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Leeds-Arsenal : Live at Leeds, again !
Ce dimanche à 17h30, Arsenal s’en ira défier Leeds à Elland Road. Il y a 50 ans, d’autres Londoniens, The Who, étaient allés eux aussi jouer à Leeds. Et ils avaient gagné haut la main !
« PEOPLE TRY TO PUT US…. DOOOOWN ! » Roger Daltrey hurle un My Generation incandescent sous un déluge sonore. Les murs du réfectoire de l’université de Leeds en tremblent encore, 50 ans après la déflagration électrique. Le 14 février 1970, les grands méchants Who avaient célébré à leur façon la Saint-Valentin en enregistrant leur premier album live, Live at Leeds, dans le prolongement de leur phénoménal opéra rock Tommy de 1969. À la fac de Leeds, devant 2000 étudiants rétamés par les décibels, les Who accomplissent la performance sportive de jouer pendant trois heures pour délivrer le meilleur rock-album live de tous les temps.
Roger, cœur de Gunner
Le fameux Wall of Sound les fait sonner comme dix alors qu’ils ne sont que trois musiciens sur scène. Le ravagé Keith Moon martèle ses fûts avec la furie d’une charge d’éléphants, John « Thunder Fingers » Entwistle à la basse coule 40 Titanic dans des creux de 100 mètres, et Pete Townshend à la Gibson SG branchée sur amplis atomiques Hiwatt CP-103 abat les murailles de Jéricho. Les trois enragés propulsent la voix puissante de Roger Daltrey vers des sommets de colère stridentes. En pulvérisant Leeds, cité nordiste du Yorkshire, les Who originaires du West London décrochent une victoire symbolique. Un succès à l’extérieur de Londres avec une différence de buts de +1000 hertz.
Car il faut dire que Roger Daltrey est supporter d’Arsenal ! Or, depuis quelques années, les Gunners se tirent la bourre avec Leeds United dans un foot anglais toujours champion du monde en cet hiver 1970. En 1968, le Dirty Leeds de l’impayable coach Don Revie avait battu Arsenal en finale de League Cup (1-0), laissant un goût amer du côté des Canonniers, avant de remporter le championnat 1969, larguant les Rouge et Blanc londoniens à la quatrième place. Cette même année érotique, Arsenal avait perdu en finale de League Cup 3-1 contre Swindon, un club de D3 ! La lose… Le championnat 1969-1970 avait ensuite débuté sur une bizarrerie, puisque que Peacocks et Gunners s’affrontèrent en matchs aller-retour dès le mois d’août 1969 : 0-0 à Elland Road, le 13, puis 1-1 à Highbury, le 19. Mais en février 1970, quand les Who débarquent à la Leeds University, Arsenal n’est plus en course pour le titre, puisque c’est contre Everton que Leeds va batailler en vain. Et les Toffees seront sacrés devant les Whites de United de Billy Bremner, Peter Lorimer et Allan Clarke ! Cependant, le parcours européen d’Arsenal fera quand même écho à la vibration tellurique des Who de Daltrey cette année-là. Engagés en Coupe des villes de foires (devenue deux ans plus tard la coupe UEFA), ils triomphent en avril face à Anderlecht (1-3 et 3-0) grâce à leur jeune buteur de 20 ans, Charlie George.
Stadium Rock
Moins charismatique que George Best, Champagne Charlie a néanmoins la dégaine rock’n’roll du front man scénique qui colle bien à l’époque. Il joue devant, servi par l’équipe, comme un lead singer poussé par son groupe. Faux hippy, mais vrai bad boy, comme Roger Daltrey, Charlie se révèle au foot anglais et alimentera sa propre légende de lad des faubourgs, à Arsenal puis à Derby County. Le 8 septembre 1976, pour sa première sélection contre l’Éire, Charlie George sortira à la 60e minute de jeu. Dépité, il insulte alors le sélectionneur, un certain Don Revie ! Le footballeur punk ne jouera plus jamais pour les Three Lions… Après 1970, l’année 1971 sera celle de tous les succès pour Arsenal et pour les Who. Au terme d’une saison dingue, les Gunners coifferont les Peacocks au poteau et remporteront le championnat avec un petit point d’avance. Mieux ! Les hommes de Bertie Mee, entraîneur légendaire des Gunners, réalisent le doublé en battant 2-1 en finale de Cup l’autre gang du moment, le terrible Liverpool de Bill Shankly. Là aussi, tout s’est joué au finish, en prolongation, avec trois buts inscrits, dont celui décisif de Champagne Charlie…
Au même moment, les Who achevaient en studio leur album Who’s Next qui sortira à l’été 1971. Un des plus grands albums de l’histoire, là encore, qui traversera les âges grâce aux deux hits de la série TV Les Experts : « Baba O’Riley » et « Won’t Get Fooled Again » . Avec le son gigantesque inauguré avec le Live at Leeds, les autres morceaux phares de Who’s Next établiront les Who comme précurseurs du « Stadium rock » , le rock des stades, qui les verra triompher plus tard dans toutes les grandes arènes du monde, dont Wembley, of course ! Mais c’est à l’occasion du dernier match d’Arsenal à Highbury que Roger Daltrey (coupable d’une petite infidélité avec QPR) composera et interprétera le 7 mai 2006 l’émouvant « Highbury Highs » . Un hymne sincère à la gloire de son club de cœur : « From Rocky, Ray and Raddy. To Dennis, Chippy, Paddy. The Rock of Tony Adams. The Joy of Charlie George, Chapman, Graham, Wenger. Yes we will remember Henry, Bastin, Wright. And those record breaking scores. All those Highbury Highs under North London skies. YES WE WILL REMEMBER THOSE HIGHBURY HIGHS » .
Par Chérif « Substitute » Ghemmour