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Lens-Rennes : au Nord, le rebond de Wesley Saïd
De retour de blessure cette semaine contre Lille, Wesley Saïd a puni le Stade rennais, son club formateur, en inscrivant l'unique but d'une rencontre remportée par son RC Lens. Celui qui était présenté comme un futur crack dans ses jeunes années à Rennes a désormais retrouvé des couleurs dans le Nord après une saison blanche et une aventure sans saveur à Toulouse. Une renaissance qu'il doit en partie à une vieille connaissance : Franck Haise.
En voyant Wesley Saïd taper dans la main de Gaël Kakuta à la 70e minute de la rencontre entre Lens et Rennes, la suite de l’histoire était facile à deviner. Ceux qui avaient jeté un coup d’œil aux statistiques dévoilées sur le site Medium cette semaine n’ont en tout cas eu aucun mal à l’imaginer. Depuis 2001, le Stade rennais est l’équipe la plus crucifiée par ses anciens joueurs en Ligue 1 (55 buts, soit un pion signé d’un visage connu tous les 15 à 16 matchs en moyenne). Les Rouge et Noir peuvent ajouter une ligne de plus à cette longue et pénible série, Saïd ayant décidé de jouer un mauvais tour à son club formateur en reprenant sans contrôle un bon centre de Jonathan Clauss au premier poteau pour tromper le jeune Doğan Alemdar et offrir un succès précieux au Racing. « Ça ne me fait pas grand-chose de marquer face à Rennes, a-t-il souri en conférence de presse.Je vois Jo Clauss déborder sur le côté, je connais plus ou moins ses centres et je sais qu’il adore centrer fort au premier poteau. Je patiente un peu et je passe devant le défenseur. Aujourd’hui, ça m’a réussi, c’est super. Je voulais juste gagner, c’est moi qui ai marqué, tant mieux pour nous. » Tant mieux pour lui, aussi.
Papa Haise
À Rennes, Wesley Saïd n’avait pas attendu de débouler dans la cour des grands pour se faire un nom. Au carrefour des années 2000 et 2010, son nom se murmurait déjà sur les bords de la Vilaine, où le gamin prometteur a répété ses gammes dès l’âge de 11 ans. Quand il n’était pas en train de bosser avec le regretté Didier Le Bras, éducateur rennais reconnu pour son savoir-faire et décédé en 2018, l’attaquant enchaînait les entraînements à la Piverdière. Ceux qui ont croisé le bonhomme pendant sa jeunesse étaient tous unanimes : ce gars-là n’était pas comme les autres, il était promis à un avenir radieux. Des compliments à gogo qui ne l’ont peut-être pas aidé dans sa construction, même s’il a logiquement signé son premier contrat professionnel là-bas. « Celui-là, s’il ne passe pas, j’ai demandé à être viré tout de suite », avait même clamé Patrick Rampillon, alors directeur du centre de formation, dans France Football. Saïd n’a pas seulement posé son nom sur des papiers, il est également apparu près de 40 fois sous le maillot rennais (six buts) sous les ordres de Philippe Montanier et Christian Gourcuff. Aucun de ces deux techniciens n’a pourtant réussi à le marquer davantage qu’un entraîneur côtoyé dans les équipes de jeunes en Bretagne : Franck Haise.
Aujourd’hui à Lens, le coach de 50 ans a été déterminant dans la formation de Saïd comme dans son rebond. Après quatre années passées entre Dijon et Toulouse, où il était devenu le transfert le plus cher de l’histoire du club (huit millions d’euros) après avoir fait grève pour rejoindre le TFC à l’été 2019, Haise est sans doute l’un des rares entraîneurs à avoir coché son nom lors de la dernière intersaison. À ce moment-là, Saïd sort d’une saison blanche chez les Violets, qui l’ont libéré de son contrat malgré son retour d’une rupture du ligament croisé antérieur du genou droit un an plus tôt. « Avec Franck, on s’est connus quand j’avais douze ou treize ans. Il a été l’un des premiers entraîneurs à me surclasser, à me faire confiance et à me mettre titulaire face à des plus grands que moi, racontait Saïd après son doublé contre Metz en octobre dernier. On a toujours eu cette bonne entente. Il est celui qui me connaît le mieux dans ma carrière, et ça me fait plaisir de le retrouver. On évolue bien tous les deux. » Une confiance réciproque, à en croire les mots d’Haise en réponse à son joueur : « Je le connais depuis si longtemps, je savais ce qu’il pouvait apporter à l’équipe. Il est capable de mettre d’excellents derniers ballons et j’aime quand il est dans la surface. »
Joker de luxe
Dans un secteur concurrentiel à Lens (Kalimuendo, Ganago, Sotoca, Jean, Pereira Da Costa, etc.), Saïd trouve peu à peu sa place en même temps qu’il essaie de se retaper physiquement. Gêné aux adducteurs en début de saison, l’attaquant de 26 ans a effectué cette semaine son retour d’une blessure aux ischio-jambiers après un mois et demi d’absence. Entre-temps, l’ancien Rennais avait climatisé le Vélodrome et rendu quelques services à sa nouvelle crémerie. Dans un rôle de joker qu’il accepte : « Je suis au service de l’équipe, forcément je n’ai pas envie d’être tout le temps le remplaçant, ce n’est pas mon but, mais à chaque fois que j’entrerai, je me donnerai à fond. C’est le collectif qui prime, ça ne me dérange pas. Ces cinq buts me font du bien pour la confiance. » Saïd n’est plus pressé, il dit lui-même avoir pris « du recul sur le foot » pour « ne pas se prendre la tête ». Franck Haise, lui, n’est pas encore totalement comblé, mais déjà très satisfait : « Il savait qu’après une longue blessure, c’est une mécanique de précision. J’aurais aimé l’avoir plus et lui aussi. Mais à chaque fois qu’il est entré, on sent ce qu’il peut apporter. Je lui avait dit qu’après cette si longue absence, ce serait un super joker pour nous, il est à fond dans le projet et la vie du groupe. » Pour les deux complices, le pari est déjà (un peu) réussi.
Par Clément Gavard
Propos de Franck Haise et Wesley Saïd recueillis par FC, sauf mentions