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Leeds, condamné à jouer en seconde zone ?
Relégué il y a presque dix ans, Leeds peine toujours à remonter la pente. Après dix-neuf matchs et malgré l'arrivée de nouveaux propriétaires, l'équipe est à neuf points de QPR, deuxième et directement promu en Premier League. La faute à qui ?
Dans le foot, plus qu’ailleurs, les clubs ont toujours suivi un cycle. Mais celui que Leeds connaît depuis sa relégation en Championship en 2004 pousse les supporters et les médias à s’interroger sur cette « descente aux enfers » . Plus que les victoires, les grandes épopées et les joueurs mythiques, (Vinnie Jones, Lucas Radebe, Harry Kewell, la liste est longue) la crise est un gimmick dans l’histoire des Whites depuis la création du club en 1919. Sauf que depuis la nomination de Ken Bates (ancien propriétaire de Chelsea) en 2005 à la présidence du club, cette crise semble être devenue inhérente au quotidien de Leeds. Bon ok, le gars n’est pas arrivé au meilleur moment : relégation, endettement, fuite des meilleurs joueurs, tous les événements tendaient à conclure que Leeds n’avait plus de magie sous le capot. Mais au-delà de ces tristes péripéties, c’est sa méthode qui pose problème. Après avoir acheté le club pour 11 millions d’euros, Bates multiplie les bourdes : climat déplorable avec les supporters, changements multiples d’entraîneur (sept au total, entre 2005 et 2013, même les ministres ont plus de temps pour faire leurs preuves), et, cerise sur le gâteau, un placement sous administration judiciaire à cause d’une dette de 35 millions de livres (51,6 millions d’euros). Conséquence : le club vend ses meilleurs joueurs, est relégué en League One à l’issue de la saison 2006-2007 et est pénalisé de 15 points pour son économie en dents de scie. Des détails qui veulent dire beaucoup et tendent à rendre l’ambiance légèrement hostile.
« Un personnage affreux »
Certains supporters voient en effet Ken Bates comme le principal responsable de ce manque de résultats, comme le stéréotype du businessman qui investit dans le foot pour satisfaire ses propres intérêts et non par amour du maillot. Ainsi, en novembre 2012, lorsque Leeds fût racheté par la société GFH Capital, Gary Cooper, porte-parole du Leeds Supporters Trust, l’association des supporters du club, n’hésite à pas à envoyer quelques mots tendres à l’adresse de son ancien président : « Nous sommes très heureux qu’un accord ait finalement été trouvé avec GFH Capital et que ces six longs derniers mois soient enfin derrière nous. Le mandat de Ken Bates n’a vraiment pas été un succès, il a même été une source de discorde au sein du club. Il a fait de son mieux pour discréditer les groupes de supporters, les considérant comme des crétins ou des dissidents. Il n’a vraiment rien fait pour se faire apprécier des supporters. D’autant qu’il a vendu tous nos meilleurs joueurs. » Dans la même interview accordée au Daily Mail, Gary Cooper va jusqu’à considérer Ken Bates comme un « personnage affreux » . C’est dire le soulagement lors de la nomination de Salah Noorudin – directeur général d’Envest Limited, société bahreïnie ayant racheté depuis 13,3% des parts à GFH Capital – à la tête du club et de Brian McDermott en tant qu’entraîneur.
Une stabilité financière, un beau jeu, une ambition retrouvée
Depuis avril 2013, toutes les conditions semblent donc réunies pour faire de Leeds un sérieux prétendant à la montée : un nouveau président en phase avec la philosophie du club, un entraîneur expérimenté ayant réussi de beaux exploits par le passé (la montée en Premier League de Reading en 2012, c’est lui !) et de jeunes joueurs prometteurs (Matthew Smith, 4 buts au compteur). Eh bien, pas du tout. Si Salah Noorudin symbolise à lui seul la nouvelle ambition du club et ne cesse d’intervenir dans la médias avec des phrases, disons, mille fois entendues – exemple : « Je suis ravi d’accepter le poste de vice-président de Leeds United et j’ai hâte de travailler avec le personnel du club de manière à atteindre les meilleurs résultats possibles à la fois sur et hors du terrain. » – , Brian McDermott peine toujours à imposer son équipe en haut du tableau, malgré une volonté de faire du beau jeu. Arithmétiquement, le Leeds de Brian McDermott connaît d’ailleurs les mêmes débuts que celui de son prédécesseur, Neil Warnock. Après dix-neuf matchs, les coéquipiers d’El Hadji Diouf sont en effet 7e avec 29 points. Les saisons sont-elles vouées à toutes se ressembler du côté d’Elland Road ? À croire que oui. D’autant que les supporters ont commencé à se plaindre début octobre du manque de budget mis à la disposition de Brian McDermott pour recruter lors du dernier mercato – un mois après les faits, cela en valait-il le coût ?
L’anti-héros du foot
Pas vraiment remis de ces années de crise, l’avenir de Leeds n’incite toujours pas à l’optimisme. D’abord, parce que le club du Nord de l’Angleterre continue à perdre trop de points, surtout à l’extérieur (10 points sur 27 possibles). Et puis parce que s’il fallait céder au petit jeu de la comparaison, on dirait que Leeds est un peu l’éternel loser que les frères Coen ont si souvent mis en scène dans leur film : un club que l’on prend plaisir à aimer, qui a toujours su dénicher de jeunes prodiges sans pour autant parvenir à les retenir, qui nous procure tantôt du plaisir, tantôt des regrets, tantôt les deux, et qui, même lorsqu’il entrevoit l’étincelle, finit toujours par échouer aux portes de la gloire. Un vrai anti-héros, condamné à jouer merveilleusement les seconds rôles.
Par Maxime Delcourt