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Les 50 joueurs qui ont écrit l’histoire de la Juventus (du 6e au 4e)
De Platini à Gentile en passant par Trezeguet, la Juventus aura vu défiler des champions en tout genre : des esthètes, des leaders nés, des buteurs compulsifs, des porteurs d'eau et même quelques salopards, qui ne rechignent pas à faire le sale boulot. Autant d'hommes qui ont écrit l'histoire de la Vieille Dame, si belle et si terrible à la fois.
#6 - Dino Zoff
Plus qu’une légende, Dino Zoff est un monument. Une icône définitivement canonisée à la suite de sa victoire à la Coupe du monde 1982 avec la Nazionale, à 40 ans passés. Néanmoins, le portier était déjà entré depuis bien des années dans l’histoire du football italien. Avant même d’arriver à la Juventus, il a remporté l’Euro 1968 et a dix ans de professionnalisme derrière lui. En 1972, les Bianconeri accueillent donc dans leurs rangs un gardien de 30 ans qui mesure parfaitement l’exigence et la pression que requiert le très haut niveau. Zoff frôle ainsi le sublime avec la Vieille Dame dès sa première saison dans le Piémont : en 1973, la Juve remporte le scudetto et échoue en finale de Ligue des champions face à l’Ajax. Suivront cinq autres titres de champion d’Italie et une Coupe UEFA, où Zoff continue de faire parler son style, qui lie sobriété et efficacité. Quasi exempt de fautes de main, doté d’un sens du placement inné, il préfère, si possible, bloquer les ballons plutôt que les détourner, favorisant ainsi une approche méthodique et rationnelle plutôt que spectaculaire.
Leader silencieux et phénomène à sang-froid, il s’attache à conserver une aura de mystère et de retenue qui ne le quittera pas de toute sa carrière : « Je donnais cette impression-là, d’être froid et détaché. Mais derrière tout cela, il y avait beaucoup de modestie. J’étais très pudique et par conséquent assez peu médiatique. » Cette discrétion ne l’empêche pas d’être très prolixe dès qu’il s’agit de parler tactique avec ses équipiers et avec son entraîneur, Giovanni Trapattoni, qui relate que Zoff « est l’un des joueurs les plus sérieux qu’il ait jamais connus. » « Il avait une confiance absolue dans la maxime : « Le travail produit des résultats. » Sur ses camarades, son ascendance était très forte. Avant chaque match, il prenait part à l’analyse technico-tactique des forces et faiblesses des adversaires. » Sans surprise, Zoff s’offrira une reconversion plutôt réussie comme entraîneur à la Juve, puis à la Lazio, et atteindra même la finale de l’Euro 2000 lorsqu’il prend brièvement la tête de la Nazionale. Même si, ce soir-là, le grand Dino verra Francesco Toldo s’incliner devant une frappe météoritique de David Trezeguet. AC
#5 - Gaetano Scirea
Le 3 septembre 1989, Sandro Ciotti, le présentateur de la Domenica Sportiva, prend le micro en plein direct. Avec son inimitable voix grave, et des trémolos dans la gorge, il annonce l’impensable : « J’interromps le programme pour une raison véritablement terrible : Gaetano Scirea est mort. Il est mort dans un accident de la route. » Un accident survenu sur une route de Pologne, alors que Scirea, devenu entraîneur adjoint de la Juve depuis un an, était venu superviser le prochain adversaire de la Vieille Dame en Coupe UEFA. La nouvelle provoque un incroyable émoi dans toute l’Italie, et pas seulement chez les supporters de la Juve. Car Scirea était l’un de ces joueurs, rares, que les tifosi des équipes adverses respectaient. Défenseur de la Juve des années 70-80, il a probablement composé, aux côtés de Gentile et Cabrini, la meilleure ligne défensive de l’histoire du foot italien. Ces trois-là étaient le bon, la brute et le truand. Scirea était le bon. 552 matchs disputés avec la Juventus, aucun carton rouge. Aucun mot de travers.
À la Juve, il a lié une relation très forte avec son gardien, Dino Zoff. Ensemble, ils soulèvent la Coupe du monde en Espagne, en 1982. Et pendant que toute l’équipe fait la fête pendant toute la nuit, eux deux célèbrent la victoire à leur manière. « Nous avons passé la nuit dans notre chambre. Un dîner frugal, une bouteille de vin, le silence. Un choix qui nous ressemblait » , raconta Zoff. Scirea était comme ça. Simple dans la vie, juste sur le terrain. Avec la Juventus, il a tout gagné. Sept titres de champion, deux Coupe d’Italie, et le trio magique C1, C2, C3. Seize années de dévotion à la cause turinoise (merci à Luciano Moggi de l’avoir repéré à l’Atalanta), et un rôle de libéro profondément révolutionné. Peut-être parce que, petit, il rêvait de porter le 10 de Gianni Rivera, et qu’il a souhaité, à sa manière, apporter de la technique, de la grâce et de l’élégance à un poste qui, jusqu’alors, était plutôt réservé aux joueurs rugueux et rentre-dedans. EM
#4 - Gianluigi Buffon
De Giampiero Boniperti à Antonio Conte en passant par Didier Deschamps, tous les grands champions qui ont fait l’histoire de la Juventus ont dû se résoudre à accepter le passage du temps. Tous, sauf Gigi. En 2001, la Juve déboursait 53 millions d’euros – c’est encore aujourd’hui le transfert le plus onéreux de l’histoire pour un gardien – pour acquérir l’un des, si ce n’est le meilleur portier du monde. À l’époque, Buffon est déjà titulaire dans les bois de la Nazionale, le gardien du temple de la Juve et l’homme des parades impossibles. Comme lorsqu’il détourne cette tête piquée de Pippo Inzaghi en finale de C1, qui se voyait pourtant déjà célébrer son but comme un dératé.
C’était il y a quatorze ans. Entre-temps, la Serie A a perdu des champions de la trempe de Vieri, Chevtchenko, Trezeguet, Rui Costa, Paolo Maldini, Javier Zanetti, Nesta et tant d’autres. Même Alessandro Del Piero a, depuis, raccroché les crampons. Pourtant, pour Gigi, rien n’a changé. Il continue de fraterniser sur le pré avec les attaquants dont il vient de sortir les frappes, en leur tapotant amicalement le cuir chevelu. De rester classe, avec les tifosi, les journalistes et les adversaires, dans la victoire comme dans la défaite. De garder les bois de la Squadra Azzurra, avec laquelle il devrait disputer le Mondial 2018. Mais surtout ceux de la Vieille Dame, qu’il a suivie dans les bas fonds de la Serie B, avant de retrouver avec elle les sommets du football transalpin. Si bien qu’avec la Juve, Gigi n’a plus qu’un seul Everest à conquérir : la Ligue des champions. Un trophée qu’il pourra ajouter à son palmarès, si la Vieille Dame l’emporte face au Real Madrid le 3 juin prochain. Donnant ainsi encore un peu plus d’épaisseur à sa légende. AC
Par Adrien Candau et Éric Maggiori