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Leicester, souviens-toi l’été dernier
Champions d’Angleterre pour la première fois de leur histoire en mai dernier, les Foxes de Claudio Ranieri s’apprêtent à vivre maintenant avec le mal de crâne des lendemains de fête. Et ce, malgré peu de départs et avec un mercato une nouvelle fois parfaitement maîtrisé.
Hier encore, c’était impensable. À plusieurs reprises, Riyad Mahrez, élu meilleur joueur du championnat d’Angleterre la saison passée, parlait même d’une « histoire impossible » . Tête pensante du plus beau braquage de l’histoire de la Premier League, Claudio Ranieri, lui, aimait le dire ainsi : « On sait de quoi on est capable, mais on ne sait pas quand et jusqu’à quand. » C’était aussi le sens de sa première causerie en arrivant en Angleterre l’été dernier. Une prise de parole où l’entraîneur italien avait alors appelé ses joueurs à « jouer pour vos coéquipiers. On est une petite équipe, donc on doit tous se battre avec notre cœur et notre âme. Je n’ai rien à faire du nom de l’adversaire. Tout ce que je vous demande, c’est de vous battre. S’ils sont meilleurs que nous, ok, félicitations. Mais ils devront nous prouver qu’ils le sont. » Alors, Ranieri a renversé des montagnes et a terminé sa première saison chez les Foxes aux côtés d’un Andrea Bocelli, maillot bleu sur le dos, face au silence émerveillé du King Power Stadium de Leicester. C’était il y a maintenant presque trois mois et l’Italien savait que le plus dur était à venir, qu’il faudrait se battre pour retenir un N’Golo Kanté, progressivement devenu international, un Riyad Mahrez ou un Jamie Vardy, qu’il faudrait réussir à maintenir un esprit unique affiché notamment lors de la soirée du titre dans le salon du buteur anglais et plus encore, comprendre, que la chance ne pourrait pas toujours être de son côté. Et l’été est passé mais Ranieri n’a pas vraiment changé. Au point de le dire clairement : « Oubliez tout ce que vous avez fait maintenant. J’en veux encore plus. J’ai faim, très faim. »
La pioche Mendy et le pari Musa
Voilà où en est aujourd’hui Leicester à l’heure d’affronter Manchester United à Wembley pour le Community Shield. L’été a été moins meurtrier que prévu – parmi les cadres, seul Kanté a pour le moment quitté les Foxes pour rejoindre Chelsea – et, selon les mots de José Mourinho, le groupe de Ranieri est peut-être même « meilleur » que la saison dernière. Pourquoi ? Tout simplement déjà car il a déjà l’expérience d’un titre, mais surtout parce que Leicester a une nouvelle fois recruté intelligemment durant la trêve. Ces choix avaient été la clé du succès et Ranieri le sait. Alors cet été, l’entraîneur italien a cherché à étoffer à son groupe avec de l’expérience (Ron-Robert Zieler) mais aussi des paris osés comme l’attaquant nigérian Ahmed Musa, arraché au CSKA Moscou contre un chèque de 19,5 millions d’euros et qui a impressionné en préparation, ou encore l’international polonais de 19 ans Bartosz Kapustka. L’autre mission de Claudio Ranieri était bien entendu de remplacer N’Golo Kanté, poumon indispensable à son milieu la saison dernière. C’est pour ça qu’il a été chercher Nampalys Mendy à Nice, un gamin qu’il avait révélé lors de son passage à Monaco et qui a affirmé à son arrivée en Angleterre être « ici pour Ranieri » .
Savoir si Mendy sera aussi influent que Kanté est impossible à prédire aujourd’hui mais le jeune cadre dynamique en a les capacités. Reste les questions après les premières interrogations posées par la préparation compliquée des Foxes, balayés notamment par le PSG (0-4) et le FC Barcelone (2-4). La première est d’ordre tactique et de savoir si Ranieri va accepter de bouger son imperméable 4-4-2 de la saison passée. En conférence de presse cette semaine, l’Italien a renfilé son costume de Tinkerman et, contre le Barça, son système a déjà montré ses limites. L’arrivée de Musa pose aussi cette question car son apport dans un 4-3-3 aux côtés de Mahrez et Vardy pourrait être supérieur si Mendy arrive à compenser la perte de Kanté aux côtés de Danny Drinkwater. L’idée est aussi de ne pas bloquer l’expression de l’artiste algérien qui résiste pour l’instant aux sirènes des plus grands clubs. Les prochaines semaines devraient apporter les premières réponses alors que Leicester devra au minimum disputer six matchs de Ligue des champions supplémentaires d’ici janvier.
« Le top six veut nous tuer »
Au-delà du sportif, la question est mentale. Si Ranieri assure que ses joueurs sont toujours aussi motivés, il sait aussi qu’ils seront maintenant attendus comme jamais. « Aujourd’hui, le top six veut nous tuer. C’est normal. On est le tenant du titre mais on reste encore des outsiders. » , expliquait-il cette semaine. C’est une approche logique et il faut se le dire, Leicester va souffrir cette saison. Car l’absence de blessures ne sera pas éternelle, car la pression sera effective et parce que l’état de grâce a fait son temps. Il reste du temps pour porter un jugement. Claudio Ranieri a déjà expliqué que son équipe avait été programmée pour être à 100% pour « le début du championnat à Hull samedi prochain. Contre United, mes joueurs ne seront qu’à 60% de leurs capacités. Mais je veux les voir à 100% de ces 60%. » Histoire de prolonger le rêve, de refuser le réveil mais aussi de bloquer tout accident industriel que peut être un lendemain de titre inattendu. Pour l’amour de l’ivresse.
Par Maxime Brigand