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Les années Sporting de Quaresma
Ce jeudi soir, le Sporting Portugal se déplace au stade olympique Atatürk pour y affronter le Beşiktaş pour le deuxième match du groupe H de Ligue Europa, soit le « Quaresmico » du foot européen. Idole des Aigles noirs, Ricardo Quaresma a surtout été formé chez les Leões. Déjà de l'extérieur du pied.
Samedi 22 août dernier. Le Beşiktaş joue son cinquième match de Süper Lig face au Trabzonspor. Premier du championnat, les joueurs de Senol Günes galèrent face à Kevin Constant et ses coéquipiers. Puis, à la cinquante-septième minute, « Ô Cigano » a un grand coup de chance ou de génie. On ne sait pas vraiment si Quaresma centre ou tir, mais il marque à coup sûr et égalise. Trois minutes plus tard, il prend un second jaune pour un coup franc joué trop rapidement. Après avoir fait croire au costume de sauveur, Quaresma laisse ses coéquipiers à 10 perdre à domicile contre Trabzonspor.
Ces trois minutes représentent à elles seules toute la carrière du Portugais : un homme capable du meilleur, comme du pire. Ricardo Quaresma a tout simplement fait du Quaresma : des dribbles vifs et bien sentis, quelques percées de soliste dans le camp adverse, des tacles pieds décollés, mais surtout un but dingue qui viendra lui faire gagner quelques vues de plus sur Youtube, où il collectionne les entrées et ses plus grands fans. Quaresma, ce sont des buts en cascades, des dribbles venus d’ailleurs, mais surtout un geste : « la Trivela » , une frappe de balle de l’extérieur du pied apprise et maîtrisée avec un certain Cristiano Ronaldo durant leur apprentissage à « l’Academia » , le centre de formation du Sporting. Plus qu’une caresse extérieure de la chaussure, durant ces sept années d’apprenti, « El Mago da Trivela » y a surtout semé les contours de ce que sera sa carrière : le bazar.
Un talent indéniable et des pieds tordus
Installé dans un quartiers chaud de Lisbonne avec une maman Quaresma qui essaie de faire vivre sa tribu comme elle le peut, Ricardo est un garçon avec un certain caractère et se fait rapidement repéré par le Sporting. Et ça, il le doit à son frère, Alfredo, et à Aurelio Pereira, recruteur au SCP. Ce dernier envoie un émissaire observer le grand frère mettre à l’amende les joueurs du Desportivo Domingos Savio. Il y découvre dans le même temps le petit frère, Ricardo. Pereira raconte : « J’entendais souvent parler d’Alfredo Quaresma, au point que j’ai décidé d’envoyer un observateur pour voir ce qu’il valait réellement. Comme prévu, le gosse était bon. L’observateur a donc pris rendez-vous avec sa mère, mais en attendant qu’Alfredo sorte des vestiaires, il avait repéré un autre garçon de 7 ou 8 ans encore plus prometteur. C’était son frère, Ricardo. » L’aventure vert et blanc peut commencer.
Le trajet maison-centre d’entraînement est un vrai périple, mais Ricardo fait les efforts pour être présent à chaque entraînement, quitte à se couper de sa famille : « Ça commençait à 19 heures et se finissait à 22h. Je ne quittais les installations qu’à 22 heures, se rappelle-t-il. Ensuite, il fallait que je prenne le métro, le bateau et que je cours pour attraper le dernier bus. Quand j’arrivais chez moi, il était une heure du matin, ma mère dormait depuis longtemps. Des semaines passées sans que je la vois vraiment. » Les sacrifices valent le coup. Pourtant, déjà, le jeune Ricardo possède un défaut – qui deviendra très vite une qualité pour son finish perso : la fameuse Trivela. Né les pieds tordus, Quaresma trouve plus simple d’utiliser l’extérieur du pied pour frapper. Un geste qui dérange lors d’entraînements avec, comme consigne spécifique, l’utilisation de l’intérieur : « L’entraîneur pensait que je me foutais de lui, que je lui manquais de respect. J’ai essayé de lui expliquer que je n’arrivais pas à faire autrement, mais il n’a pas voulu me croire. » Peu importe, il l’utilisera quand même.
Un draxter, une rolex et une explosion
Sa formation se passe bien. Tellement bien que László Bölöni, coach du Sporting de l’époque, décide de l’intégrer à l’équipe première à seulement dix-sept ans. Lui en compagnie de ce Cristiano Ronaldo. Sauf que Ricardo, en plus du foot, est attiré par le succès, l’argent et le bling-bling. Comme il le dévoile lui-même : « Quand j’ai commencé au Sporting et que j’ai vu Jardel, Paulo Bento et compagnie baigner dans le luxe, ça m’a donné des envies, dit-il. Je voulais aussi une grosse montre, comme eux tous. Je me suis même fait la promesse que ma première montre serait une Rolex. Je l’ai achetée dès que j’ai pu. » Une montre qu’il garde encore chez lui comme les trophées de champion ainsi que la coupe du Portugal.
La saison 2001-2002 des Sportinguistas est une sacrée réussite tant sur le plan personnel que collectif. L’Europe commence à comprendre que le SCP possède des cracks dans son équipe. L’ex-coach de Rennes n’hésite pas à trouver un surnom qui colle parfaitement au personnage de Quaresma. Ce sera « Ô Mustang » , qu’il explique : « C’était à la suite d’un match contre le Standard de Liège où il fait un match grandiose. Le Mustang, c’est un cheval sauvage, libre, difficile à contrôler. Avec ses qualités et défauts. Je me demandais… Est-ce qu’un jour il acceptera certaines règles qui feront de lui un excellent cheval de course, ou continuera-t-il d’être libre, de suivre sa volonté, d’être un mustang qui cavale sans but précis ? » Le canasson ira tenter le galop jusqu’au FC Barcelone la saison suivante. Le début des problèmes pour Ricardo Quaresma.
Par Gad Messika
Tout propos recueillis par William Pereira pour SOFOOT #115