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Le Rivière pourpre
Après une expérience à l'étranger décevante, Emmanuel Rivière retrouve peu à peu ses sensations de buteur, en même temps que l'espoir d'un maintien jusque-là improbable du FC Metz renaît au fil des semaines.
Trois buts en trois saisons. La statistique écornerait le flocage de n’importe quel numéro neuf au monde. Parti conquérir la Premier League à l’été 2014 après une saison convaincante avec l’AS Monaco, Emmanuel Rivière en est revenu désorienté. La quête des filets anglais se transformant, bout de match après bout de match, en mirage assoiffant. L’escapade qui devait le relancer à Pampelune a terminé de le convaincre que sous les projecteurs des grands championnats étrangers se cachaient parfois des déserts arides. Alors le Martiniquais a compris qu’il était plus de France que de Navarre, et il a regagné l’Hexagone pour se ressourcer un peu.
Hey Manu, tu descends ?
Un but contre le Paris Saint-Germain début septembre pour son retour sur les terrains de Ligue 1 : on aurait pu croire que l’histoire commençait bien. Sauf qu’au-delà du 5-1 anecdotique et presque honorable reçu par les siens contre le club parisien, le FC Metz pointait déjà à la dernière place au bout de cinq journées, sans le moindre point. Quand on y a déjà trop goûté contre son gré, difficile de ne pas voir une nouvelle saison galère poindre à l’horizon. Mais à tout enfer son paradis. Celui de Rivière et du FC Metz a des airs de résurrection. En gagnant deux fois plus de points sur les quatre dernières journées que sur les dix-sept premières (10 contre 5), le club grenat s’est offert un fol espoir qui prend des airs de mission possible. En marquant autant en un mois qu’en trois ans, Rivière s’est quant à lui offert un bol d’air dont, du plus petit des vendangeurs amateurs au plus grand des buteurs, chacun a conscience du soulagement qu’il peut procurer. La sensation de revivre, d’exister de nouveau. Car, malgré les nuances multiples que requiert le jugement complexe du poste d’attaquant, il demeure une vérité cruelle : un avant-centre qui ne marque pas est un joueur mort médiatiquement. Les médias, ce n’est de toute façon pas la tasse de thé du joueur formé à Saint-Étienne, réputé timide, ce qui ne l’a sans doute pas aidé à s’imposer dans la jungle des Magpies. Entre ses nombreux soucis musculaires, Rivière n’a pourtant jamais cessé d’être le même, décisif ou pas : combatif, puissant au démarrage et irréprochable. Mais plus besoin de chercher des points de satisfaction à la marge dans les caractéristiques d’un attaquant quand il rapporte lui-même les points.
Emmanuel et Radamel
Ce dimanche après-midi, Emmanuel Rivière reverra un Rocher sur lequel il a fait les meilleures cascades de sa carrière. Arrivé en janvier 2013, il avait participé au sprint final de la remontée. Surtout, il avait été l’un des acteurs majeurs du départ canon du club de la Principauté pour ses retrouvailles avec l’élite, dans un effectif aux contours baroques, qui mêlait stars, cracks en devenir et joueurs de devoir aux parcours plus modestes. En marquant le premier but de la saison et en partageant la plus haute place du classement des buteurs avec Radamel Falcao pendant près de deux mois, il avait donné à cette attaque à l’allure improbable le cachet qui fait toutes les belles histoires, celles où les destins les plus éloignés se croisent. C’était avant la rupture des ligaments croisés du Colombien, qui, paradoxalement, a condamné les deux joueurs à traverser le même tunnel pour se perdre outre-Manche et finalement retrouver leur football ici. De tube de l’été 2013, Rivière est désormais devenu chanson d’espoir de l’hiver 2018. C’est sans doute moins glamour. Mais, à Louis-II comme à Saint-Symphorien, du moment que tremblent les filets, le salto arrière de Manu Rivière fera toujours son petit effet.
Par Christophe Depincé