- Ligue 2 – 31e journée – Sedan/Lens
Lens morne plaine
Depuis le début de saison, le RC Lens donne l’impression qu’on a là affaire à une équipe sans repère ni régularité et encore moins de génie. Le constat est implacable : la grande favorite à l’accession de l’été dernier n’est aujourd’hui qu’une formation moyenne qui est à sa place dans le ventre mou de la Ligue 2.
« Notre passion a des limites » . Les supporters lensois en ont gros, mais alors vraiment gros sur la patate. On les comprend. Sans déconner, quand vous avez supporté un club champion de France, quand vous avez connu la joie de gagner une coupe nationale en terre francilienne, quand vous avez accueilli – et battu parfois – Arsenal, Milan, le Bayern ou l’Atletico, quand vous avez vénéré le Tony Vairelles de la grande époque, quand vous avez admiré la classe de Šmicer ou de Foé, quand vous avez vu Cap’tain Siko se vider les tripes pour le blason sang et or, vous pensez que c’est fun de flirter quasi toute une saison avec la relégation en National ? De vous fader des matchs moisis de bas de tableau de L2 ? D’assister à d’humiliantes défaites dans un Bollaert qui pleure son passé ? De considérer comme une perf le fait d’arracher un point dans le chaudron de Francis Le Basser à Laval ? Non, bien sûr que non c’est pas fun. C’est la merde oui, voilà ce que c’est. La déprime totale.
Un effectif de bric et de troc
Et vous savez ce qui est le pire dans l’histoire pour les supporters lensois ? C’est d’avoir le sentiment que dans un avenir proche, il n’y aura pas de miracle à attendre. C’est d’avoir le sentiment de devoir supporter une équipe moyenne, qui obtient des résultats moyens, conformes à son niveau. Moyen. C’est de devoir admettre le fait qu’après avoir ripaillé avec l’élite du foot français et européen chaque saison pendant des années, il va désormais falloir mastiquer sans moufter son ‘dwich-pâté dans l’anonymat de la L2. Pour une saison encore et peut-être même bien plus.
« Notre passion a des limites » , donc. Une banderole dressée à la face des joueurs lors du dernier match à domicile le 26 mars par un public lassé d’assister à cette si morne saison. Il faut reconnaître que pas une seule fois depuis l’été dernier il n’y a eu le moindre frisson à attendre. Jamais l’équipe de papa Martel n’a figuré au-delà de la neuvième place de L2. Pour un club relégué, doté du plus gros budget du championnat, et qui comptait assumer sans tortiller un statut de favori à la remontée immédiate, ça la fout mal. Qu’est-ce qui s’est passé au juste pour en arriver là ? Rien de bien justement. Dès le départ en fait, ça sentait le sapin. Il a d’abord fallu faire partir les plus gros salaires dès la descente actée, histoire d’alléger des finances instables. Puis carrément faire partir le plus grand espoir de la maison, Raphaël Varane, alors qu’il avait à peine sa majorité. Ensuite tenter des « coups » dans le recrutement, toujours pour les mêmes raisons. Les coups en question se nomment Ludovic Baal, Ali Mathlouthi, Julien Toudic, Pierre Ducasse, Pascal Bérenguer, Alexandre Cuvilier… Du pas cher ou du prêté, potentiellement compétitif et apte à encadrer les jeunes pousses du centre de formation : Geoffrey Kondogbia, David Pollet, Samba Sow ou Thorgan Hazard. Dans l’idée le plan est plutôt bien gaulé, surtout quand on ajoute à la tête du projet Jean-Louis Garcia, un entraîneur qui connaît sa Ligue 2 par cœur.
30 journées et toujours pas d’équipe-type
Dans les faits par contre, ça se grippe dès le départ. Aucune équipe-type ne se dégage, les résultats sont en dents de scie et pas une individualité ne parvient à se démarquer. Celui qui présente à l’heure actuelle les meilleures stats se nomme David Pollet, 10 buts au compteur, un bon gars élevé à la niaque, mais clairement ça ne vend pas du rêve. Le pire, c’est encore la défense, l’une des pires du championnat. Yahia et Queudrue sont incontestés dans l’axe, mais franchement pas incontestables. Sur les ailes, Demont fait ses 34 ans et Berdgich dépanne, tandis que Baal fait de même à la récupération. Aurier apportait de la concurrence, mais il est parti à Toulouse cet hiver. Même au poste de gardien, il n’y a pas de hiérarchie qui se dessine : Kasraoui, fébrile en début de saison, vient de récupérer sa place de titulaire, tandis que Fabre, non moins fébrile, est retourné sur le banc.
« Notre passion a des limites » , on y revient une dernière fois. Cette banderole, accompagnée d’une grève de chants des supporters, a peut-être donné le petit regain de fierté aux joueurs lensois pour battre leurs camarades de galère, Nantes, autre ex-grand club nostalgique de son glorieux passé, sur le plus petit des scores, 1-0, lors du dernier match disputé à Bollaert. Un vieux but de raccroc marqué par Ben Saada sur une énorme boulette du gardien canari. C’est moche mais ça fait victoire. Avec le nul décroché face à Sedan dans les Ardennes vendredi dernier, les Sang et Or ont désormais un petit matelas de cinq points sur la zone rouge. En comptant celui de ce soir face au Mans, il reste 8 matchs à disputer pour le RCL, autant d’opportunités d’arracher de nouveaux points pour rester d’ici la fin de saison planqué au chaud dans le gras du bide de la L2. En attendant des jours meilleurs, si possible.
Par Régis Delanoë