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Leiria fait trembler le foot portugais
A trois journées de la fin, 16 joueurs de l'effectif de l'Uniao Leiria (dernier de Liga Sagres) ont décidé de résilier en bloc leur contrat pour salaires impayés. Et si en fait, le football portugais ne se portait pas aussi bien que cela?
Avec un quart de finaliste en Ligue des Champions cette saison, quatre demi-finalistes en Ligue Europa sur deux saisons dont un lauréat en 2011 ainsi qu’une idéologie de jeu un tantinet sud-américaine, le CV du championnat portugais a fière allure aux yeux de l’Europe. Sur le plan sportif en tout cas, le modèle d’un petit pays émergeant dans le Top 5 continental, est devenu un exemple à suivre pour beaucoup. Mais la Liga Sagres, comme tout le Portugal, est rattrapé par la réalité économique du pays.
Révolution des oeillets
La bombe à retardement du championnat portos menaçait d’éclater depuis le début du mois d’avril. L’Uniao Leiria, 16è et dernière au classement, a très probablement signé son arrêt de mort vendredi dernier, lorsque 16 joueurs de l’effectif du club résilient en masse le contrat qui les unissait avec le club, las d’attendre de recevoir un salaire qui n’arrive plus depuis quatre mois. Comme Rome, la décision ne s’est pas faite en un jour. C’est le fruit d’une longue collaboration des intéressés avec le patron du syndicat des joueurs, Joaquim Evangelista, qui avait débouché dans un premier temps sur plusieurs ultimatums des 16 frondeurs à l’Uniao de Leiria. La vérité, c’est que l’ancienne écurie de José Mourinho a fini par être pourrie par la corruption qui plane autour d’elle et de son récent ex-président, Joao Bartolomeu. L’homme d’affaires, 25 ans à la tête du club, est une sorte de Francesco Schettino en puissance qui s’est barré de son navire en train de couler sous une dette de prêt de 6,5 millions d’euros. Le big boss de la mafia de Fatima, soupçonné de détournements de fonds sur certains transferts a même osé balancer une pique aux joueurs qui ne « pensent qu’à l’argent » et partager son « ras le bol de supporter leur caprices pendant presque 30 ans« . Comble de l’histoire, Bartolomeu veut saborder Leiria en militant pour la perte de son statut de club professionnel et remet en cause la légalité de la résiliation des contrats de ses anciens joueurs.
A 8 contre Feirense
Le duel annoncé entre les deux derniers du championnat n’a donc pas eu lieu dimanche, ou si peu. Les dirigeants de Leiria se sont arrangés pour que 8 joueurs soient présents au début du match face à Feirense. Car en cas de victoire sur tapis vert pour cause d’effectif réduit, la ligue portugaise pourrait exaucer le vœu de Bartolomeu et rétrograder le club en division amateur. Jamais, dans l’histoire moderne du championnat lusitanien, une équipe n’a déclaré forfait avant une rencontre. Si Leiria a évité une grande première, elle n’a pas pu esquiver la raclée (défaite 4-0 contre Feirense). Et si le cirque de Bartolomeu arrive à garder ses portes ouvertes pour les deux derniers patchs de la saison, son futur est fortement compromis. Il y a peu de temps, l’Estrela de Amadora, pour quasiment un an de salaires impayés à ses joueurs, a été déchu de son rang de professionnel, et Leiria risque le même sort. Ce n’est donc pas le premier cas de crise économique au sein d’un club portos, et sans doute pas le dernier. Le Vitoria de Setubal, et Guimaraes en Liga Sagres, ainsi que Belenenses à l’échelon inférieur se trouvent également dans une situation délicate. À Setubal, la colère des joueurs commence même à gronder…
Quid du passage à 18 équipes
Ce problème en cache un autre, celui du passage de 16 à 18 équipes, déjà validé il y a quelques mois, mais qui trouve très peu de supporters parmi les hauts dirigeants des instances footballistiques du Portugal. Pinto da Costa par exemple, se demande comment « certains clowns pensent qu’il est possible d’élargir la Ligue alors que les petits n’ont pas les moyens financiers d’évoluer dans l’élite« . A 18, les clubs moins huppés verraient en effet leurs revenus à la baisse ne serait-ce que parce qu’ils recevront moins d’argent des droits télévisés – dont la grande part est accaparée par les trois gros. Attaché à ce changement, le président de la ligue portugaise, Mario Figueiredo, envisage d’instaurer un fond d’aide aux équipes en grande difficulté financière ainsi que de diminuer le salaire minimum dans l’élite. La lutte risque cependant d’être longue, car les syndicats de joueurs refusent en bloc la deuxième proposition de Figueiredo. Si l’austérité commence à toucher le football aussi…
Par William Pereira