- Anniversaire de Guy Roux
Le tour de Guy Roux en 80 perles
Par Kevin Charnay
Huit décennies. Aujourd'hui, Guy Roux a 80 ans. Ce qui fait de lui l'un des hommes qui connaissent le mieux le football français. Mais c'est avant tout un personnage, que l'on peut tenter de décrire en 80 perles.
1. « Un petit qui saute va toujours moins haut qu’un grand qui saute. » C’est d’une logique implacable.
2. En 2005, il a contacté l’un des fils de Mouammar Khadafi pour exiger que le public de Libye-Côte d’Ivoire soit bloqué un quart d’heure dans le stade au coup de sifflet final pour que la route menant à l’aéroport soit entièrement dégagée. Tout ça pour que Bonaventure Kalou puisse disputer la finale de Coupe de France le lendemain. Il y marquera le but de la victoire.
3. En 1993, Guy Roux, en vacances à Cuba, rencontre Fidel Castro qui lui propose de développer le football pour en faire le sport numéro 1 du pays devant le baseball, trop américain. Et pour le rémunérer, Fidel Castro propose de lui offrir une île cubaine. Refus.
4. « Ils allaient au bal. Dans le temps, dans les voitures, on voyait les compteurs kilométriques. J’avais mon carnet. Le soir, pendant qu’ils dînaient… puis le lendemain matin à 7h30… je passais. Ils ont mis longtemps à deviner comment je savais ! Ils savaient que, s’ils étaient en « catégorie sorteurs », ils avaient peu de chances de renouveler leur contrat ou d’être encore dans l’équipe. »
5. Pour fêter la montée de l’AJA en CFA en 1970, il a mangé avec ses joueurs au Courtepaille de Cussy-les-Forges.
6. Les matins de match, il fallait toujours qu’il trouve une fleur jaune au cours de sa promenade. La plus mignonne des superstitions.
7. « Plus on change, plus on a de chance de se tromper. » Coaching gagnant.
8. Grâce à Compo Floranide, il a un gazon « bien vert, bien résistant » .
9. Aux alentours de l’année 1970, il fait la connaissance de François Mitterrand, maire à l’époque de Château-Chinon, ville jugée idéale pour les mises au vert de l’AJ Auxerre.
10. D’ailleurs, en 1974, il a trinqué avec lui à l’hôtel du Vieux-Morvan pour fêter la naissance de la petite Mazarine.
11. Alors forcément, plus de vingt ans plus tard, il use de ses relations. Lorsqu’Éric Cantona risque quinze jours de prison ferme pour son high-kick sur un supporter de Crystal Palace, Guy Roux demande à François Mitterrand d’intervenir. « Il faut que le président adresse un message de toute urgence à la reine d’Angleterre et qu’il lui dise que si Éric Cantona était condamné à une peine de prison ferme, les relations entre la jeunesse française et anglaise pourraient être sérieusement entachées. » Résultat : Cantona prend des travaux d’intérêt général.
12. « On a fait les coqs avant d’avoir pondu. » Et ça, plus jamais.
13. « Il fait partie de ces joueurs pour lesquels j’aurais personnellement accepté de payer pour pouvoir l’entraîner. » Le plus beau compliment du monde dans la bouche de Guy Roux. Pour Enzo Scifo.
14. En 2001, juste après son opération du cœur, Gérard Depardieu débarque dans sa chambre pour le soutenir, et ôte sa chemise pour lui montrer les cicatrices de son pontage coronarien.
15. Et c’est pile à ce moment-là qu’un ami d’enfance de Guy Roux entre dans la pièce pour lui offrir un livre sur la campagne d’un sous-officier de Napoléon. Ce pote, c’est Lionel Jospin.
16. Isogard, une entreprise spécialisée dans la protection des habitations, a déposé le bilan un an après cette magnifique prestation de Guy Roux.
17. « Un match de foot se joue avec trois arbitres, il y a donc trois fois plus de chances qu’il y ait des erreurs d’arbitrage. » CQFD.
18. Il a réussi à convaincre Djibril Cissé de ne pas utiliser sa Ferrari jaune en centre-ville.
19. Sauf que l’attaquant français le contournait pour prendre l’autoroute et filer à Paris. « Je le savais par mes « agents » de renseignements situés aux différents péages de la région, qui m’indiquaient ses temps de passage. »
20. Il a offert une caisse de chablis à Jacques Chirac après avoir été décoré de la Légion d’honneur.
21. Et le président a désobéi en ouvrant une bouteille avant les « trois à quatre semaines » de patience recommandées par Guy Roux.
22. Lors de la Libération, il a six ans. Un Américain lui donne alors deux choses qu’il n’a jamais mangées : du chocolat et du chewing-gum.
23. Il a refusé deux fois de prendre les rênes de l’équipe de France. En 1994, pour rester à Auxerre. En 1998, parce qu’Auxerre n’a pas voulu le laisser partir. Amour passionnel.
24. « Y a pas écrit Guy La Poste, ici ! »
25. « Je l’ai supporté au-delà du supportable. » Une belle marque d’affection envers Éric Cantona.
26. Il a participé à un stage à Saragosse avec le FC Barcelone de Rinus Michel. Les deux monuments Guy Roux et Johan Cruyff se sont donc rencontrés.
27. « Je n’avais pas peur de mon père, mais de Guy Roux. » Basile Boli en tremble encore.
28. Peut-être pour ça : « Basile jouait en équipe première à 17 ans. Il fallait qu’il fasse la sieste. À 13h30, j’arrive avec ma voiture, et une mobylette me refuse la priorité à droite et s’arrête devant moi : c’était lui. La mobylette n’était pas à lui, ni assurée, il n’avait pas de casque. » Du coup, elle a été confisquée.
29. Il a fait passer Frank Verlaat pour son cousin suédois auprès de quelques journalistes.
30. Mais être le neveu de Guy Roux, ça a ses avantages : « J’avais reçu une amende de la police, je l’ai appelé et il l’a fait sauter. »
31. Comme un vieux flic, il avait des indics aux péages autour d’Auxerre pour contrôler les sorties de ses joueurs.
32. Guy Roux, meilleur contraceptif depuis 1938.
33. D’ailleurs voici l’échange de Guy Roux avec l’actrice écossaise dans le lit. « Tu as quel âge ? » « 19 ans. » « Et ta maman ? » « 39 » « Elle est aussi belle que toi ? » « Elle est plus belle, mais mon papa est costaud. »
34. Il connaît par cœur la dernière étape du Tour de France 1947. « Je peux même vous réciter le classement : un, Robic ; deux, Fachleitner ; trois, Brambilla » .
35. D’ailleurs, il porte très bien le casque de cycliste.
36. Il a entraîné le grand acteur, mais médiocre footballeur Patrick Dewaere pour le film Coup de tête. Plus précisément, il a été « conseiller technique » sur le film.
37. Lilian Laslandes : « Dans les boîtes, le DJ mettait une musique pour signaler que Guy Roux arrivait. »
38. Le stade de Chablis, l’espace sportif de Courlon-sur-Yonne, tous deux dans l’Yonne, le stade du Mesnil-en-Thelle dans l’Oise, et celui de Saint-Paulien en Haute-Loire portent le nom de Guy Roux.
39. « Le compliment diminue l’homme. » Philosophe.
40. « Excusez-moi, vous l’avez trouvé où votre chariot ? »
41. « Bien sûr que nous pensons au titre, mais notre calendrier est bien trop difficile, il faudrait pour y arriver une défaillance de Paris, et je ne crois pas que les événements aillent dans ce sens. » Ça, c’est Guy Roux juste après avoir collé 3-0 au PSG et être revenu à deux points du leader parisien en 1996. Quatre journées plus tard, il est champion de France.
42. Fan inconditionnel de Léo Ferré, il était capable de parcourir 500 kilomètres dans la nuit pour aller écouter le poète et être présent à l’entraînement le lendemain matin.
43. Il a même transmis cette passion à Éric Cantona. « Je lui ai prêté des disques de « mon » chanteur. »
44. Il a réponse à tout.
45. « Ce n’est pas mon premier titre, j’avais été champion de Division d’Honneur de Bourgogne » , déclare-t-il après la victoire en Coupe de France en 1994.
46. « Physiquement, nous sommes un peu mieux que les Monégasques. Nous avons de belles forêts, vous savez. » Voilà comment on explique une victoire cruciale contre Monaco dans la course au titre en 1996.
47. Le 17 juillet 1993, Auxerre affronte le PSG avec Taribo West en défense centrale. Pour son premier match, le Nigérian applique les consignes de Guy Roux à la lettre. Au marquage individuel de Rai pendant tout le match, il le suit jusqu’au banc de touche lorsqu’il doit sortir. « Ton haleine sur sa nuque et tes pointes de pied sur ses talons » , avait dit son coach.
48. « Oh malheureux, doucement avec la Cristaline, elle est si bonne. »
49. « Après le match, les joueurs, leurs femmes, les dirigeants, Gérard Depardieu, sa fille et son fils sont réunis pour un repas de fête. Gérard Bourgoin avait loué un grand karaoké professionnel pour la grande salle du Trianon, à Versailles. J’avais passé un accord avec les joueurs, pour que tout le monde aille se coucher à deux heures du matin. Pas de discothèque. Je leur ai dit : « On joue le titre, on fêtera le jour du titre » … Le Trianon est entouré d’un mur d’enceinte de quatre mètres de haut, il n’y a qu’une seule sortie. J’ai enfilé un jogging, et je suis resté posté devant la porte jusqu’à plus de cinq heures, pour m’assurer que personne ne sorte. » Voilà comment on fête une Coupe de France en 1996 à Auxerre.
50. Au départ de sa carrière d’entraîneur à Auxerre, il a monté une auto-école et un cabinet d’assurance. Les dirigeants et les joueurs prenaient des assurances chez lui.
51. Il s’est lancé dans une carrière d’humoriste avec Guy Marchand et Enrico Macias sur Arte.
52. Après l’élimination de l’AJA en C3 face à la Lazio : « Cela fait deux saisons de suite que deux arbitres espagnols m’estoquent. Ils doivent me prendre pour l’encolure d’un taureau. » Seulement le début du festival.
53. « Il ne faut pas traiter un arbitre de voleur, alors disons que l’arbitre a été un voleur par inadvertance. Je regrette d’être tombé contre un voleur par inadvertance. » Le meilleur arrive encore.
54. « Je crois, que, pour devenir un grand arbitre, il faut arranger ou l’Italie ou l’Allemagne. J’en ai gros sur la patate. Placé comme il l’était, l’arbitre n’a pas pu se faire avoir par Bokšić. C’est très, très grave. Je me demande même si, à l’aller, le carton jaune à Diomède n’était pas organisé. » Théorie du complot.
55. Ah, oui. Et bien sûr, cet arbitre, M. Lopez Nieto, a évidemment été rebaptisé « Lopez bidule » tout le long de cette tirade.
56. Guy le cycliste, Guy la mamie, Guy le serveur ou bien Guy « casquette à l’envers » . Jamais trop de Guy Roux.
57. « Un jour, Lens échoue en barrages. Mais il n’y a que 19 clubs en D1 après les relégations de Brest et de Bordeaux. Moi, je suis en stage avec Auxerre dans les Alpes, près d’Annecy. Jean Sadoul, président de la Ligue, m’appelle avec son accent cévenol dont il abusait exprès. J’étais secrétaire général du syndicat des entraîneurs et il me dit : « Il faut absolument que vous veniez à notre assemblée, j’ai besoin de voix. Vous allez sauver un entraîneur ! » J’ai dit : « Comment je fais ? » Il me répond : « Je vous paye tous les frais, débrouillez-vous ! » J’ai pris un hélicoptère d’Annecy à Genève, l’avion de Genève à Paris, un autre hélicoptère m’a amené de Roissy jusqu’au stade de Levallois. Là, une voiture de la Ligue m’attendait. La séance commençait vers 10 heures. J’ai fait l’appoint et Lens a été promu. » Voilà comment Guy Roux a fait monter Lens à l’issue de la saison 1990-1991.
58. Dix-sept ans plus tard, Guy Roux à Lens, c’est un but marqué en cinq matchs et quatre défaites avant de lâcher l’affaire. Voilà comment Guy Roux a contribué à faire descendre Lens à l’issue de la saison 2007-2008.
59. Il a commencé en tant que ramasseur de balles du côté de Colmar. Il a gardé cette habitude de récupérer les ballons dans les tribunes bien des années après.
60. « La professionnalisation du football en Algérie » est un sujet qui a du mal à le tenir en haleine.
Christophe Pélissier : « C’était le seul club de Ligue 1 contre lequel je n’avais pas pris un seul point »
61. Les conférences de l’équipe de France aussi d’ailleurs. 62. « Une Coupe du monde, c’est un Euro avec le Brésil et l’Argentine en plus. » Mais sans l’Italie. 63. En tant qu’entraîneur de l’équipe des parlementaires, il sait se montrer pragmatique au moment de l’élection d’Emmanuel Macron : « Le bon côté, c’est le rajeunissement. La moyenne d’âge risque de baisser d’une dizaine d’années ! Je serai moins angoissé. Je craignais toujours l’accident cardiaque ou le claquage chez les anciens… » 64. « Piècesetpneus.com ! Cliquez, posez, roulez ! » 65. Quand on lui demande si « c’est vrai que Daniel Dutuel est le neveu de Michel Denisot ? » , il répond : « Oui, de même que je suis l’oncle à George Weah ! Il y a comme ça des grandes familles dans le football, avec des ressemblances physiques très marquées. » 66. En 1997, Guy Roux étreint Serge Durand, entraîneur de l’US Vervins, et échange de bonnet avec lui. Il récupère le bonnet rouge et noir de son homologue et le porte au tour suivant de la Coupe de France contre Lens. Sympa. 67. « J’espère bien que l’AJA va gagner son premier titre sans moi lors de la finale de la Coupe de France contre le Paris SG. Si c’est la même équipe d’éclopés que celle qui a joué Barcelone en Ligue des champions, mercredi soir, on a une chance » , s’amuse-t-il en avril 2015. Et ça, c’est ce qu’il pensait avant même la remontada. 68. Le trio Marchand-Macias-Roux continue de faire un tabac sur Arte. 69. « Quand un dirigeant de club étranger m’appelle, je lui dis : « Aimez-vous votre femme ? » Il répond : « Oui, pourquoi ? » Je lui réponds : « Parce que je voulais vous l’acheter et vous demander combien vous la vendiez. » C’est un peu le genre de réponse que je fais pour Djibril Cissé. Y a pas de prix, on ne le vend pas ! » 70. Faut pas gâcher. 71. « Gardez le cap dans la tempête et tenez fermement la barre. » C’est ça le secret. 72. Il a déjà plané sur un nuage avant de s’envoler en s’accrochant aux ailes d’un avion. 73. « La différence entre la réussite et l’échec, c’est le soin apporté aux détails. » C’est vrai que c’est beau. 74. « Si on devait sanctionner tous les joueurs qui sortent en boîte de nuit, personne ne serait sélectionné. » Et Antoine Griezmann ne serait pas champion du monde. 75. Il a découvert le football pendant la Seconde Guerre mondiale. « Dans la cour du notaire, on tendait une ficelle entre deux marronniers pour faire le but. J’ai joué comme ça jusqu’à 15 ans, avant de débuter au patronage d’Auxerre. » 76. « Un jour, j’ai vu De Gaulle à la télé. Il avait tout compris. J’ai décidé d’être aussi bon que lui. » Modèle de réussite. 77. Il y a eu Guy Roux manager, saison 1997-1998. 78. Et aussi Guy Roux manager 1999. 79. Mais c’est clairement sur la dernière édition, celle de 2002, où il a le plus la classe. 80. Pour finir en beauté, le 6 juin 2005, le surlendemain de la victoire de l’AJA en Coupe de France, le sponsor officiel du club Playstation publie une pleine page de pub dans L’Équipe, pour célébrer le dernier titre de Guy Roux. Superbe.Le petit somme de Guy Roux en pleine conférence de l’amicale anciens internationaux algériens @lequipedusoir @Nabil_djellit @hpenot_lequipe pic.twitter.com/b8fOnzoczl
— DZfoot (@DZfoot) 19 octobre 2017
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Par Kevin Charnay