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LES 50 JOUEURS QUI ONT ÉCRIT L’HISTOIRE DE L’AJAX – 1E

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Parce que tout a été à peu près raconté sur Johan Cruyff, il semblait plus logique de revenir sur l'immense carrière de celui qui reste et restera probablement le plus grand joueur que l'Ajax Amsterdam ait accueilli en son sein sous la forme de quatorze - évidemment - moments-clés ajacides. Car plus qu'un joueur des Pays-Bas ou du FC Barcelone, Cruyff était avant tout un homme d'Amsterdam.

#1 - Johan Cruyff

25 avril 1957 – Premier entraînement avec l’Ajax

Hermanus Cruyff aura dû attendre le dixième anniversaire de son rejeton pour lui faire le plus beau cadeau qui soit en l’emmenant à son premier entraînement avec les gamins de l’Ajax. Le paternel aurait bien inscrit Johan quelques années auparavant, mais cela n’était tout bonnement pas autorisé. Prenant son mal en patience, le gamin a travaillé ses appuis et son contrôle de balle sur les pavés du quartier socialiste de Betondorp, à quelques mètres de commerce de fruits et légumes familial situé Akkerstraat, numéro 32. « Johan avait tout le temps un ballon aux pieds. Il était très maigre, pas très robuste, et ça inquiétait d’ailleurs sa mère. Il jouait soit avec d’autres petits, soit contre un mur, tout seul » nous confiait en 2015 Madame Swart, 86 ans et habitante de Betondorp depuis plus d’un demi-siècle. Autre voisin et pas des moindres, Sjaak Swart – aucun lien – se souvient d’un gamin qui « à huit ans, jouait tout le temps dans la rue et qui a toujours fait partie du paysage. Il ne ressemblait à rien. Il évitait les coups, avait des yeux dans le dos » . Se prenant à l’époque pour l’icône du football hollandais des fifties Faak Wilkes, Cruyff n’a pourtant d’yeux que pour un seul club, situé à quelques centaines de mètres de chez lui : Ajax Amsterdam.

8 juillet 1959 – Décès de Hermanus Cornelis Cruyff

C’est à la sortie de l’école que Johan apprendra la mauvaise nouvelle : à seulement 45 ans, son père adoré Hermanus vient de décéder d’une crise cardiaque. Dès lors, tout s’accélère. Incapable de tenir le commerce de Betondorp seule, sa mère Petronella le revend avant d’être employée comme femme de ménage par l’Ajax. Plus tard, elle refait sa vie avec Henk Angel, « Oncle Henk » , concierge du club. De fait, Johan Cruyff est tous les jours à l’Ajax. Le midi, il est convié à la table des coachs Keith Spurgeon et Vic Buckingham pour apprendre l’anglais. Le soir, il joue contre le mur des vestiaires de l’équipe senior pendant que sa mère ramasse les maillots sales. Mais la disparition de « Manus » Cruyff aurait avant tout apporté une chose à Johan : sa défiance envers l’autorité. Ni Dieu ni maître puisque Papa n’est plus là. Quoique. Dans une note révélée par sa famille, Dolf Grunwald, psychologue du sport engagé par Rinus Michels jusqu’en 1970 pour analyser les comportements des joueurs de l’Ajax Amsterdam écrit : « Cruyff refuse vraiment l’autorité parce qu’il compare inconsciemment tout le monde à son père. S’il pouvait arrêter de voir en Rinus Michels quelqu’un qui n’est pas aussi grand que son père, l’équipe ferait un grand bond en avant. » Rinus Michels, Cor Coster… Tout au long de sa vie, le joueur néerlandais n’aura de cesse de se chercher des mentors, puis de les jauger de 1 à 10 sur « l’échelle de Manus » .

15 novembre 1964 – Championnat des Pays-Bas, GVAV-Ajax Amsterdam (3-1)

Âgé de seulement dix-sept ans, Johan Cruyff reçoit son baptême du feu de la part de son ancien professeur d’anglais improvisé Vic Buckingham. Alors que les premiers froids arrivent, l’Ajax Amsterdam se déplace à Groningen pour affronter le GVAV et finit par s’embourber au Sportpark Kardinge. Ce qui n’empêchera pas Cruyff de marquer son tout premier but avec la vareuse ajacide sur le dos, avant d’en planter 203 autres pour le club d’Amsterdam pendant les deux décennies suivantes.

7 décembre 1966 – 2e tour de Coupe d’Europe, Ajax Amsterdam-Liverpool FC (5-1)

Collision frontale entre deux mythes en gestation de l’Europe du football, dans l’épais brouillard du stade Olympique. Du rond central, on voit à peine les buts. Les Reds de Bill Shankly, finalistes de la Coupe des coupes six mois plus tôt, veulent reporter. L’arbitre refuse. Une tornade rouge et blanc finit par les emporter. Ce soir-là, Cruyff inscrit un but et donne deux passes décisives. Les Anglais sauvent l’honneur à la dernière minute. Dans Rouge ou mort, David Peace rapporte le dialogue entre Matt Busby et Shankly, trois jours plus tard à Old Trafford : « Rude ? Non. Là-bas, on n’a jamais été battu par l’Ajax, on a été battu par le brouillard. Et à Anfield, il n’y a pas de brouillard » , avance Shankly. « Ce n’est pas un crime de croire au père Noël, Bill, j’espère juste que vous avez des cheminées assez grandes à Anfield » , rétorque le manager de Manchester United. Le 14 décembre, Cruyff danse sur le ventre des gars du Merseyside (2-2). Le Hollandais marque les deux buts de son équipe et inscrit l’Ajax sur la carte du foot mondial.

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2 décembre 1968 – Mariage avec Danny Coster

En 1964, Johan Cruyff lie son destin avec un ancien diamantaire, Cor Coster. Ce dernier devient son agent, son mentor et un père de substitution… Le binôme reconfigure le lien contractuel entre les joueurs, les clubs et les sponsors. Accessoirement, l’aîné présente sa fille, une blonde altière, à son cadet. Un coup de foudre et un mariage plus tard, Danny donne naissance à trois enfants : Chantal, Susila et Jordi. Depuis, celui que les joueurs du PSV Eindhoven surnommaient « le Gendre » au milieu des seventies n’a plus pris une décision sans en référer à son omniprésente dulcinée. Quarante-six ans que ça durait. Elle est là, la Dream Team.

28 mai 1969 – Finale de la Coupe d’Europe des clubs champions, AC Milan-Ajax Amsterdam (4-1)

Première finale de C1 pour un club néerlandais. Les jeunes de l’Ajax paient pour apprendre. Le Milan de Gianni Rivera, cornaqué par Nereo Rocco (déjà là pour la première Ligue des champions des Rossoneri en 63) est trop rodé pour les Ajacides. Un triplé de Prati en contre plie l’affaire. L’année suivante, Feyenoord gagne la première Coupe d’Europe batave. Puis ce sera le triplé royal de l’Ajax, sur la scène continentale. En finale, Cruyff et les siens retrouvent parfois des Italiens, comme l’Inter (2-0) en 72 ou la Juve (1-0). Le Milan, lui, paie son péché originel en finale de la Supercoupe d’Europe 73 (6-0). Sans Cruyff…

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30 octobre 1970 – Championnat des Pays-Bas, Ajax Amsterdam-PSV Eindhoven (1-0)

Au début de la saison 1970-1971, l’Ajax doit faire sans Cruyff. Une douleur tenace à l’aine qui s’était déclarée à l’été l’écarte des terrains pendant les trois premiers mois de l’exercice. Johan revient le 30 octobre 1970 contre le PSV (1-0). Et là, surprise ! Il ne porte plus son numéro 9, mais le numéro 14. À l’époque, les joueurs du onze de départ étaient obligatoirement numérotés de 1 à 11. Explication : c’est Gerrie Mühren qui avait récupéré le numéro 9 car, un jour de match, il n’avait pas trouvé son numéro 7 attitré dans la corbeille à maillots et comme Cruyff était durablement blessé… Quand Johan est revenu, il s’est rabattu sur le numéro 14, numéro le plus proche disponible (le 12, celui de Blankenburg, et le 13 était réservé aux deux seuls remplaçants autorisés à l’époque). Cruyff décide de conserver le numéro 14 qui restera pour toujours lié à sa légende, comme le numéro 23 de Michael Jordan. En son hommage, un magazine de foot néerlandais est baptisé Nummer 14. Cruyff n°14, Chanel n°5 : deux must éternels…

28 décembre 1971 – Premier Ballon d’or

Un plébiscite. En récoltant plus du double de points que son poursuivant de l’Internazionale Alessandro Mazzola (116 contre 57), Johan Cruyff devient le premier joueur néerlandais, de l’Ajax de surcroît, à remporter un Ballon d’or. Le premier d’une série de trois – un record à l’époque, égalé dix ans plus tard par Michel Platini. Si Franz Beckenbauer et la victoire de l’Allemagne de l’Ouest à l’Euro 1972 n’étaient pas venus s’immiscer dans l’histoire, lesdits Ballons d’or auraient pu être aussi consécutifs que les victoires en Ligue des champions de l’Ajax ces années-là.

22 janvier 1972 – Championnat des Pays-Bas, FC Den Haag-Ajax Amsterdam (1-2)

Le caractère extraordinaire du but-coup de pied de karaté qu’a inscrit Cruyff avec le Barça face à l’Atlético de Madrid a eu un effet indésirable majeur : gommer de l’inconscient collectif une bonne partie des autres buts majestueux d’El Flaco. À l’Ajax, on se souvient surtout d’un, merveille d’intuition à La Haye. Sur une longue ouverture, Cruyff, le long de la ligne de touche, réalise un controle orienté qui renvoie la balle au centre du terrain en même temps qu’il trompe le défenseur haguenois qui marque le nummer 14. Puis, arrivé à l’entrée de la surface, Cruyff décoche une frappe en première intention qui vient se loger sous la barre du gardien. Un chef-d’œuvre d’une imparable fluidité.

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7 mars 1973 – Quart de finale aller de la Coupe d’Europe des clubs champions, Ajax Amsterdam-Bayern Munich (4-0)

Le Bayern, fort de ses sept vainqueurs de l’Euro l’année précédente et de ses six futurs champions du monde l’année suivante, vient défier l’Ajax chez lui. Les Bavarois tiennent, héroïques, quarante minutes avant que la coque ne se fendille : sauvetage sur la ligne de Roth et frappe de Krol sur le poteau. En deuxième mi-temps, Beckenbauer, Maier, Breitner, Müller et Hoeness ne touchent plus terre. Le jeu de l’Ajax ressemble à un ballet parfaitement chorégraphié où l’occupation des espaces et la dextérité technique se combinent à merveille. Un doublé de Haan, une volée venue d’ailleurs de Gerrie Mühren et un coup de tête tardif de Cruyff finissent par achever les champions d’Allemagne. Le chorégraphe a changé (Stefan Kovács pour Rinus Michels), mais le FC Van Gogh vient alors de donner la première véritable leçon de football de l’histoire des coupes d’Europe. Deux mois et demi plus tard, la bande à Cruyff rafle sa troisième C1. Dans la nuit noire d’Amsterdam, Sepp Maier, dégoûté par tant de maestria, jette de rage son équipement dans un canal. Seize mois plus tard, au moment d’affronter les Pays-Bas en finale de leur Mondial, les Bavarois et Maier se vengeront du « pire moment de (leur) carrière » .

22 août 1973 – Signature au FC Barcelone

À la fin de l’été, grâce à la réouverture des frontières espagnoles, Rinus Michels retrouve son prodige au FC Barcelone. Pour autant, le choix de Cruyff n’a rien d’affectif. Le mois précédent, lors d’un stage de pré-saison à De Lutte, il y a mutinerie dans les cales du navire ajacide. Une fronde menée par Piet Keizer qui souhaite dépouiller Cruyff du brassard de capitaine. Lors d’un vote dans le lobby de leur hôtel, treize joueurs de l’Ajax choisissent Keizer, tandis que seulement trois soutiennent celui qui n’est alors « que » double Ballon d’or. Alors, Johan Cruyff se lève, monte dans sa chambre, prend le téléphone et appelle son agent Cor Coster : « Tu dois appeler Barcelone, je pars d’ici. »

7 novembre 1978 – Jubilé Johan Cruyff, Ajax Amsterdam-Bayern Munich (0-8)

À 31 ans, et après avoir fait l’impasse sur la Coupe du monde 1978, Johan Cruyff a tiré sa révérence. Pour fêter comme il se doit sa propre carrière, le génie de Betondorp invite ce qui se fait de mieux à l’époque : le Bayern Munich. De son côté, il compose tranquillement sa petite dream team ajacide, s’imaginant déjà être le héros de la soirée. « Ça devait être un grand moment, un match agréable avec un score de 4-4, 5-5 ou 6-5 avec un but à la dernière minute de Cruyff » , racontera d’ailleurs son coéquipier Ruud Kaiser dans So Foot en 2015. Mais non. Se sentant traités comme des malpropres – mal accueillis, placés dans un hôtel pourri, insultés de « gros porcs nazis » par les supporters en tribunes –, les Bavarois ont décidé de jouer le match à fond. Sans oublier les branlées infligées par l’Ajax au Bayern par le passé qui reviennent. Résultat : triplé de Müller, triplé de Rummenigge, doublé de Breitner. Johan Cruyff, lui, sort avant la fin du match, refusant d’être « la victime d’un sacrifice » . La fête est gâchée à Amsterdam. Pourtant, ce funeste jour de novembre 1978 aura eu un impact positif : quelques mois plus tard, Cruyff rechaussera les crampons en NASL aux Washington Diplomats.

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12 mai 1982 – Championnat des Pays-Bas, Ajax-Helmond Sport (5-0)

À 35 ans, Johan Cruyff est au crépuscule de sa carrière. Revenu chercher la stabilité dans le giron ajacide après de nombreux atermoiements (signatures avortées à Leicester, puis à l’AC Milan avant de signer à Levante), le triple Ballon d’or est l’un des piliers de l’Ajax de Kurt Linder, qui remporte le titre en Eredivisie. Surtout, ce vieux lion de Cruyff démontre que l’intelligence prendra toujours le pas sur la vitesse et la puissance. Dans les derniers instants du championnat, face au fragile Helmond Sport, le nummer 14 réalise un geste – pas nouveau, il est vrai – qui s’inscrira dans la légende du football : un penalty joué en deux temps avec Jesper Olsen.

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15 juin 1983 – Signature au Feyenoord Rotterdam

Coup de tonnerre sur le championnat des Pays-Bas : quelques semaines après la fin de la saison, Johan Cruyff s’engage avec l’ennemi séculaire. Le génie du foot aurait-il viré savant fou ? Que nenni ! Cruyff a toute sa tête lorsqu’il prend cette décision. En business, l’attaquant était comme face au but : efficace, implacable, sans affect, voire égoïste. Tout du moins, lorsqu’il se sentait avantagé. Lors de sa seconde signature à l’Ajax, Cruyff avait convenu avec l’équipe dirigeante d’un salaire famélique en échange de la moitié des recettes des matchs à domicile, un système éprouvé à Levante. L’Ajax et ses tribunes clairsemées pensaient avoir réalisé l’affaire du siècle, au détail près que Johan premier a fait revenir les foules en masse à De Meer. Oups. Deux saisons plus tard, l’Ajax ne veut plus de ce deal qui avantage Cruyff avant tout. Blessé dans son orgueil, la légende ajacide commettra donc, comme chant du cygne, le crise de lèse-majesté de s’engager avec le Feyenoord. À De Kuip, Cruyff passe une saison à se faire huer en dépit d’une victoire en championnat dans laquelle son importance est cruciale. Pas grave, pour lui, la bataille psychologique est remportée. Johan cruyff wins.

Par Matthieu Rostac et Rico Rizzitelli

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