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Les discours de mi-temps peuvent-ils vraiment changer le cours d’un match?

Par Christophe Gleizes et Côme Tessier
Les discours de mi-temps peuvent-ils vraiment changer le cours d’un match?

Après une première mi-temps catastrophique en Biélorussie, les Bleus se sont bien repris hier en seconde période pour finalement s'imposer 4-2. L'occasion de s'intéresser plus en détails aux discours de mi-temps. Servent-ils à quelque chose ? Peuvent-ils vraiment renverser des montagnes ?

Tandis qu’elle regagne les coulisses, tristement menée 1-0 par une modeste formation biélorusse, l’équipe de France est au plus bas, proche du néant. En quarante-cinq minutes de jeu, elle n’a pratiquement rien montré. Sur les visages fermés de ses compagnons, le Marseillais Mathieu Valbuena sent de « l’abattement » . Comme il l’a confié à L’Équipe, « un grand silence » règne alors dans l’intimité feutrée du vestiaire. L’ambiance est lourde et pesante. Un joueur, pourtant, va prendre ses responsabilités : Patrice Évra. En véritable taulier du groupe, à défaut d’être un leader sur le terrain, le défenseur de Manchester United prend la parole pour remobiliser ses coéquipiers. « Il nous a dit qu’à un moment donné, il fallait se lâcher. Qu’on avait le plus grand respect pour la Biélorussie, mais qu’on était l’équipe de France et que si on voulait consolider notre deuxième place, il fallait montrer un autre visage » , se souvient Franck Ribéry, avant d’ajouter : « Il a tenu un discours d’homme qui a fait du bien à tout le monde. » La suite, tout le monde la connaît : les Bleus, pourtant muets depuis plus de 500 minutes, inscrivent quatre buts aux Biélorusses pour finalement largement s’imposer et valider leur ticket pour les barrages.

Un bon mot vaut mieux qu’un long discours

Ce n’est pas la première fois qu’un petit speech à la mi-temps fait du bien aux Bleus. Déjà, en octobre dernier, à l’occasion du match nul contre l’Espagne (1-1), Didier Deschamps avait su motiver ses troupes à la pause malgré un premier acte délicat. Dans l’euphorie d’après-match, au terme de la mi-temps la plus aboutie des Bleus depuis bien longtemps, les joueurs avaient tenu à rendre hommage au sélectionneur. « Le coach nous a dit d’y croire, car rien n’était joué. On savait qu’on aurait d’autres opportunités » , racontait par exemple Yohan Cabaye, tandis que Mamadou Sakho expliquait : « Le discours du coach y a été pour beaucoup. Il nous a remobilisés. » Mais le rôle de l’entraîneur ne s’arrête pas seulement au discours, aussi bon soit-il. À la mi-temps du match, Didier Deschamps opère plusieurs changements tactiques pour permettre le renouveau : « Le coach m’a demandé de jouer en 10 entre les lignes, se remémore Mathieu Valbuena.J’ai essayé de mettre de la mobilité, de faire en sorte qu’on ait le ballon parce qu’on ne l’a pas eu beaucoup en première. On a été récompensés parce qu’on n’a rien lâché. » « Je savais que dans la première partie du match, on allait être obligés de défendre. Ceux qui ont commencé ont fait le travail et ceux qui sont entrés ont apporté beaucoup dans le jeu. Mathieu était important pour avoir une animation offensive plus dangereuse et garder le ballon » , confirme alors Deschamps.

Si ses vertus peuvent se révéler insoupçonnées, il reste difficile d’identifier concrètement les retombées d’un bon discours. Suffit-il vraiment d’être un grand meneur d’hommes pour renverser des montagnes footballistiques ? Rolland Courbis, l’ancien entraîneur de l’OM, n’en est pas persuadé. Il est pourtant un spécialiste reconnu de l’exercice oratoire, qu’il pratique avec une gouaille désormais reconnue. Son plus beau fait d’armes ? Une incroyable remontée face à Montpellier, le samedi 22 août 1998. Menée 4-0 à la mi-temps devant son public, son équipe réussit l’exploit d’inscrire cinq buts d’affilée en seconde période pour finalement s’imposer au terme d’un scénario à couper le souffle (5-4). « Concrètement, ce jour-là, je pense que les changements effectués en seconde période ont été beaucoup plus importants que mon discours à la mi-temps. Selon moi, dans le vestiaire, moins on en dit, mieux c’est. Dans une situation difficile, plus le discours est court, plus il est efficace. » Mais qu’a-t-il bien pu leur dire à la mi-temps pour provoquer une telle révolte ? « Je leur ai dit : bon allez, maintenant on va gagner le deuxième match de quarante-cinq minutes, cela nous servira pour la prochaine rencontre et on mettra cette défaite sur le compte d’un accident. Je tenais à voir une réaction, car il y a une différence entre perdre 4-2 et perdre 8-0. Et puis j’ai terminé en leur disant « Sait-on jamais… » Mais très franchement je pensais avoir une chance sur un million de revenir. »

Une infime probabilité qui ne l’empêche pas de charrier Loulou Nicollin à la mi-temps, en lui assurant que sa victoire ne fait aucun doute. « Franchement, c’est le hasard, c’est un concours de circonstances qui me fait dire ça. Je vois Michel Mézy et Louis Nicollin sortir de leur vestiaire, mais eux ne me voient pas. Quand j’arrive, ils sont en train de rigoler comme deux baleines et en me voyant, ils passent d’une tête d’anniversaire ou de mariage à une tête d’enterrement. Je les ai « rassurés » tout de suite et eux me tapaient sur l’épaule comme pour me consoler. Et c’est là que je dis à Loulou : « Mais tu me consoles pour quoi ? On va gagner 5-4 ! »Et là, avec un petit rictus, il me répond: « Oh, t’en serais bien capable ! » La suite, ce n’est même plus un exploit sportif, c’est un miracle qui ne s’est jamais passé sur un terrain de foot. Ils ont fait des recherches dans tous les pays, c’est un scénario qui n’est jamais arrivé. Il n’y a jamais eu un club ou une équipe nationale qui était mené 4-0 et qui a gagné 5-4. Mais bon, moi, j’ai toujours été original dans ma carrière d’entraîneur » , explique-t-il, rigolard. Difficile cependant d’imaginer qu’il ne sentait pas la révolte naissante dans les yeux de ses joueurs avant de balancer une telle prophétie auto-réalisatrice. Mais Rolland Courbis n’attribue à son leadership et son discours qu’une part très modérée de ce succès : « Sans faire le faux modeste, notre remontée dans ce match-là, c’est autant grâce à nous que par la faute de Montpellier. Au retour des vestiaires, j’étais confiant comme on peut être confiant quand on a quatre bosses sur la tête. Et pourtant, en seconde période, ils ont reculé, ils nous ont attendus, leurs attaquants ne nous menaçaient plus et on en a profité. »

À la pause, Serge le disait

Des retournements de situation après la mi-temps, Serge Le Dizet en a lui aussi connu, même s’ils sont un peu moins spectaculaires. L’ancien entraîneur du FC Nantes garde particulièrement en mémoire un fabuleux Nantes/Strasbourg, disputé en 2005 lors de la 16e journée de Ligue 1. Menés 2-0 à la mi-temps, les Canaris rentrent au vestiaire la tête basse. Reboostés par le discours du technicien, ils reviennent métamorphosés sur la pelouse et s’imposent finalement 4-3 grâce à une seconde période de folie. « Je me souviens surtout d’avoir fait deux remplacements à la mi-temps, dont Habib Bamogo à la place de Claudiu Keserü, qui passait complètement à côté de son match » , explique calmement l’actuel entraîneur adjoint du SCO Angers. Il poursuit : « La mi-temps reste un moment-clé pour recadrer ses joueurs et parler de ce qui s’est fait et de ce qui ne s’est pas fait. Je crois plus aux consignes données à la pause que celles sur le bord du terrain, où il n’est jamais évident que les joueurs entendent ce que l’on a à dire. C’est un moment particulier et très important, où on peut tout remettre à plat, autour de l’entraîneur, du capitaine et de deux trois joueurs cadres. » Ces derniers, comme Patrice Évra chez les Bleus, profitent de leur légitimité dans le vestiaire pour être écoutés et faire passer des messages, mettant ainsi à profit « leur capacité d’analyse tirée de leur expérience » .

Surtout, en cas de difficulté, la mi-temps a pour vertu d’offrir une respiration dans le match, qui devient immédiatement l’occasion d’un coaching gagnant. « C’est un moment de réunion de tous, au calme. Les éléments extérieurs ne sont pas là : ni les supporters, ni les adversaires, ni les médias… C’est le moment idéal pour influencer une équipe. Vous sentez qu’il faut changer quelque chose, des joueurs par exemple dans le cas de Nantes-Strasbourg, mais ça peut être aussi une stratégie, une organisation. Et si ça fonctionne, vous reprenez rapidement confiance, alors que l’adversaire se pose des questions. Le rapport de force bascule, car vous savez que vous allez dans la bonne direction. » Dans le cas du match contre la Biélorussie, il semble évident selon le technicien angevin que les discours prononcés à la pause ont eu une influence majeure : « Pour le match de l’équipe de France, on savait que les Biélorusses allaient baisser de rythme, physiquement, à un moment ou à un autre. L’encadrement tricolore a sûrement dû insister là-dessus à la mi-temps, sur le fait que les adversaires allaient connaître un coup de moins bien. » Ainsi, l’équipe de France a pu se sortir mardi de l’ornière biélorusse grâce à quelques bons mots, qui peuvent « redonner confiance lorsque tout va mal » . À l’avenir, il serait néanmoins appréciable qu’elle commence le match pied au plancher et qu’elle cesse enfin de travailler à mi-temps.

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