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Lens, cela aurait pu être tellement bien
Plombé sportivement, bientôt enterré administrativement sauf miracle financier improbable, le RC Lens se dirige vers les heures les plus sombres de son histoire. Bien loin des espoirs suscités en 2013 par l'arrivée d'Hafiz Mammadov.
Le week-end passé, les supporters du Racing Club de Lens ont vécu un sale moment. Un de plus dans une saison qui a oscillé entre mascarade pathétique et lente agonie. Mascarade à cause d’un actionnaire majoritaire, Hafiz Mammadov, hier sauveur du club – quand il végétait en Ligue 2 – et aujourd’hui son cancer. Sportivement à cause d’une saison passée à flirter avec la zone rouge avant de complètement s’écrouler depuis début 2015. Même pour ceux qui voulaient les voir debout à la fin, comme dans une bonne comédie romantique, l’épilogue était depuis longtemps gravé dans le marbre : un stade Bollaert indisponible pour cause de travaux pré-Euro 2016, un imbroglio autour de la relégation administrive finalement annulée, et un entraîneur qui boycotte la préparation pour protester contre l’opacité ambiante et un recrutement gelé…
« La Ligue des champions ? Oui. La gagner ? Pourquoi pas. » Hafiz Mammadov, mythomane
Trop d’éléments étaient contre ce Racing, qui aura au moins eu le mérite de maintenir le suspense sportif quasiment jusqu’au bout. Aujourd’hui acquise, la descente en Ligue 2 apparaît comme le moindre mal, l’audience de Gervais Martel devant la DNCG le 26 mai prochain pouvant aboutir sur un dépôt de bilan et une perte du statut professionnel. Un véritable cauchermar aux relents de gâchis quand on repense aux espoirs qu’avait suscités l’arrivée d’Hafiz Mammedov au début de la saison 2013-2014. Quand ce dernier débarque dans le capital du club nordiste, la presse hexagonale évoque un milliardaire aux affaires variées – matières premières, transport, BTP, tourisme – et propriétaire de la marque « Azerbaïdjan, Land of Fire » qui s’affiche sur le maillot de l’Atlético Madrid. En clair, Hafiz Mammedov est une success story nantie de connexions haut placées dans l’État azéri, un homme qui assume à lui seul le soft power de son pays d’origine. De quoi nager dans les eaux du PSG ou de l’AS Monaco ? Le businessman n’en doute pas, avec lui le Racing pourra un jour recruter des pointures comme Zlatan Ibrahimović et postuler pour une victoire en Ligue des champions. « Nous viserons le plus haut possible. La Ligue des champions ? Oui. La gagner ? Pourquoi pas. »
Jean-Michel Aulas met son grain de sel
Ces affirmations datent de l’été 2013. Moins de deux ans plus tard, elles sonnent au mieux comme une mauvaise blague. Pas forcément de très bon goût quand on considère ce que représente Lens pour le football français : un public capable de chiffrer 40 000 âmes à la maison – comprenez Bollaert -, de remplir le Stade de France pour ses plus belles affiches ou d’ambiancer les mi-temps avec Les Corons. En clair, Lens c’est le Liverpool français, avec un palmarès bien moins fourni, mais une passion qui a valu aux supporters artésiens le titre honorifique de meilleur public de France. Et un club capable, un peu par accident, d’atteindre une demi-finale de Coupe UEFA en 2000, de décrocher le titre en 1998 sous l’ovation du stade de l’Abbé-Deschamps à Auxerre, ou encore de penser aux intérêts supérieurs du football français et de laisser – grâce à une crise de résultats dans le money time – le Lyon de Jean-Michel Aulas remporter son premier titre de champion en 2002. Un JMA aujourd’hui peu reconnaissant puisqu’il demande clairement l’annulation des résultats du Racing en Ligue 1 pour aider son OL à remporter le championnat.
Par Nicolas Jucha