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Le voyage de Ciro

Par Charles Alf Lafon
Le voyage de Ciro

‏Rejeté par une Vieille Dame qui n'a jamais vraiment cru en lui, Immobile revient ce soir à Turin, entre esprit de revanche, spleen et adaptation compliquée. Histoire de prouver qu'il a bien fait d'abandonner le blanc, pour ne garder que jaune et noir.

À dix-huit ans, Ciro a quitté sa province, bien décidé à empoigner la vie. Le cœur léger et le bagage mince, il était certain de conquérir l’Italie. Natif de la région de Naples, il s’est fait repérer sous les couleurs de Sorrento – avec qui il inscrit 30 buts en U17 lors de la saison 2007-2008 – par Ciro Ferrara. Il débarque donc à la Juventus contre un chèque de 80 000 euros, et se voit déjà en haut de l’affiche, adulé et riche. Au début, tout commence bien : des débuts prometteurs en Primavera, une première apparition en Serie A contre Bologne en mars, puis en Champions League face à Bordeaux en octobre, à chaque fois à la place d’un certain Alessandro Del Piero. Mais à l’époque, les attaquants de la Juve se nomment donc Pinturicchio, David Trezeguet, Amauri, Vincenzo Iaquinta. Alors Ciro prend la route et se balade en Serie B : Sienne, Grosseto, et surtout Pescara. Dans les Abruzzes, il rencontre son Haku à lui, en la personne de Zdeněk Zeman. Sous les ordres du fumeux Tchèque, Ciro prend confiance en lui, et devient le meilleur buteur du championnat, avec 28 buts, dans une équipe évidemment ultra-offensive qui compte aussi dans ses rangs Marco Verratti et Lorenzo Insigne. Pourtant, la Vieille Dame ne semble pas croire en son éclosion, cédant 50% de ses parts au Genoa contre quatre millions. Comme beaucoup d’autres avant lui, il continue alors son tour d’Italie, direction cette fois la cité génoise. À l’étage supérieur, Ciro se fait les dents dans une équipe luttant contre la relégation.

Ciro se lève


Le 12 juillet 2013 marque un premier tournant dans la vie d’Immobile. Ce jour-là, la Juventus rachète la moitié du Genoa, pour la revendre le même jour au Torino. L’autre club de la ville, celui de la classe ouvrière, des immigrés, des provinciaux, de la classe moyenne et des pauvres. Évidemment, il explose au Toro, jusqu’à devenir Capocannoniere. Toujours pas assez pour la Juve, qui le cède via le rival au Borussia Dortmund contre 19,40 millions d’euros, et achète dans la foulée Álvaro Morata. À l’époque, Zeman valide le départ de son poulain : « Il a bien fait d’aller en Allemagne parce qu’il est jeune et a beaucoup à apprendre, surtout dans un football encore plus physique et agressif. Je suis désolé de le dire, mais les joueurs italiens ont bien plus de chances de se développer à l’étranger qu’en Italie. Je suis désolé pour la Juventus, qui ne l’a pas pris alors qu’il a été meilleur buteur » . En octobre, le principal intéressé se félicite même de son choix dans les colonnes du Corriere dello Sport : « Le Borussia Dortmund était la meilleure solution pour moi. Je voulais avoir une expérience à l’étranger et en Ligue des champions. Ensuite, il y a les fans – on m’a dit qu’ils supportaient toujours l’équipe, mais je ne m’attendais pas à ça. Je serai toujours reconnaissant envers la Juventus parce qu’ils m’ont acheté et m’ont laissé partir quand on avait des besoins différents » . Une manière polie – trop – de dire ciao, sans planter de couteau dans le dos.

‏Ciro se perd

‏À l’instar de Luca Toni, autre Capocannoniere, Immobile vient en Allemagne pour se transformer en Torschützenkönig. Malheureusement, la Serie A d’hier n’est pas celle d’aujourd’hui, et la Bundesliga non plus. Surtout à Dortmund, cette machine à gegenpressing, grippée depuis le départ de Robert Lewandowski. Bien sûr, l’Italien n’est pas venu remplacer directement le Polonais, tout comme İlkay Gündoğan avec Nuri Şahin, Marco Reus et Shinji Kagawa, Henrikh Mkhitaryan et Mario Götze. L’adaptation, prévue en douceur, est rendue difficile par la faillite collective du BVB. Ciro ne peut se cacher derrière Adrián Ramos, autre recrue estivale, tout aussi famélique que lui en Bundesliga, alors que le Colombien a pourtant fait trembler nombre de filets germaniques. Si depuis quelques semaines, les Schwarzgelben vont mieux, enchaînant trois victoires consécutives, c’est dans le sillage d’un Pierre-Emerick Aubameyang aligné en pointe et décisif (quatre buts et deux assists). D’ailleurs, au moment de la re-signature de Reus, un sondage de Bild sur le 11 idéal pour entourer le fils prodigue avait révélé que le Gabonais recueillait 80% des suffrages au poste d’avant-centre, contre 9% pour l’Italien.

‏De toute façon, Ciro ne joue plus depuis une titularisation médiocre lors d’une défaite contre Augsburg le 4 février. Alors il se plaint dans les colonnes de SportWeek, un supplément hebdomadaire de la Gazzetta dello Sport : « Le problème est qu’on n’arrive pas à reproduire les bonnes choses qu’on fait à l’entraînement. Ces problèmes d’équipe compliquent mon intégration. […] Les gens ne se souviennent que de ce qu’ils veulent, et quasiment toujours des choses les plus récentes. Lewandowski n’a marqué que 7 buts en Bundesliga lors de sa première saison à Dortmund (en réalité 8, ndlr). Il a ensuite énormément marqué et laissé un bon souvenir. J’espère avoir la même opportunité » . Surtout, tout au long de l’interview, il ne cesse de répéter que l’Allemagne ne lui convient pas vraiment : « Les Italiens sont plus extravertis, joyeux, ouverts. Ici, on est plus froid. […] Ils sont plus organisés, plus précis… Mais la précision poussée à l’extrême peut devenir un défaut. […] Depuis huit mois que je suis là, aucun coéquipier ne m’a encore invité à manger chez lui. […] L’Allemagne est une belle nation, mais la cuisine n’est pas leur fort. Par chance, on a trouvé un restaurant napolitain, Acqua Pazza, près du stade. Un dimanche, ils ont fait le ragù, le polpette, le melanzane alla parmiagiana (aubergines à la parmesane)… » Évidemment, tout cela est tombé dans la presse allemande, toujours prompte à allumer des brasiers. Le BVB a choisi de déclarer maladroitement qu’il n’avait pas donné son accord pour cette interview, et que les déclarations étaient de fait fausses.

‏Ciro brise la malédiction


On aurait pu croire que le torchon brûlait, que l’Italien était foutu, grossier flop, one season wonder, crachant sa rancœur dans la presse transalpine, trop content d’avoir un compatriote à qui parler chez lui. Mais si la saison de Dortmund nous a appris quelque chose, c’est bien que la rédemption existe, et qu’on ne devient pas médiocre du jour au lendemain. Sur son Facebook, Ciro s’est empressé de déclarer que l’interview avait été donnée sur un ton léger et amical, qu’il n’avait fait que pointer du doigt les différences culturelles entre les deux pays. Tout est donc encore possible, d’autant plus que Klopp croit en lui, comme Ciro l’a lui-même avoué – « ce n’est pas vrai qu’il ne m’aide pas : il me parle et m’encourage beaucoup » . Jürgen a d’ailleurs déclaré cette semaine en conférence que PEA était un très bon ailier, ouvrant la porte à une titularisation d’Immobile en neuf. Là où il se sent bien, et où il a déjà livré de très bons matchs, généralement en Ligue des champions d’ailleurs, lui qui en est à quatre buts en cinq matchs dans la compétition. Si Immobile n’est pas – encore – adapté à l’Allemagne, il l’est à l’Europe, et encore plus à Turin. En un match, il peut prendre sa revanche sur tous ceux qui ont eu un jour l’audace de ne pas croire en lui. Pour, enfin, faire bouger les choses. Sans cochon.

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