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L’embrouille à Totò
Mis à l’écart pour le dernier match de l’Udinese, Antonio Di Natale, buteur star du club frioulan, s’est brouillé avec son coach Guidolin. Un cas sans précédent dans le Frioul, et révélateur d’un début de saison plus que difficile.
Dimanche 30 septembre. L’Udinese accueille le Genoa. Au terme d’un match assez fade, les deux équipes se séparent sur un score nul et vierge. Dans un sens, logique. Car si les Frioulans ont dominé, ils ont péché dans le dernier geste. Un truc inhabituel, lorsque Toto Di Natale est sur la pelouse. Seulement voilà, ce dimanche, Totò n’a pas joué. Pas une minute. Il n’était d’ailleurs même pas convoqué pour la rencontre. La raison ? Son coach Francesco Guidolin a décidé de le laisser en tribunes. Pas parce que le serial buteur italien était fatigué, mais parce que les deux hommes se sont embrouillés l’avant-veille. Si on essaye de chercher un précédent entre les deux loustics, on n’en trouvera pas. Alors ce « litige » serait avant tout le signe d’un malaise. À la base sportif, c’est évident : l’Udinese, qui truste les premières places de Serie A depuis deux ans, galère actuellement en bas de tableau. Mais pour que la tension s’étende aux deux hommes forts du groupe, et les dresse l’un contre l’autre… c’est qu’il y a franchement un problème.
Le malaise sportif avant tout
En fait, les difficultés que traîne l’Udinese depuis quelques semaines ont une date de départ : le 28 août dernier. Soit le jour du match retour de barrages de Ligue des champions que les Bianconeri disputent face à Braga. Après avoir bien négocié la première manche au Portugal en obtenant le nul (1-1), les Italiens sont logiquement favoris. Du moins en bonne posture pour aborder le match retour. Ils seront pourtant tenus en échec (1-1), puis éliminés de la pire des manières, aux tirs au but (5-4). La faute à Maicosuel, auteur d’une panenka ridicule. Toujours est-il qu’à partir de ce moment-là, les Frioulans traverseront une période de doute : une claque face à la Juventus (1-4), des nuls décevants contre Sienne (2-2), le Torino (0-0) ou donc, le Genoa (0-0). Ce que l’on pourrait appeler un « sursaut d’orgueil » avec une victoire face au Milan AC (2-1), est un peu atténué par le fait que les Milanais connaissent eux aussi une crise identitaire. Au bout de six journées de championnat, l’Udinese n’a donc récolté que six points. Au tableau d’affichage, le club pointe à une énigmatique 15e place. Étonnant ? Pas vraiment. Dans la politique du club, qui consiste à vendre chaque année ses meilleurs espoirs pour en révéler d’autres, il y a parfois des accrocs. Ainsi, durant le dernier mercato, Isla et Asamoah ont rallié la Juventus. Mais jusqu’à présent, aucune des nouvelles recrues, essentiellement brésiliennes (Allan, Willians, Maicosuel), ne s’est acclimatée au Calcio. Conséquence : une certaine baisse de régime. Ce qui arrive de temps en temps, à Udine : 2006/2007 avec une 10e place, ou en 2009/2010 avec une 15e place. Dans une période creuse, des tensions peuvent naturellement apparaître. Entre les petits nouveaux, les fortes têtes. Mais en aucun cas avec la star de l’effectif, âgée de 35 ans. Du moins, pas à Udine, quoi.
Alors, un problème Totò ?
Pourtant, c’est bien ce qu’il s’est produit le 28 septembre. Le litige entre Di Natale et Guidolin a deux versions. La première : ils se sont engueulés au début de la séance d’entraînement devant tout le monde. La seconde : ils se sont pris le bec dans les vestiaires en tête-à-tête. Dans les deux cas, il y avait un désaccord. Et Guidolin a décidé de sanctionner son attaquant. Le lendemain, en conférence de presse, l’ancien coach de Monaco tente cependant de minimiser l’incident : « Il y a eu un petit accrochage avec Di Natale, comme cela peut arriver en famille. Nous en avons déjà reparlé : notre relation est solide, positive. Nous avons beaucoup de matchs en ce moment, nous sommes un peu nerveux… » Suite à la rencontre face au Genoa, le technicien en révèle un peu plus aux micros de Sky : « Notre dispute ne me concernait pas directement. Il y a des règles dans le vestiaire et elles doivent être respectées. » Si elle ne concernait pas Guidolin, alors qui ? Selon un journaliste du Messaggero Veneto en effet, le buteur se serait à la base embrouillé avec deux préparateurs physiques. Fatigué, Totò aurait souhaité interrompre la séance. Devant le refus des deux assistants, il les aurait envoyés chier. Ces derniers seraient alors allés prévenir le coach, d’où une vive discussion entre les deux intéressés. Frustration, fatigue, tension… Savant mélange qui peut contrarier le sanguin napolitain. Parce que niveau caractère, s’il s’est calmé depuis son arrivée dans le Frioul, Totò a quand même deux antécédents d’engueulades : avec son coach Cosmi en 2006, à la suite d’une rencontre de Ligue des Champions face au Werder, et une autre (classée top secret) durant l’été 2007, où son mauvais comportement lui avait valu une exclusion d’une dizaine de jours. Depuis, cela dit, c’était le calme plat. Et tout le monde admirait, logiquement, le comportement exemplaire du Napolitain.
0,57 but par match sans Di Natale
La seule certitude dans cette histoire, c’est que sans Di Natale, l’Udinese a du mal à scorer. La preuve en chiffres : sur les 120 derniers matchs du club, Di Natale n’a pas été titulaire à 14 reprises. Sur ces 14 rencontres, les Bianconeri ont gagné un seul petit match, fait cinq nuls et perdu huit fois. Le tout pour huit buts marqués. Une moyenne de 0,57 but par match, contre 1,59 quand Totò est aligné d’entrée. Pas pour rien que l’Udinese n’a pas marqué lors de ses deux dernières journées de Serie A. C’est parce que l’homme providentiel, le meilleur buteur de l’histoire du club (137 buts, trois saisons consécutives à plus de 20 réalisations), n’était pas là. Réintégré dans le groupe pro ce lundi, Totò sera en tout cas présent face à Liverpool. On ne sait pas s’il fera la gueule, ni si ses rapports avec coéquipiers, coach ou dirigeants se sont dégradés. En revanche, à tous les coups, les Frioulans marqueront un but.
Par Alexandre Pauwels