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Les bonnes questions de la semaine européenne
Encore une sacrée cuvée sur la scène européenne. On a vu un remplaçant éliminer Manchester United, des Romains retrouver les sommets, ou encore des Marseillais continuer leur petit bonhomme de chemin.
Fermer sa bouche a-t-il toujours du bon ?
Alors Wissam, c’était comment ? « Bah, c’est un rêve d’enfant de gagner contre des grands joueurs, de grandes équipes comme Manchester United. C’est exceptionnel… » Sur un coup en deux bandes, cette semaine, la carrière de Wissam Ben Yedder a donc pris un gros virage : héros de la qualification du FC Séville à Old Trafford en Ligue des champions et auteur d’un doublé qui lui a permis d’égaler le record de buts d’un Français en C1 tenu par David Trezeguet (8 buts en C1 cette saison), le petit format de Sarcelles a également été appelé pour la première fois chez les Bleus jeudi. Costaud, et ce, alors que son temps de jeu en club a fondu depuis l’arrivée de Vincenzo Montella. Alors, c’est quoi le secret ? « J’ai toujours fermé ma bouche et travaillé. » Vieille technique de l’élève modèle toujours récompensé pour son sérieux. Nolan Roux n’a pas eu autant de chance. Jérémy Mathieu et Aymeric Laporte, eux, ont préféré l’ouvrir. On sait ce que ça a donné.
Vaut-il mieux défier l’Olympe ou l’Olimpico ?
Pour les Grecs antiques, le mont Olympe, c’était l’endroit où douze dieux se prélassaient en buvant de l’ambroisie. Pour les Romains contemporains, le Stadio Olimpico, c’est l’endroit où onze types dominent l’Europe en buvant de l’acqua minerale. Car depuis le début de la saison, la Roma n’a jamais perdu à domicile, certes. Mais, surtout, elle n’a carrément jamais pris un but. Rien, nada, que tchi. Tous ceux qui sont venus à l’Olimpico sont rentrés à la maison avec un zéro pointé dans la colonne des buts marqués. Eh oui, il ne fait pas bon se friter avec des gens qui logent sur l’Olympe ou à l’Olympico. Prométhée et Sisyphe l’ont appris à leurs dépens en étant condamnés à des châtiments atroces, se faire manger le foie tous les jours pour le premier, pousser continuellement une pierre sur le flanc d’une montagne pour le second. Mardi soir, les gars du Shakhtar Donetsk s’en sont sortis avec un peu moins de souffrances, mais ont tout de même regardé Alisson s’offrir une nouvelle clean sheet à domicile.
Le foot a-t-il une justice ?
Qu’on soit clair : la question n’est pas de savoir s’il y a des flics dans le foot, mais plutôt de savoir si ce sport est juste. Antonio Conte, séché avec Chelsea au Camp Nou mercredi soir (0-3), a sa petite idée : « Quand on regarde le match, on voit que le résultat n’est pas juste. Sur les deux manches, nous avons touché quatre fois les montants, c’est très étrange. » Non, ce n’est pas étrange, Antonio, c’est le sport. Demande à un nageur français qui s’est un jour planté dans un couloir aux côtés de Michael Phelps. Demande à Christophe Lemaître pourquoi il court moins vite que les autres une fois que les Mondiaux arrivent. Demande à Adrie van der Poel pourquoi il a croqué dans ce foutu pigeon. Essaye un jour de voir avec Roy Jones Jr. ce qu’il pense de sa défaite contre Park-Hi Sun à Séoul en 1988 ! Le foot est injuste, c’est son sel. Et ça ne changera jamais.
Devra-t-on attendre 2023 pour voir le prochain record de Jupp Heynckes ?
Depuis la double victoire du Bayern contre le Beşiktaş, tout le monde en fait des tonnes. Oui, Jupp Heynckes est entré dans l’histoire en remportant une onzième victoire d’affilée en Ligue des champions. Oui, c’est un record et il dépasse les dix victoires consécutives de Louis van Gaal. Mais quel trompe-l’œil ! Quand on fouille un peu, on se rend compte que ce sacré Jupp a mis toutes les chances de son côté. La supercherie commence en juin 2013, quand le coach du Bayern annonce qu’il prend sa retraite après un triplé Pokal/Bundesliga/Ligue des champions. Heynckes reste alors sur cinq victoires de suite en C1, puisque Munich a tout gagné depuis les quarts. La suite, c’est une pause de presque cinq ans avant de sortir de sa retraite en octobre dernier pour reprendre la tête du Bayern et s’envoyer une nouvelle série de six victoires. En gagnant cinq matchs de suite par-ci, par-là, tous les cinq ans, tout devient plus facile. Du coup, on a très envie de paraphraser Amonbofis et de dire : « Avec des moyens pareils, moi aussi, j’y arrive. »
L’Armée rouge pardonnera-t-elle un jour aux russes blancs ?
Hé ho, les Russes ! Votre révolution, c’était il y a 101 ans ! Quand donc allez-vous digérer votre passé ? Jeudi soir, le CSKA Moscou a encore envoyé un triste message aux partisans de la réconciliation nationale en crucifiant les Lyonnais. Le CSKA est historiquement l’équipe de l’Armée rouge. Et l’Armée rouge, après la révolution de 1917, elle s’est battue contre qui ? Contre ceux que l’on a appelé les Russes blancs, ces Russes refusant le bolchévisme qui ont créé les armées blanches et déclenché une guerre civile dans le pays. À l’époque, l’Armée rouge avait eu la peau des blancs, et le soviétisme a pu s’installer dans tout le pays. Au Parc OL, face aux soldats lyonnais vêtus d’un maillot blanc, les joueurs du CSKA ont vu remonter de vieux réflexes et ont envoyé leurs adversaires aux oubliettes. Comme quoi, l’histoire n’est vraiment qu’un éternel recommencement.
Ocampos disputera-t-il la Coupe du monde à la place d’Emiliano Sala ?
C’est l’Argentin en forme, le goleador que rien n’arrête, la machine à marquer, le grand buteur qui va faire de l’Argentine un des favoris au Mondial en Russie. Mauro Icardi ? Gonzalo Higuaín ? Paulo Dybala ? Lionel Messi ? Sergio Agüero ? Non, Emiliano Sala. Un attaquant insatiable en train d’enchaîner sa deuxième saison de suite à plus de dix buts en Ligue 1 avec le FC Nantes, excusez du peu. À coup sûr, Sampaoli ferait une grave erreur en se passant de lui. Mais depuis quelques jours, un autre attaquant argentin déboule comme une furie pour abattre toutes les certitudes. Lucas Ocampos – puisqu’il s’agit de lui – est dans la forme de sa vie et a marqué quatre buts en une semaine depuis jeudi dernier et son doublé à l’aller contre Bilbao. Forcément, Sampaoli va douter. Ocampos ? Sala ? Sala ? Ocampos ? Dans le fond, le sélectionneur argentin ne ferait-il pas mieux d’emmener les deux en Russie, et de laisser les autres surcotés à Buenos Aires ? « Tout l’art de la guerre est fondé sur la surprise » , écrivait Sun Tzu. Et Sampaoli a les cartes en mains pour tendre une immense embuscade à ses futurs adversaires.
Par Alexandre Doskov et Maxime Brigand