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Leonardo DiMonaco, le revenant
Les rôles principaux ne vont pas très bien à Leonardo Jardim. Pourtant, c’est bien pour sa prestation dans Le Revenant de la Principauté que le Portugais pourrait ramasser sa première récompense majeure. Un drôle de twist quelques mois après être passé tout près d’un destin à la Titanic. On rembobine.
« Le football est une philosophie. Ce que le philosophe Manuel Sergio veut dire quand il dit que « celui qui ne s’intéresse qu’au football ne comprend rien au football », c’est que tout va très vite, tout est en mouvement. Celui qui pense tout savoir du football peut très rapidement ne plus être dans le coup. Un vrai passionné de football n’a pas de certitudes. » S’il a préféré déclarer ces propos à So Foot, 132e du nom, Monsieur Jardim aurait très bien pu griffonner ce speech en guise de discours de remerciement aux Oscars. Car Leonardo DiMonaco est déjà nommé dans la catégorie du meilleur acteur pour Le Revenant. Non, le Portugais ne s’est pas battu avec un ours géant, en revanche, après avoir failli y passer au printemps, il revient en automne pour mettre des tartes à tout le monde. Arrêtez-le si vous pouvez.
La tête pleine, la voie libre
Pour comprendre le vrai coup de force du revenant Jardim, il faut rembobiner. Le pitch est simple, le film catastrophe. C’est le mois de mai à Monaco, le soleil est là, les verres de rosé sont de sortie et le seul bruit qui dérange les jouisseurs sort des moteurs de Lewis Hamilton et de ses copains qui s’amusent dans les rues de Monte-Carlo. Derrière cette ambiance de réception façon Gatsby le magnifique, le navire principal de la Principauté, l’AS Monaco, tangue sévèrement. À bord du Titanic monégasque, Leonardo Jardim est moins gentleman que Jack Dawson et s’accroche au bout de bois qui flotte pour ne pas se noyer. Agacé par l’étiquette collée à son club devenu besogneux et poussif dans le jeu, le Gang of Moscou réfléchit à couper la tête du Portugais. Faute de mieux, il renouvelle sa confiance à Leonardo DiMonaco, qui hérite d’une mission à la Shutter Island : partir à la recherche du beau jeu, qui a mystérieusement disparu sur le Rocher. Conforté dans sa position, Jardim se lance donc dans la mission Revenant, bien aidé par ses producteurs qui lui libèrent la voie en mettant fin aux services de Luis Campos et de Claude Makelele. Jardim est enfin le vrai patron du sportif. Ou presque. Du genre à être clairs dans les messages qu’ils délivrent, les dirigeants russes, plombés par le poncif « à Monaco ça joue pas, on se fait chier » , invitent leur coach à un peu de changement. Façon Inception, ils plantent l’idée d’un football offensif dans le subconscient de Leonardo. Du 4-4-2 pendant l’été pour profiter des retours de Falcao et de Germain, l’association Lemar-Bernardo Silva pas assez vue la saison passée et la volonté de jouer vers l’avant. Avantage pour Jardim : le président de l’AS Monaco joint la volonté aux actes. Il veut un bolide offensif et s’en donne les moyens en achetant deux fusées en guise de latéraux – Sidibé et Mendy –, en réalisant un mercato de qualité et surtout en arrêtant de vendre pour vendre, notamment l’excellent Fabinho, courtisé de toutes parts en Angleterre où l’on aurait bien versé une coquette somme pour s’attacher les services du Brésilien.
Pas d’ego, mais des idées
Une nouvelle fois, le projet monégasque semble évoluer, mais contrairement à l’après-James Rodríguez, il s’agit d’une éclaircie. De toute façon, Jardim s’en moque. Par absence d’ego, mais sûrement pas par manque d’ambition. Pour lui, « l’entraîneur ne peut pas aller à l’encontre de la ligne directrice fixée par le président. Un entraîneur doit être imprégné du projet sportif du club où il signe. Une fois qu’il a accepté, il ne peut pas dire « Tiens, finalement il faut changer ceci, cela. » » En attendant, il peut continuer à se faire plaisir avec un effectif jeune et qui veut encore apprendre : « Je tire une énorme satisfaction de voir l’évolution des joueurs que je coache. Qui va se souvenir de moi ? Pas les journalistes, mais les joueurs que j’ai aidé à progresser. D’ailleurs, j’aime bien demander à mes anciens joueurs un maillot de leur nouvelle équipe. » Et si le rocher paradisiaque n’est pas aussi vicieux que l’île de La Plage, Leonardo DiMonaco pourrait bien avoir d’anciens joueurs qui lui demandent son polo à la fin de la saison.
Par Swann Borsellino