- C1 – J6 – Bayern-PSG
Les bonnes questions avant Bayern-PSG
En déplacement à Munich mardi soir, le PSG débarque en Allemagne avec une double mission : définitivement valider la première place du groupe B et oublier la défaite à Strasbourg.
Où en est Emery dans son « voyage » ?
Des étapes couchées sur le carnet d’une deuxième saison : interrogé en août par So Foot, Unai Emery avait alors affirmé vouloir que « cette année, le PSG soit la référence du football français » , que son groupe « se dépasse » . « Au niveau européen et mondial, le club ambitionne de devenir une marque reconnue, et la Champions est la vitrine idéale pour ça, expliquait alors l’entraîneur-communicant. Gagner cette coupe, c’est un défi, mais il ne faut pas en faire une fixette. Il faut que ce soit un processus. Gagner, c’est un voyage. Il y a des étapes à respecter. » Étape 1 : emboîter les recrues dans le projet collectif – « il n’y a pas de rendement individuel s’il n’y a pas de rendement collectif. L’inverse est aussi vrai. » . Étape 2 : rouler sur le championnat, s’en servir comme d’une « préparation idéale » aux échéances du printemps suivant. Étape 3 : apprendre à souffrir, se multiplier tactiquement et se découvrir une force en contre-attaques, ce qui a manqué au PSG au Camp Nou le 8 mars dernier, mais qu’on a vu à l’aller contre le Bayern (3-0) le 27 septembre.
Aujourd’hui, Unai Emery est au volant d’une berline qui casse les mâchoires de l’Europe du foot et le dérapage de la Meinau n’y change rien. Seul détail : le collectif dépend encore trop des prestations individuelles – celles de Neymar et Kylian Mbappé principalement –, ce qui laisse un déséquilibre (vu à Strasbourg) entre le bloc défensif et le bloc offensif. Cette équipe n’est pas encore tout à fait un ensemble, le déplacement à Munich mardi soir, qui sera son premier vrai test – le match aller ayant été tronqué par le scénario, la situation du Bayern de l’époque, les absences – doit permettre d’apporter une vraie réponse, dans la maîtrise comme dans la capacité à rebondir un lendemain de cuite.
Existe-t-il une vraie concurrence ?
Un objectif comme un bracelet accroché à la cheville d’Unai Emery : la concurrence, en bouteilles d’eau ou dans la vraie vie. Peut-être avant tout ce qu’il a manqué au PSG la saison dernière, notamment lors de la phase aller. Dans cette quête, Emery a installé cette saison une rotation dans sa défense centrale au cœur du ménage à trois entre Thiago Silva, Presnel Kimpembe et Marquinhos. Sinon, les circonstances ont souvent poussé l’entraîneur espagnol a joué la carte de la continuité, en C1 comme en Ligue 1. L’idée serait la suivante : permettre au onze type de bosser, bosser et rebosser ensemble jusqu’à la trêve hivernale, le turnover, le vrai, sera pour début 2018. Partant, on voit quand même le management d’Emery – soit la volonté de garder chacun de ses éléments à un degré de motivation maximal – face à certaines interrogations, la prestation d’Ángel Di María à Strasbourg sonnant dans ce sens comme une nouvelle alerte.
« On a besoin de lui, répond le Basque. En première mi-temps, il a eu des occasions. S’il marque sur l’une d’entre elles, on peut dire que c’est bien. Pour moi, il a fait le travail, après il n’a pas été efficace dans la surface (ce qu’Emery lui reprochait déjà principalement la saison dernière, estimant malgré tout que quand l’Argentin élève son niveau, le PSG fait grimper également le sien d’un cran, ndlr), mais ça vaut pour tous les joueurs. » C’est le dilemme du metteur en scène : soumis à une pression de spectacle invariablement demandé par des clients du Parc assoiffés par la volonté de voir Neymar, Mbappé, Alves et les autres alignés à chaque rencontre pour assouvir leur fantasme, Emery ne peut pas forcément se permettre de les faire reposer. La place laissée à Di María et Pastore, qui peinent forcément à se sentir intégrés au projet commun et qui n’apportent rien en entrant en cours de représentation, se réduit donc, et ce problème de riches pourrait devenir un heurt en février, comme l’an passé.
Le PSG peut-il tomber une deuxième fois en trois jours ?
La recette pour battre le PSG serait finalement assez simple. « Il faut que toutes les planètes soient alignées, détaillait Thierry Laurey, le coach du Racing, samedi. On savait qu’il fallait un bloc bien compact pour ne pas offrir d’espaces à cette équipe. On a vu comment Troyes avait évolué mercredi et on a trouvé que c’était plutôt une bonne option. De toute façon, passer à cinq derrière, sans temps de préparation, ça n’aurait rien donné. » Résultat, il faut jouer et voir, ce que le Bayern n’avait pas réussi à faire à l’aller. Pour plusieurs raisons, le scénario, d’abord, ce que Marco Verratti avait expliqué en sortant de la pelouse : « Le but dès la deuxième minute nous a fait du bien et nous a permis d’opérer en contre-attaque, et avec les joueurs que nous avons, c’est appréciable. Ce n’était pas un choix de jouer de cette façon, mais on s’est adaptés au scénario du match. » Au Parc, le PSG avait été supérieur sans être non plus impressionnant collectivement, l’équipe se retrouvant, déjà, souvent coupée en deux.
Contrairement au Camp Nou, la défense basse forcée avait, cette fois, tenu, et le Bayern, poussé à jouer plus haut, n’était pas préparé à une telle approche. Résultat : le milieu allemand – Tolisso, Thiago Alcântara, Vidal – avait été obligé de jouer bas, souvent sur une ligne commune, proche de la défense, créant de fait un vide impossible à combler dans un milieu de terrain où Rabiot est devenu indiscuté et rendant le jeu munichois facilement lisible. Soit un décalage sur le côté suivi d’un centre du latéral directement dans la surface, ou une tentative de une-deux avec un Lewandowski accroché dans la toile parisienne. Détail : le Bayern de septembre n’est pas le Bayern de décembre. Le voilà aujourd’hui retrouvé, tranquille leader de Bundesliga et seulement battu une fois depuis le revers du Parc, à Mönchengladbach samedi dernier (1-2). Depuis son arrivée, Jupp Heynckes, dont l’objectif initial était de « libérer » les joueurs, danse en 4-2-3-1 avec quatre joueurs offensifs brûlants et un Coman en feu. Le replacement de Javi Martínez au milieu n’y est pas étranger.
Comment va la gauche ?
Comme depuis un moment : elle interroge, entre Layvin Kurzawa qui fout des perles dans ses cheveux et Yuri Berchiche bousculé à la Meinau. Le principal point d’interrogation – au-delà de la concurrence – de la première partie de saison du PSG est là : trouver un pendant crédible à Dani Alves sur le côté gauche. À Munich, Kurzawa, qui avait largement souffert devant Kimmich à l’aller et qui a été laissé au repos par Emery à Strasbourg, devrait retrouver son siège de danseur sur ligne. De quoi laisser un peu de place à la réflexion pour l’hiver des dirigeants parisiens, mais aussi à l’imagination d’un schéma qui permettrait de combler ce manque (un 3-4-3 ?). Le match à Munich n’est pas là pour ça, mais plutôt pour conforter les certitudes, la Ligue 1 restant le laboratoire d’une équipe qui se calque facilement avec le Barça de 2015, essentiellement animé par un milieu bas pour obtenir la possession et un trio offensif de folie. C’est aussi dans ces moments-là que Blaise Matuidi manque à son monde.
Le Bayern fait-il encore flipper quelqu’un ?
Oui, même si Heynckes a bataillé lundi en conférence de presse pour assurer qu’il serait « présomptueux de penser que nous pouvons atteindre la première place du groupe (le PSG a trois points d’avance, ndlr). Nous ne le sommes pas. C’est un match de prestige, bien sûr.(…)Je suis optimiste sur le fait d’offrir une bonne soirée à notre public. Le Bayern a une grande histoire en Ligue des champions. » Ce que le PSG n’a pas et qu’il n’aura pas avant un moment, l’histoire ne s’écrivant pas en saccageant le Celtic lors d’un match de poules. Le Bayern reste un monstre qui sait faire monter la température au moment où il le souhaite, ce que Paris ne sait pas encore vraiment faire. En parlant thermomètre, la neige a blanchi les toits de Munich et une température négative est attendue dans la soirée de mardi. Soit un détail qui avait au moins autant pétrifié Neymar à Strasbourg que le pied gauche de Dimitri Liénard. Drôle d’histoire.
Par Maxime Brigand