- Ce qu'il faut retenir de la semaine européenne
Les bonnes questions de la semaine européenne du 12 avril
La logique de Guardiola, le joker du Barça, le remède ajacide ou encore João Félix éclaboussé par son propre talent : cette semaine de joutes européennes a une nouvelle fois levé un certain nombre d'interrogations.
Anfield est-il devenu une forteresse imprenable ?
Une forteresse imprenable. Voilà comment était parfois surnommé Stamford Bridge au début des années 2000, quand Chelsea demeurait invaincu en championnat sur sa pelouse entre février 2004 et octobre 2008. Soit l’équivalent de… 86 matchs. Avec ses 37 parties de Premier League sans défaite à domicile, Liverpool en est encore loin. N’empêche que les Reds ont d’ores et déjà construit les fondations de la muraille, et s’en servent même en Coupe d’Europe. Après sa nouvelle victoire contre Porto, l’armée de Jürgen Klopp a enchaîné une treizième rencontre à la maison sans revers en Ligue des champions.
Mieux : ses soldats anglais, qui ont encore conservé leurs cages inviolées malgré les tentatives d’invasions portugaises menées par le leader offensif Moussa Marega, comptabilisent quatre clean-sheets en cinq possibles à domicile cette saison en C1. Seuls les Français de Paris ont réussi, par deux fois, à tromper la vigilance d’Alisson Becker et de ses protecteurs en 2018-2019. Donc oui, Anfield est bien en train de se transformer en fortification militaire « en prévision d’une éventuelle attaque » comme le définit Wikipédia. Avec un Allemand comme architecte, et un Hollandais comme chef de chantier. Ça promet.
Une défaite représente-t-elle un meilleur résultat qu’un match nul ?
Sachant que Pep Guardiola considère que « c’est la Ligue des champions » , que le résultat entre Tottenham et Manchester City (1-0) « est ce qu’il est » , que « personne ne s’attendait à ce que ce soit facile » , que sa formation a réalisé un match « plutôt bon » , qu’elle a « eu le contrôle » durant les 90 minutes, qu’il faudra voir « ce qu’il se passe au retour » et surtout que, parfois, « un 0-1 est meilleur qu’un 0-0, car vous savez exactement ce que vous avez à faire » , peut-on conclure que perdre en quarts de finale aller de Ligue des champions à l’extérieur sans marquer constitue une meilleure performance qu’un match nul ou doit-on considérer que l’entraîneur catalan sait manier la langue de bois comme personne ? Vous avez deux heures.
Le Barça n’aurait-il pas déniché le successeur de Messi ?
Si l’Argentin n’est pas divin à en croire le pape François, il est au minimum du monde des super-héros. Et sa kryptonite à lui est un événement se tenant chaque début de printemps nommé « quart de finale de Ligue des champions » . Alors que CR7 se transforme en Super Saiyan chaque saison lorsque l’enjeu grimpe d’un cran, la Pulga se retrouve en perte totale de ses capacités depuis quelque temps déjà : aucun but à ce stade depuis 2013, et aucun au-delà des huitièmes depuis 2015.
6 – Meilleurs buteurs de Barcelone en Ligue des champions depuis le début de la saison dernière :Lionel Messi – 14 butsCSC – 6 butsOusmane Dembélé – 4 buts?♂️. pic.twitter.com/jPjZbThHWa
— OptaJean (@OptaJean) 11 avril 2019
Du coup, comme l’an dernier, les Blaugrana essaient de s’en remettre à leur autre homme fort pour enfin accéder à un dernier carré qu’ils ont manqué ces trois dernières saisons. On le pensait retraité depuis son coup d’éclat face à la Roma l’an dernier et sa prolifique Coupe du monde, mais le bougre semble avoir repris du service : à l’affût sur un coup de casque de Luis Suárez, CSC a encore sorti le Barça de la galère à Old Trafford en prenant possession de la carcasse de Luke Shaw. En C1, celui qui a grandi dans la Creuse déçoit rarement depuis deux saisons. Leo Messi n’étant pas immortel, le FCB tient peut-être entre ses mains le crack de demain.
L’Ajax Amsterdam constitue-t-il la meilleure arme contre la réforme de la Ligue des champions ?
D’abord, le Bayern Munich tenu en échec en phase de poules à l’extérieur comme à domicile (1-1, 3-3). Ensuite, le Real Madrid triple vainqueur de la Ligue des champions éjecté dans son Santiago-Bernabéu en huitièmes (4-1). Et maintenant, la Juventus accrochée lors du quart aller (1-1). Mais jusqu’où va aller cet Ajax Amsterdam, aussi enthousiasmant à observer évoluer aux yeux des amateurs de sport que chiant à identifier pour certains dirigeants ? Pas plus loin, espèrent ces derniers.
Car en donnant autant de plaisir au monde du foot, les Hollandais incarnent le premier argument en défaveur de la prochaine réforme de la compétition envisagée par les instances concernées et qui devrait réduire drastiquement la taille de la porte d’entrée pour les plus « petits » clubs. Avec la nouvelle C1, un parcours comme celui des Néerlandais constituera en effet un véritable miracle, si tant est qu’ils auraient encore l’occasion de le réaliser. Alors Messieurs, merci de dégager maintenant. Il est l’heure de redonner le ballon à ceux auxquels il appartient.
Un quart de finale de Ligue Europa est-il une question de vie ou de mort ?
« Le football n’est pas une question de vie ou de mort, c’est quelque chose de bien plus important que cela » : on ne peut pas le nier, Bill Shankly avait le sens de la formule. Mais le regretté entraîneur écossais pensait-il que ce serait le cas même pour un quart de finale aller de C3 joué un jeudi soir à l’Emirates ? Même si l’affiche n’aurait pas fait tache sur le plateau de la LDC avec les Gunners d’un côté et le Napoli de l’autre, la punchline semblait un poil exagérée pour coller au contexte : qu’est-ce qu’une qualification vers le dernier carré de la Ligue Europa, face à une vie ?
Et pourtant. La partie a basculé juste avant la fin du premier quart d’heure, au moment où le chat noir Aaron Ramsey s’est appliqué pour ouvrir la marque. Cet homme a-t-il un cœur ? Apparemment, le succès des siens était plus important que tout. Il y a plus d’un mois, le leader de The Prodigy Keith Flint et l’acteur Luke Perry nous avait quittés à la suite du rush du soyeux milieu face à Tottenham ; début avril, le coiffeur-star français Jean-Louis David a lâché son dernier souffle après le pion de Ramsey contre Newcastle. Croisons désormais les doigts pour que le sort cesse de s’acharner : le Gallois ayant marqué à trois reprises en un mois et demi, la faucheuse va finir par se retrouver en burn-out.
La C3 se transforme-t-elle en vulgaire fête de voisins ?
Un derby de la Comunitat en quarts entre le FC Valence et Villarreal, la possibilité d’une finale Arsenal-Chelsea qui reste crédible… Qu’il est loin, le temps des Real-Atlético en Ligue des champions ! Cette saison, c’est la petite Coupe d’Europe qui offre des déplacements en métro aux équipes engagées.
Cela valait-il le coup de convoquer toute l’Europe, de Hafnarfjörður à Satchkhere, pour finalement terminer sur un barbecue hypocrite entre quelques têtes qui se croisent déjà toute l’année et qui ne peuvent de toute façon pas se piffrer ? Dans son projet de réforme des compétitions, l’UEFA ferait mieux de caser une C4 « Coupe d’Europe des voisins de palier » , histoire que les choses soient claires.
João Félix est-il le premier surpris de ses exploits ?
C’est l’un des arrêts sur image marquant de ce jeudi soir : le crack du Benfica, genoux à terre et mains sur les yeux, laissant échapper quelques larmes à la suite de son troisième caramel face à l’Eintracht Francfort pour clore une prestation exceptionnelle. À 19 ans et des bananes, le rookie portugais a mis une claque à l’Europe, mais c’est le joueur lui-même qui semble en avoir pris une belle en prenant conscience de ce qu’il venait de réaliser. Personne n’avait donc prévenu ce pauvre enfant qu’il était capable de faire autant de choses avec ses deux pieds ? Espérons qu’il ne tombe pas sur les estimations de sa valeur marchande, en ce vendredi matin.
? 19-year-old Benfica star João Félix = youngest player in history to score a #UEL hat-trick! ??? pic.twitter.com/30aetcL4oD
— UEFA Ligue Europa (@EuropaLeague) 11 avril 2019
Par Florian Cadu et Jérémie Baron