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Le triste adieu au football de Yady Fernández

Par Ruben Curiel
Le triste adieu au football de Yady Fernández

Joueuse professionnelle colombienne, Yady Fernández a vu sa carrière brisée par un accident. Amputée de la jambe, elle a dû abandonner le football, malgré une campagne de soutien pour lui procurer une prothèse. Portrait d'une combattante.

Nous sommes le 16 février 2014. En vacances en Équateur, elle y laissera aussi sa carrière. Dans un football féminin colombien peu développé et encore amateur, la native de Palmira (aux alentours de Cali) représentait son pays sur les terrains européens.
Accompagnée de son cousin en moto, elle se fait renverser par un conducteur en état avancé d’ébriété. Le bilan est dramatique. Son cousin meurt sur le coup. Transportée d’urgence à l’hôpital, Fernández se réveillera après une très longue intervention. Elle raconte : « Nous étions sur l’autoroute qui mène de Guayaquil à Montañita. Un véhicule de police en sens inverse nous a foncé dessus. Il était bien alcoolisé, car il n’a pas pu ralentir lorsqu’il nous a vus. » Et d’ajouter : « Enfin, moi, je n’ai rien vu, c’est ce qu’on m’a raconté ensuite. » Pire, l’officier des forces aériennes équatoriennes fuit. « J’ai très peu de souvenirs de l’accident. Je suis juste hantée par l’image de mon cousin, en sang au bord de la route. Les seuls mots que j’ai prononcés, ce sont mon nom et le numéro de téléphone de ma mère en arrivant à l’hôpital. » Cette dernière témoigne : « Je suis restée sans voix après cet appel. Ma sœur était avec moi. Heureusement qu’elle était là. Ce fut l’épreuve la plus difficile de ma vie. Yady est ma fille unique. » Malgré cela, cet accident n’aura pas raison de la carrière sportive de Fernández.

L’eldorado espagnol

Depuis ses six ans et ses premiers ballons touchés, Yady Fernández a pu constater avec dégoût le traitement offert aux femmes colombiennes qui osaient jouer au sport que les hommes du pays cafetero considèrent (encore trop souvent) comme leur étant exclusivement réservé. À douze ans, Fernández va vivre en Espagne et intègre une école de football. Un luxe pour une jeune Colombienne à l’époque. En effet, au pays de James, il n’existe aucun club professionnel, aucun championnat officiel. « Avec des amies, nous formions une belle équipe. Je jouais dans la catégorie des enfants. Mais quand l’équipe des plus âgées est descendue d’une division, l’entraîneur a commencé à me convoquer. J’étais heureuse, je jouais avec mes amies, et aussi avec les plus expérimentées » , se rappelle la Colombienne, dans une interview pour Gol Caracol. Le football féminin espagnol est professionnel depuis plus de quinze ans. « J’ai rejoint un plus grand club ensuite : le Club Deportivo Achamán. Je rêvais déjà d’affronter les grands d’Espagne, le Real Madrid, le Barça » ajoute-t-elle. Le souvenir de l’ascension a la Liga Nacional est intact : « J’étais sur le banc, et à dix minutes de la fin, j’ai marqué le but de la victoire de la tête sur un corner. Le but qui nous a permis de monter en Liga Nacional. » Dotée d’une bonne technique, Yady occupait le poste d’attaquante ou de milieu offensive. Et aimait particulièrement dribbler : « Je me moquais beaucoup des défenseurs. C’est idiot, mais j’aimais ça. Un petit sombrero par-ci, un petit pont par-là. Je passais en souriant après mes gestes » , raconte-t-elle. Les entraîneurs la repositionnent à l’aile, où ses qualités de vitesse et de centre servent à merveille ses coéquipières. Puis viendra la récompense. Alors que la Colombie va disputer sa première Coupe du monde en 2011, Ricardo Rozo, le sélectionneur, inclut Fernández dans une pré-liste. Malheureusement, elle ne verra pas l’Allemagne, écartée de la liste définitive des « Cafeteras » .

La résurrection

À l’hôpital de Santa Elena, la panique gagne la famille : « Quand je suis arrivée à l’hôpital, la première chose qu’ont fait les médecins, c’est de me montrer la jambe de ma fille ! Ils ne m’ont rien dit, seulement qu’elle était dans un état grave et en chirurgie. Les médecins équatoriens n’ont pas de cœur. » La cause de l’amputation de sa jambe gauche n’est autre que la tardive intervention de l’ambulance sur l’endroit de l’accident. Yady Fernández est restée plus de trente minutes au sol et a perdu son sang. Huit jours alitée, à réaliser que sa carrière est terminée : « J’étais très mal. Physiquement aussi. Les veines de mon bras ont été abîmées par toutes les injections. Un jour, je me suis énervée contre les infirmières. Je les empêchais de toucher mon bras. »
Dans un pays qui n’est pas le sien, le traitement est difficile. La mère de la footballeuse n’a que très peu de recours économiques, et son père est décédé lorsqu’elle avait six ans. « Quand l’hôpital s’est rendu compte que nous ne pouvions pas tout payer, ils allaient me laisser le moignon sans me soigner ! Heureusement, un homme du consulat colombien est arrivé et leur a mis la pression. J’ai donc été opérée dans de bonnes conditions. » Mais l’état de santé de Fernández ne permet pas son transfert en Colombie. Pire, lors d’une intervention, l’infirmière se trompe dans la transfusion de sang, et injecte à la jeune colombienne du sang d’un autre groupe sanguin. « Cela s’est passé trois jours après l’accident. Elle aurait pu y rester. Elle a fait un arrêt cardiaque. Sa condition s’est détériorée et nous avons tout fait pour qu’elle sorte de cet horrible hôpital » se remémore Selene Bravo, la mère de Yady. Un an et demi est passé et l’espoir de pouvoir refaire du sport grandit. En effet, une immense campagne de soutien permettra à Fernández d’obtenir une prothèse. Jairo Romero est l’homme qui a permis à Yady de s’adapter à sa « nouvelle jambe » : « Il y avait très peu d’espoir. Le moignon était court, et on ne trouvait pas la solution pour que la prothèse puisse tenir. Mais nous y sommes parvenus » , raconte-t-il à Gol Caracol. Trois ans plus tard, en Colombie, un hommage lui sera rendu. Le souvenir est amer : « C’était le 23 mai 2014, jour où la sélection masculine se rendait au Brésil. C’était une superbe fête. Le président de la Fédération Luis Bedoya est venu prendre une photo avec moi. Mais il l’a fait pour faire bonne figure. Plus tard, il m’a dit qu’il ne ferait rien pour moi. »
Désormais, à 23 ans, Yady Fernández cherche désespérément à réunir 174 millions de pesos (environ 67 000 euros), pour pouvoir acheter une prothèse semi-bionique, directement connectée au cerveau et qui lui permettrait de reprendre petit à petit une activité sportive. Aujourd’hui, Fernández se dit dégoûtée du football. Elle veut intégrer l’équipe paralympique de cyclisme. Andrés Botero, directeur de Coldeportes, entité qui aide les sportifs colombiens retraités, avait aussi promis de l’aide : « En face d’une caméra, il m’a promis une aide financière. Je n’ai toujours pas vu la couleur d’un de ses billets » , affirme Yady. Récemment, ce dernier a réagi : « Nous allons lui offrir cette prothèse. La Fédération colombienne de cyclisme l’aidera énormément. » En attendant, Yady fait tout pour s’adapter à sa nouvelle vie. Et écrit : « On a vécu tellement de moments ensemble. Entre rires et pleurs, on passait bien nos journées. On en a bien profité. Sur le terrain, tu étais tout le temps avec moi. Je te remercie pour ce que l’on a vécu. Jamais je ne pensais que tu t’en irais. Tu étais mon amie. Tu n’imagines pas la douleur que j’ai ressentie quand tu es partie. Adieu ma jambe. »

Par Ruben Curiel

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