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- 26 septembre 1969
Le vol sans retour de The Strongest
Il y a exactement 43 ans, le football bolivien vivait sa plus terrible tragédie. Vingt membres de The Strongest, doyen du football national, périssaient dans un accident aérien. Un drame à l'impact continental.
Le 26 septembre 1969, la Bolivie fut secouée par deux évènements. Le premier, politique. Le général Alfredo Ovando Candía s’emparait du pouvoir d’un coup d’État. Le second impliquait The Strongest, l’une des équipes les plus populaires du pays. L’avion dans lequel voyageait El Tigre, surnom de l’institution au maillot jaune et noir, avait disparu. Plus aucun signe de vie n’avait été donné peu après 15h, une bonne heure après le décollage de Santa Cruz, où The Strongest venait de disputer un tournoi quadrangulaire. La Paz, destination finale de l’équipe, ne verra jamais l’avion atterrir.
Informations contradictoires
À Santa Cruz, les Jaune et Noir avaient passé un sale moment. L’équipe était considérée comme en crise au terme d’un tournoi qui opposait les Paraguayens du Cerro Porteño, Oriente Petrolero et un ensemble réunissant les meilleurs joueurs des clubs de la ville hôte. Face à ces derniers, The Strongest terminera sa participation de manière calamiteuse, en concédant une lourde défaite (4-0). Une semaine plus tôt, un incident avait perturbé l’équipe de La Paz. Au moment de se poser à Sucre, le train d’atterrissage rechignait à sortir, et c’est après une longue attente au-dessus de l’aéroport que l’avion s’était posé. Ce jour, une recrue paraguayenne qui venait de s’engager avec The Strongest préféra prendre ses jambes à son cou, quitte à retourner l’avance qui lui avait été versée au moment de sa signature.
Dans les heures suivant l’annonce de la disparition de l’avion de la Lloyd Aéreo Boliviano (modèle DC-6), les proches des joueurs d’El Tigre seront ballotés par des informations contradictoires. Le quotidien Hoy faisait ainsi état d’une rumeur, le samedi, lendemain de la tragédie, selon laquelle l’aéronef aurait été pris en otage et avait fait escale au Pérou. Selon d’autres sources, l’avion avait atterri dans une localité de l’État de Cochabamba. Le samedi, quelques minutes avant les douze coups de minuit, le verdict tombe, officiel et définitif : le vol transportant 74 personnes, dont vingt membres de The Strongest (seize joueurs, l’entraîneur, le masseur, et deux dirigeants) s’est écrasé. Les causes du crash n’ont jamais été éclaircies, mais le manque de visibilité aurait provoqué la tragédie. Les restes de l’avion ont été découverts par un groupe de mineurs près d’un secteur nommé « La Cancha » . En VO : le terrain. Tragique ironie.
Recueillement
À 4500 mètres d’altitude, sur un terrain particulièrement accidenté, la recherche des cadavres se révèlera ardue. Proches des victimes, mais aussi supporters de The Strongest se rendront sur place pour y participer. Les corps seront exposés au sein de la cathédrale de La Paz, où des dizaines de milliers de Boliviens viendront se recueillir. Le lundi suivant la tragédie, un jour de deuil national avait été décrété. Aucun passager n’a survécu au crash, mais trois joueurs qui étaient restés à La Paz pour soigner leurs blessures respectives ont échappé au fatal accident, dont le capitaine, Rolando Vargas.
À l’annonce du drame, les témoignages de solidarité afflueront de toute l’Amérique du Sud. Un clasico carioca entre Fla et Flu est ainsi mis sur pied pour venir en aide à The Strongest et aux proches des défunts. Boca Juniors propose, lui, d’accueillir l’équipe nationale de Bolivie à la Bombonera. Plusieurs clubs boliviens, dont le Club Bolivar, le grand rival d’El Tigre, se solidarisent également, en prêtant leurs meilleurs joueurs pour aider les Jaune et Noir à réaliser des tournées afin de récolter des fonds dans tout le pays. Un an après la tragédie, The Strongest sera sacré champion national. Un titre qu’il conservera l’année suivante.
Marcelo Assaf, avec Thomas Goubin