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Lemoine, Vert sombre
Deuxième joueur de champ le plus utilisé par l’ASSE depuis 2008, Fabien Lemoine ne possède pas une grosse cote médiatique. Pourtant, le milieu de terrain déçoit rarement. Et Saint-Étienne a fait une belle affaire en le conservant, malgré ses envies de départ.
Cinq ans. Cela fait déjà cinq longues années qu’il arpente les vestiaires de Geoffroy-Guichard et se bat sur la pelouse pour respecter la chaleur du Chaudron. Franchement, hormis les vrais supporters du club, qui se souvient de l’arrivée de Fabien Lemoine à Saint-Étienne ? Qui serait capable de donner quelques statistiques sur le milieu de terrain, de juger son importance dans l’équipe ces dernières saisons ? Pas grand monde. C’est que le bonhomme est plutôt du genre discret. Loin des lumières qui ont toutefois réussi à lui blanchir les cheveux beaucoup trop tôt, loin des projecteurs qu’il n’a jamais convoités, le joueur de vingt-neuf ans n’attire pas les foules. Pour preuve : lorsqu’on parle de Fabien Lemoine, on pense directement à son ablation du rein, en 2010, qui lui a fait perdre un an de carrière. Voire à son retour à la compétition avec Rennes contre Valenciennes, « le moment fort de (sa) carrière » . C’est tout.
Alors, lorsqu’il lâche des petites bombes, tout le monde a l’air de s’en foutre. Ou presque. En fin de saison dernière, Lemoine annonce entre les lignes sa grosse envie de retrouver Rennes dans les colonnes du Progrès: « Ça a failli se faire il y a deux ans. Je ne cache pas que ça me ferait plaisir de retourner là-bas. » Aucune offre ne faisant suite à ses propos, le natif de Fougères part en vacances, puis reprend tranquillement avec son ASSE. Avec à la clé une qualification maîtrisée en Ligue Europa aux dépens de l’AEK Athènes et du Beitar Jérusalem. Quatre titularisations sur les quatre confrontations, de bonnes prestations et un but importantissime face à l’équipe israélienne pour couronner le tout : 2016-17 commence bien pour lui.
Stoppé à la frontière bretonne
Oui mais voilà, dans l’esprit des fans comme de son entraîneur Christophe Galtier, et en dépit de toutes les statistiques, Fabien Lemoine n’est pas un indispensable dans le groupe, pas plus qu’un titulaire indiscutable sur le terrain. Dans les dernières heures du mercato, le coach français, pas franchement satisfait de son effectif, dégaine et recrute coup sur coup Jordan Veretout et Henri Saivet, deux milieux de terrain. Ajoutez à ça ceux qui étaient déjà là, à savoir Ole Kristian Selnæs, Vincent Pajot, Benjamin Corgnet ou encore Jérémy Clément, et vous remarquez que la concurrence est rude dans l’entrejeu stéphanois. La conséquence ? Le numéro 18 de Sainté prend peur pour son temps de jeu et rêve encore de Bretagne. Ça tombe bien : Lorient lui fait les yeux doux.
Forcément, Lemoine ne cogite pas et fait part de sa situation à ses dirigeants. Sauf que la réponse de Galtier est un énorme non. Niet. Sportivement impossible. Pas négociable. « C’est difficile de dire non quand on a une proposition et qu’un joueur veut partir. Mais là, la proposition est tombée à six ou sept heures de la fin du mercato, s’est justifié le technicien une semaine après la clôture du marché des transferts. J’ai compris la position de Fabien, mais lui aussi a compris la mienne. Le timing n’était pas bon. C’est un joueur cadre. Cela fait cinq ans que je travaille avec lui. Je le connais parfaitement. J’aime travailler avec lui. La proposition de Lorient est tombée trop tard. On ne pouvait pas le remplacer. »
Entre Zlatan et Perrin
Pas du genre à faire des vagues ou à apprécier l’art du bras de fer, le joueur se tait et se résout au choix de la hiérarchie. Non sans un sourire franc. Et pour cause : pour une fois, Lemoine est publiquement reconnu à sa juste valeur. Celle d’un mec capable de figurer dans l’équipe type de Ligue 1 de L’Équipeen 2013-2014, étant le 5e joueur de champ le mieux noté du championnat, juste derrière Zlatan Ibrahimović, Marco Verratti ou Thiago Motta. Celle d’un type qui représente le deuxième joueur de champ le plus utilisé de son club depuis 2008 (alors qu’il est arrivé en 2011) juste derrière le capitaine emblématique Loïc Perrin.
Celle d’un gars pas flamboyant, mais souvent présent quand on fait appel à lui, avec un état d’esprit irréprochable. Celle d’un bon footballeur de L1 dont on ne parle jamais, mais qui s’en tape. Et qui n’a, à court terme, qu’un désir, celui de se faire plaisir : « Je suis resté ici et je ne suis pas du tout déçu de cette issue. Je suis même extrêmement motivé. J’ai envie de jouer le plus de matchs possibles. Je vais donner le maximum pour qu’on remplisse les objectifs. Il n’y a pas de regrets, pas de frustration particulière. Je n’étais pas du tout satisfait de ce que j’avais pu faire la saison dernière. Je suis revenu à bloc. Je pense que je suis mieux que l’an passé, c’est une certitude. Je suis en train de me retrouver.(…)Dans le groupe, aussi, je suis un mec épanoui. » Et pour ça, pas besoin de se muer en Vert luisant.
Par Florian Cadu