aller affronter l’Angleterre à Wembley et en attendant d’en savoir plus sur son sort à la tête de la sélection, cette expérience marseillaise montre aussi le chemin qui sépare sa formation de son adversaire du soir : « La gagne appelle la gagne. Quand on veut gagner, il faut aller le chercher. C’est ce qu’a fait l’équipe de France. J’ai vu une machine de guerre et Deschamps avoir la rage à la fin. Ce monsieur a tout gagné et il a encore la rage ». Voilà l’essentiel.
Par Mathieu Rollinger, au stade Vélodrome
Tous propos recueillis par MR.