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Leçons de passion à la napolitaine

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Leçons de passion à la napolitaine

“Tutti pazzi per il Napoli” (tous dingues du Napoli) : voilà succinctement comment se vit le foot du côté de Naples, jamais sans demi-mesure, à la vie et à la mort. Pour illustrer ce panorama résolument extrême, quoi de mieux qu'une célèbre compétition d'été en voie d'extinction et à l'appellation ridicule ? Alors que la Coupe Intertoto, rebaptisée localement coupe à Totò (en référence à un célèbre acteur comique napolitain) ne soulève guère les foules que dans les contrées reculées des Balkans, le match retour du troisième tour – qualificatif pour la grande sœur UEFA – prend ici des allures de Vésuve au bord de l'éruption. Même quand l'adversaire n'est que le Panionios.

Après le match aller et une victoire 1-0 en Grèce, la fièvre n’en finit plus de monter la semaine précédant le match retour. Nombreux sont les Napolitains qui effectuent leur jogging fièrement parés de maillots aux sponsors périmés du temps glorieux de Maradona.

Jour après jour, la chronique locale du Corriere dello sport affiche le nombre de billets déjà vendus. Combien seront-ils samedi ? Jeudi, le chiffre hallucinant de 50 000 est avancé, alors que l’on tablait sur un “modeste” 30 000 une huitaine plus tôt.

Entre-temps, mercredi, la bagatelle de 300 fidèles s’est traînée jusqu’à l’aéroport, histoire d’accueillir dignement Lavezzi et consorts au retour du toujours difficile stage d’avant-saison. Dans la foulée, le soir-même, un entraînement public est organisé au San Paolo : 20 000 Napolitains (femmes, enfants, tifosi et ultras) y assistent dans la bonne humeur, animés collectivement d’une ferveur hors du commun.

Quelque chose d’extraordinaire pour le non-initié. Pendant presque deux heures, une opposition jeunes/titulaires voit ces derniers s’imposer 11-1, super à l’aise. Les chouchous Blasi et Denis font leur show (un triplé chacun), sous les clameurs d’un public déjà caldissimo. En revanche, le défenseur Domizzi, coupable de velléités de départ, sera cruellement conspué à chaque touche de balle. A Naples, on ne badine pas avec l’amour du maillot.

Samedi 26, le jour tant attendu est enfin arrivé. Alors que l’heure fatidique de la partie approche tout doucement, il trotte dans l’air une atmosphère spéciale – mélange de tension, d’impatience et d’excitation – le tout enveloppé d’un voile de solennité.

17 heures : les premiers motivés prennent le chemin du stade, sans compter les irréductibles déjà sur place depuis belle lurette.

18h30 : c’est à présent un flot ininterrompu de voitures et de scooters arborant ostensiblement les couleurs azzurre qui s’engouffrent dans le tunnel de Posillipo, pour déboucher à sa sortie sur le mythique San Paolo.

Autour de l’arène, l’enthousiasme napolitain fait plaisir à voir et donne carrément envie de participer à la fête. Auprès des bancarelle – ces stands ambulants où l’on peut se procurer en un clin d’œil tout l’attirail du parfait tifoso –, on se presse pour acquérir maillots, écharpes, drapeaux et tee-shirts.

19h30 : le bus des joueurs fait son apparition, vite assailli par une marée d’encouragements. A l’intérieur de l’antre de Fuorigrotta (le quartier du stade), les curve A et B sont déjà pleines à craquer, ce qui semble constituer un prétexte suffisant pour des dizaines de ragazzi qui se mettent à escalader le mur de plexiglas afin de rejoindre les distinti (tribunes latérales), le tout avec la bénédiction complète des stadiers qui laissent tranquillement faire.

20 heures : le président De Laurentiis, considéré par les supporters comme le sauveur d’un Napoli qui évoluait encore en Serie C il y a trois ans, entre sur la pelouse et se fait longuement submerger d’acclamations.

20h30 : les joueurs du Panionios entament leur échauffement sous une bronca de classe mondiale, presque un soulagement pour les oreilles jusque-là mises à rude épreuve par une sono digne des pires stades tchétchènes.

De son côté, la bonne centaine d’ultras du quatrième club d’Athènes ne sera pas en reste et se fait à son tour copieusement huer à son arrivée en tribunes. Le ton est donné : l’ambiance sera celle des grands soirs, 55 000 spectateurs assistant finalement à l’“évènement”.

Pourtant, sur le terrain, les Napolitains semblent d’abord tétanisés : dès la 1e minute, Iezzo repousse difficilement en corner une frappe vicieuse de D’Acol. Le Napoli déjoue, peine à se montrer dangereux et ce sont même les Grecs qui effectuent les mouvements plus intéressants.

La tension gagne rapidement les gradins où l’on se murmure que l’avantage du match aller ne sera certainement pas de trop. A la 24e minute, c’est cette fois le poteau qui renvoie une tentative de Choutos, suite à un corner cafouillé par la défense. Bien que combatifs et volontaires, les Parthénopéens sont dépassés physiquement par un Panionios bien en jambes, qui croit désormais clairement en ses chances.

Le public ne s’y trompe pas et redouble d’encouragements : les curve A et B se font ainsi écho en lançant alternativement des chants brefs mais d’une puissance phénoménale.

Au retour des vestiaires, les débats tendent enfin à s’équilibrer avec un Napoli qui commence à prendre le dessus sur un Panionios en passe de s’essouffler. Toutefois, peu d’occasions à se mettre sous la dent d’un côté comme de l’autre, et on commence à se faire à l’idée d’un éventuel 0-0, qualificatif à défaut d’être glamour.

C’est le moment choisi par Hamsik – l’un des chouchous du public – pour fusiller Kresic de près, récupérant une balle perdue dans la surface athénienne. On vient de franchir l’heure de jeu et le San Paolo entre alors dans un délire indescriptible. Le but fait office de délivrance et signifie bel et bien que Naples retrouvera l’UEFA 14 ans après sa dernière participation et 19 ans après l’avoir remportée.

En curva A, on crame une dizaine de fumigènes en guise de feux de joie. Sur la pelouse, les joueurs ne s’y trompent pas et gèrent paisiblement la fin de rencontre face à un adversaire résigné et pouvant légitimement nourrir des regrets.

L’arbitre siffle, un dernier « Ourrraaaahhhh » foudroie les travées, on se congratule, on se signe, on s’embrasse ; l’affaire est dans le sac. Les joueurs saluent respectueusement le public, mais ne prolongent guère la communion et rentrent rapidement aux vestiaires : la victoire représente plus un soulagement que de l’euphorie à l’état brut.

Pour l’orgueil napolitain, retrouver l’Europe ne se situe en réalité que dans la logique des choses et l’on se promet déjà que des succès plus prestigieux seront très bientôt à célébrer. Plus que jamais, Naples est de retour.

Paul Bartolucci, au San Paolo de Naples, avec LDC

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