- Lille
- Transfert de Renato Sanches
Le retour vers le futur de Renato Sanches
Une cerise sur le gâteau : voilà ce qu'a déposé le LOSC sur son marché estival en recrutant Renato Sanches. Une affaire d'opportunité (20 millions d'euros et 5 ans de contrat), de nom ronflant à relancer, mais aussi un recrutement parfaitement raccord avec la stratégie du club.
D’un côté, Florence. Son Duomo, son architecture Renaissance et une routourne qui tourne toujours. De l’autre, Lille. Sa déesse, son style flamand et une boucle bouclée. Le point commun entre les deux villes ? Un rôle d’animateurs imprévus du marché de l’été finissant, avec pour même origine Munich. Franck Ribéry et Renato Sanches, donc. Soit un joueur venant terminer une grande carrière en esthète, et un autre qui va tenter de faire redécoller la sienne – d’où l’intérêt de boucler la boucle. Rewind, direction le 10 juillet 2016, vers 22h33. À Saint-Denis, le quatrième arbitre lève un panneau sur lequel sont inscrits les numéros 16 et 9 : Renato Sanches va laisser sa place à Eder. Une heure plus tard, le premier est le plus jeune vainqueur de l’histoire de l’Euro (à 18 ans et 10 mois) grâce à un but improbable du second (après 34 minutes de jeu dans toute la compétition). Et trois ans plus tard, c’est cette fois Sanches qui prend la suite d’Eder à Lille, qui accueille donc son troisième champion d’Europe en titre grâce à la transition assurée par José Fonte. Avec, pour Marty Sanches, l’espoir d’un voyage en DeLorean aux côtés du Doc Fonte.
Renato vs réalité
Mais qui est Renato Sanches ? Sur ce point, les désaccords sont profonds. Pour les uns, La Voix du Nord par exemple, il est un « joueur de classe mondiale » . Pour les autres, il ne serait qu’une étoile filante parmi tant. Sans oublier, entre les deux pôles, la classique « bons pieds, mauvaise tête » . En résumé, le Portugais serait un mélange hasardeux de N’Golo Kanté, Mourad Meghni et Yann M’Vila. Flippant. Revenons plutôt à des faits objectifs : natif de Lisbonne, 22 ans sur le passeport, élu Golden Boy en 2016 devant Marcus Rashford et Kingsley Coman. Mais aussi un transfert au Bayern Munich moyennant 35 millions d’euros (plus 45 millions de bonus selon objectifs…) pour une grosse vingtaine de matchs en pro sous les couleurs du Benfica. Un premier tournant. Le second vient juste après cette signature précoce, quand Renato Sanches enchaîne avec un Euro remarqué (élu meilleur jeune devant Raphaël Guerreiro et Kingsley Coman) qui grave aussitôt son blase dans les hautes sphères du football mondial.
Le problème, c’est que Renato Sanches devient alors autre chose que ce qu’il est réellement : un jeune de 18 ans à fort potentiel qui n’a qu’une demi-saison dans les jambes. On le compare à Clarence Seedorf, lui qui a plutôt des faux airs d’Edgar Davids. Ça en devient presque trop prévisible : Bulo ( « le taureau » , surnom donné par sa grand-mère) se vautre à Munich. La faute à l’adaptation, au mental, aux blessures, au système de jeu, à la concurrence… La faute, aussi, au choix de son club d’envoyer un gamin au casse-pipe dans un club, Swansea, qui se bat pour survivre en Premier League. Où il ne laissera qu’une trace digne d’un Koji Nakata, et cette idée que du Pitbull Davids, il ferait bien d’adopter les lunettes. En résumé, sur le strict plan de la progression footballistique, Renato Sanches vient de perdre trois ans. Il le sait et le répète deux fois, en avril puis la semaine dernière : « Jouer cinq minutes ne me suffit pas. »
Renato Sanches ?? pic.twitter.com/SAMHNOR8Pk
— MisterCalvoChip (@MisterCalvoChip) November 30, 2017
La chanson des évidences
Un jeune (il n’a toujours que 22 ans) à fort potentiel, insatisfait dans son club, portugais qui plus est ? Il n’en faut pas plus à Luis Campos pour tendre l’oreille. Au vrai, il est très probable que, de la même manière que l’affirmait Rummenigge en 2016, « Renato Sanches a été observé sur une longue période » par l’insaisissable recruteur. Reste à trouver un accord pour un joueur suivi par le PSG en janvier dernier. Et là, Luis Campos possède deux atouts dans sa manche. Sur le plan sportif, la promesse d’un cadre taillé sur mesure, entre touche lusophone du club, stratégie basée sur la progression de joueurs en devenir, et affiches de Ligue des champions. Sur le plan économique, il peut se reposer sur un matelas rembourré par la qualif’ européenne et les grosses ventes du mercato, qui offre la possibilité de faire un coup en fin d’été, aka l’achat d’opportunité. L’occasion s’est présentée, Campos l’a transformée en renard du marché.
– Thiago Maia va partir- Remplacé par Renato SanchesLa réaction des supp lillois ce matin #LOSC pic.twitter.com/0y0PWb0aJe
— LOSC ✯ L’Armée Rouge (@LAR_losc) August 23, 2019
Une folie ? Si l’on considère le record du transfert du club battu deux semaines après avoir été établi par Yusuf Yazici, un peu. Mais à part ça, et au-delà de son nom, Renato Sanches sonne comme une évidence pour le LOSC. Il a le même âge que le meneur turc ou que Nicolas Pépé à son arrivée, ce qui en fait un joueur à polir plutôt qu’à former et la potentialité d’une belle plus-value à la clé. Et pour ce qui intéressera directement Christophe Galtier, son profil colle avec l’identité de jeu lilloise. À savoir un box-to-box baraqué, un casseur de lignes capable de lancer et de suivre des attaques rapides. Ajoutez-y une bonne qualité de frappe et vous obtenez quelque chose de l’ordre de l’ex-indispensable Thiago Mendes, en plus vertical. Il est évidemment trop tôt pour savoir si le Portugais connaîtra la même réussite que le Brésilien. Mais puisqu’il faut décidément s’en tenir aux faits avec le Lisboète, en voilà deux derniers : un, il est ou a été champion du Portugal, d’Europe et d’Allemagne (deux fois) et il connaît l’air de la C1 – ce qui commence à ressembler à de l’expérience, utile pour la saison lilloise à venir ; deux, dans un milieu déjà très intéressant (André, Soumaré, Xeka, Yazici), il devrait remplacer numériquement l’insipide (et ancien transfert record du club entre Marvin Martin et Yusuf Yazici) Thiago Maia. Rien que pour ça, Renato Sanches a déjà réussi son atterrissage à Lille.
Par Eric Carpentier