- Mondial 2014 – Barrage retour – France/Ukraine
Les clés tactiques de France-Ukraine
« Oui, c'est possible », répète Didier Deschamps. Les quatre-vingt-dix minutes vont paraître courtes, le public du Stade de France sera certainement peu indulgent, et les Français eux-mêmes auront peut-être du mal à y croire, mais c'est bien possible. Car en sport, tout est possible. Mettons les leçons de morale et les « symptômes » de côté et concentrons-nous sur le jeu. Comment faire ?
Il n’y a pas de système miracle. Le 4-3-3 est une option, et le 4-2-3-1 en est une autre. Le schéma peut même changer au cours de la rencontre. Pour le moment, on sait seulement que le 4-2-3-1 a subi un double échec : il n’a pas réussi à contenir les Ukrainiens, et il n’a pas non plus créé suffisamment de danger. Il y a eu des occasions françaises, les Bleus pensaient dominer leur sujet, et le match a finalement très, très mal tourné. Ainsi, la surprise n’est plus. Et elle est importante dans cette situation de remontée obligatoire. Le 4-3-3 est non seulement bien armé, mais il propose aussi des repères inconnus aux Ukrainiens. Pour une telle rencontre, l’objectif n’est pas de trouver miraculeusement une identité de jeu sans faille. Il s’agit de faire mal aux Ukrainiens, le plus tôt possible, le plus violemment possible.
Premier round : à quelle hauteur ?
Les vingt-cinq premières minutes seront déterminantes quant à l’évaluation du rapport de force entre les deux formations. Et le principal indicateur de ce dernier sera la hauteur à laquelle se positionnera la paire Varane-Sakho (si elle est confirmée). Le temps écoulé entre la récupération bleue et l’amorce de la prochaine attaque sera déterminant : il faut fatiguer ces Ukrainiens et s’offrir un maximum d’occasions de but. Pour y croire, pour les faire douter. Dans le 4-3-3, la sentinelle devant la défense (certainement Cabaye, peut-être Mavuba) a un rôle primordial pour recycler les ballons récupérés, mais le placement des centraux est la première condition à un début de match conquérant.
Annuler la suprématie physique des Ukrainiens ?
La France paye peut-être le prix d’avoir un nombre si important de joueurs évoluant en Premier League. Forcément, là-haut, on s’imagine difficilement remporter une rencontre sans écraser physiquement son adversaire. Mais si l’engagement physique était la variable la plus importante du football moderne, ces clubs de Premier League écraseraient l’Europe, et la sélection anglaise remporterait des titres. Bref, cela se saurait. Ainsi, si tu ne peux pas grimper la montagne ukrainienne, tu peux la contourner. Tu n’as pas vraiment le choix, en fait. La solution passe par plus de vitesse, plus de mouvement, plus de rythme. Le ballon doit gicler, les Bleus seront pressés. Et c’est ici que l’on peut s’inquiéter de l’état de la pelouse du Stade de France…
Dans cette perspective, la capacité d’association de Benzema offre deux (très bons) pieds en plus au circuit de la possession de balle française. Giroud serait un excellent joker. Et les deux ? Il n’y a aucun sens à griller tes deux avants-centres dès le coup d’envoi alors que tout serait encore possible à 0-0 à dix minutes du terme et que l’entrée de l’un ou l’autre pourrait avoir un impact sur le résultat. Dans le centre du jeu, la capacité de Cabaye à gérer les changements de rythme sera primordiale. Entre-deux, trop tiède, Nasri a échoué à renverser le jeu et imposer un rythme. En comptant sur deux centraux conquérants et placés hauts à ses côtés, ainsi que sur une paire Pogba-Matuidi lancée vers l’avant, Cabaye peut se créer l’espace pour dynamiser la manœuvre bleue. À condition que Deschamps sache répondre au pressing que l’ex-Lillois subira certainement dès l’entame du match.
Impliquer Pogba dans les offensives bleues, compter sur Cabaye
Les barrages sont des combats au couteau. C’est du corps à corps, les choses se font lentement, les avantages prennent du temps à s’acquérir et ils sont par conséquent d’autant plus défendus. Pour en marquer trois à une Ukraine solide et confiante, il faudra une équipe avec un maximum de ressources offensives. Déséquilibrer un bloc, cela prend du temps et des hommes. En faisant de Matuidi et Pogba des bouche-trous à l’aller, Deschamps s’était privé d’une force de frappe offensive conséquente. Avec une défense centrale placée suffisamment haut, si Cabaye parvient à annuler les contre-attaques ukrainiennes, cela procurera de la liberté aux deux milieux bleus. Le calcul est simple : deux milieux en mouvement et trois attaquants valent mieux que quatre attaquants sans ressources. La performance de Cabaye sera donc déterminante.
Aider Ribéry, donner des responsabilités à Valbuena
Mathieu Valbuena. Et si c’était vraiment lui ? Le lien, la force, la ressource de la création française ? Ribéry est indéniablement le Bleu le plus dangereux individuellement, et aussi celui qui sait le mieux s’associer sur son côté gauche. Quand Ribéry va, tout va. Mais il y a un souci : Fomenko a été mis au courant. Prises à deux, trois ou quatre, Ribéry ne s’en était pas sorti vendredi. Aidé par un Matuidi plus libre et par un Benzema attiré naturellement par le côté gauche, il y aura des solutions. Mais surtout, il y aura un Valbuena « tout-terrain » pour lier ce pôle gauche à tout le reste des armes françaises, à commencer par le brûlant Pogba.
Y croire jusqu’au bout
Deux buts, cela peut aller vite. Très vite. Deschamps devra faire les changements les plus audacieux possibles. Les joueurs vont devoir y croire jusqu’au bout, pousser jusqu’à l’épuisement. Et le public, tout autant. Il serait dommage que les Bleus perdent le soutien des leurs dès l’heure de jeu alors que les cinq dernières minutes peuvent suffire. Alors, impossible, c’est français ?
Par Markus Kaufmann
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