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Les aoûtiens de la Ligue 1

Par Christophe Gleizes & Emmanuel Aumonier
8 minutes
Les aoûtiens de la Ligue 1

Emmanuel Rivière n'a pas inventé la hype estivale. Avant lui, beaucoup d'autres joueurs ont réalisé un mois d'août d'exception avant de finalement rentrer dans le rang. De David Bellion à Alain Traoré, en passant par James Fanchone ou Nicolas Goussé, retour sur un phénomène difficile à appréhender : celui des joueurs dont la carrière ressemble à un tube de l'été.

Radamel Falcao est tout étonné. À ses côtés, sur la pelouse de Louis II, l’innatendu Emmanuel Rivière vient de claquer son triplé, après avoir déjà lancé les siens vers la victoire lors de la première journée. Quatre buts en deux matchs pour le buteur monégasque, qui n’a pourtant jamais dépassé la barre des huit réalisations en Ligue 1. Un début de saison en fanfare pour un joueur souvent moqué et promis à passer sa saison sur le banc. Son coup du chapeau sorti de nulle part, Emmanuel Rivière l’attribue avant tout à « une bonne préparation collective » qui a lissé les automatismes, « d’autant plus que les recrues sont arrivées assez tôt » . Humble, le Martiniquais estime en outre bénéficier de la présence et du travail de ses coéquipiers : « Je suis avec des stars, dans un très grand club. J’apprends de ces stars et je progresse. Falcao est un très bon attaquant, il n’y a pas mieux au monde. Il focalise toute une défense et libère des espaces. » Avant de rappeler un facteur de réussite aussi banal que décisif : « J’ai la confiance du coach, tout se passe bien. » Ainsi, pour la première fois de sa carrière, l’attaquant s’estime « au bon endroit » , et il arrive en forme au bon moment.

Des champions de la préparation

La confiance du coach, c’est ce qui a le plus manqué à David Bellion tout au long de sa carrière. « J’ai toujours brillé par période ; et lorsque j’ai brillé, c’est toujours parce que l’on m’a donné une certaine affection. D’autres sont plus forts dans l’adversité, mais moi, je ne joue bien que lorsque je me sens apprécié. » Élu joueur du mois d’août par l’UNFP en 2007, le Bordelais claque 10 buts jusqu’en novembre, avant de rentrer dans le rang. « En pré-saison, j’ai joué tous les matchs amicaux, j’étais bien préparé. Arrive la première journée, on joue contre Lens, on gagne 1-0. C’est moi qui marque et ensuite tout s’enchaîne. C’est le coup classique de la confiance, mais un attaquant en a besoin plus que tout autre joueur. Et puis surtout j’ai pu enchaîner les matchs jusqu’en novembre sans me blesser. » Quand on lui demande si ses performances sont liées aux mois de l’année, l’ancien grand espoir du football français avoue une préférence pour les débuts de saison : « Je ne me suis jamais posé la question, mais j’imagine que ça doit être lié à un sentiment d’excitation avec la reprise. Et puis, en août, les équipes ont encore les jambes lourdes, tout le monde se jauge un petit peu, j’en ai profité. »

Le soleil parti, la fatigue accumulée, David Bellion retombe ensuite dans ses travers. Lucide et modéré, il explique : « Tout s’est arrêté à la trêve hivernale. Je suis parti faire une cure de désintoxication en Italie dans une clinique, j’ai perdu beaucoup de poids et je suis revenu fatigué. Et puis surtout, à la reprise, Marouane Chamackh, avec qui je formais un duo très complémentaire, est parti à la CAN. Je me suis retrouvé tout seul en pointe, sans repères, et ça a été difficile. Laurent Blanc m’a mis sur le banc contre Paris et je ne suis jamais revenu. » Il ne marque que deux buts lors de la phase retour et reprend alors le fil d’une carrière en pointillé. Mais l’ancien Niçois n’est pas seul. Au long palmarès des joueurs du mois d’août de l’UNFP, on retrouve d’autres champions de l’été. James Fanchone est de ceux-là. Le lauréat de 2008 explique : « On venait de descendre en Ligue 2 avec Strasbourg, en ayant enchaîné onze défaites lors de nos onze derniers matchs. La nouvelle saison arrive et on joue Montpellier. Une bonne équipe, donc il y avait de la pression à la Meinau. Après un match compliqué, je marque à la 90e minute et on gagne. C’est un but qui m’a mis en confiance pour le reste de la saison, derrière j’enchaîne avec un doublé à Dijon. »

Cette année-là, James claque 13 buts en Ligue 2, mais la seconde moitié de saison est moins convaincante. Cette subite baisse de régime admet aussi une autre explication : le soleil. Comme ses semblables, l’attaquant Havrais confesse une préférence marquée pour le ciel bleu : « C’est largement plus agréable de jouer quand il fait chaud, surtout que les pelouses en début de saison, c’est des galettes, et qu’il y a du monde dans les stades. Et puis c’est le début de saison, tout le monde a envie de se montrer. » Un constat partagé par Marcos Dos Santos, l’attaquant troyen, qui a reçu le premier trophée UNFP de la saison en 2010 en Ligue 2, après avoir enchaîné quatre buts en quatre matchs contre Metz, Ajaccio, Reims et Tours. « Moi, cela fait sept ans que je joue en France, je me suis fait au climat, mais franchement, je viens d’un pays ensoleillé et j’ai l’habitude de la chaleur. C’est pourquoi je préfère vraiment jouer l’été que l’hiver, je me sens mieux. » Là encore, sitôt le seuil de septembre passé, le joueur baisse de pied. Il ne marque plus que cinq buts lors des 32 dernières oppositions.

Si James ou Marcos ont plus ou moins tutoyé les légendaires Nicolas Goussé, Daniel Braaten ou Lilian Compan, tous auteurs dans leur carrière d’un début de saison majuscule, le souverain pontife des joueurs estivaux reste sans conteste le Burkinabé Alain Traoré. Auteur de deux débuts de saison canons lors des deux derniers étés, il est unanimement reconnu comme un spécialiste des cinq premières journées, qu’il égaie souvent de frappes divines et bien roulées. Le 27 août 2011, alors qu’il vient de claquer avec Auxerre un doublé contre Ajaccio, le meilleur buteur de Ligue 1 s’explique : « Depuis la reprise, ça me sourit bien. Je me sens de mieux en mieux dans cette équipe. J’ai fait une bonne préparation, réussi à ne pas me blesser, tout roule pour moi. » Rebelote l’année suivante avec Lorient, avec quatre buts en cinq matchs dont un doublé somptueux face à Rennes. Dans ces moments-là, la réussite n’est jamais loin. Son magnifique deuxième but dans le derby breton est rentré on ne sait trop comment, ou seulement par talent : « Ma frappe est le plus beau but, mais je suis également très satisfait du coup franc. Pour être honnête, je ne cherchais pas à mettre la balle en lucarne. Je voulais seulement donner de la puissance et de l’effet. »

Incandescent pendant l’été, Alain Traoré est le premier à disparaître l’hiver venu avec une régularité aussi paradoxale que confondante. Pour le sélectionneur congolais Claude Leroy, fin connaisseur de la Ligue 1, il ne faut pas chercher bien loin l’explication d’un tel phénomène : « Les joueurs qui flambent en début de saison sont souvent des joueurs africains habitués aux fortes chaleurs et aux conditions climatiques de l’été. De plus, les terrains sont très secs en août, cela favorise les joueurs fins, rapides et affûtés, « les gazelles » comme on dit en Afrique. Des joueurs comme Henri Camara par exemple. » L’ancien entraîneur de Strasbourg nuance par la suite son analyse : « Mais bon, il y a quand même des joueurs puissants et lourds qui s’en sortent très bien comme Gignac en ce moment. Ce qui prouve bien qu’on peut faire dire ce que l’on veut aux réalités du jeu. »

Raisons physiques et mentales

Laurent Bessière, préparateur physique du stade de Reims, avance un autre regard sur le phénomène. « Certains joueurs très talentueux n’arrivent à exprimer leur qualité que quand ils se sentent bien psychologiquement. Ils sont frais mentalement en début de saison, mais quand s’instaure la fatigue, ils rentrent dans le rang. Quant à la question physique, ça dépend des caractéristiques des joueurs, de leur condition, de leur statut international ou pas. Certains peuvent couper pendant les vacances, alors que d’autres ne le font pas. Forcément, ils ne reviennent pas au même niveau. » Ainsi, selon notre expert, les héros du mois d’août ont en commun « d’être forts psychologiquement. Pour s’entretenir pendant les vacances après onze mois de compétition, il faut être costaud mentalement. Ensuite, ils baissent de pied logiquement car ils partent très forts… Un peu comme Aubameyang l’année dernière qui a crevé l’écran d’entrée avant de connaître une période un peu plus compliquée. »

Préparation estivale de qualité, soleil aguicheur, excitation de la reprise… Les raisons diffèrent, mais participent toutes d’un même constat. « Parfois, c’est aussi lié aux équipes dans lesquelles ils jouent, poursuit le préparateur Rémois. Lille, par exemple, chaque année, ils mettent du temps à arriver au top, mais ensuite ils montent en puissance pour devenir une machine de guerre en fin de saison. D’autres équipes, qui jouent le maintien ou les qualifications pour l’Europe, ont besoin d’être prêtes plus tôt dès la première journée de championnat. La performance des joueurs reste donc très dépendante du contexte immédiat du match. »

Ainsi, les performances du mois d’août seraient moins représentatives du niveau réel des joueurs, dans un contexte où les équipes ont les jambes lourdes et ne sont pas encore au point tactiquement. « Pas du tout ! » s’énerve gentiment Stéphane Saint Raymond, le directeur de l’information de l’UNFP : « Une performance reste une performance, peu importe le mois de l’année. Je ne vois pas en quoi marquer cinq buts en août est plus dévalorisant que marquer cinq buts au mois d’avril. » Dans ce cas, pourquoi le syndicat ne délivre-t-il plus de trophées au mois d’août depuis trois saisons et le sacre de Lisandro López ? « C’est vrai que depuis 2010, on a pris la mauvaise habitude de démarrer en septembre, mais c’est juste lié à un problème d’organisation à cause des vacances. Cette année, cependant, il me semble bien qu’on va corriger le tir et redémarrer les votes pour le trophée dès le mois d’août. » Un trophée que peut donc légitimement convoiter Emmanuel Rivière, sans véritables concurrents après son départ fringant. Actuellement en pleine réussite, il peut bien continuer à rêver. L’hiver paraît moins rude et surtout très loin, une fois plongé dans les songes d’une nuit d’été.

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