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Le Quevilly Rouen Métropole, fissure dans la faïence
La rumeur courait déjà depuis un moment, la nouvelle est désormais officielle : le Quevilly Rouen Métropole est né. Un rapprochement historique, à mi-chemin entre ambitions sportives et besoin croissant de subventions. Historique, mais inacceptable pour les supporters.
La petite dizaine de kilomètres séparant la grande ville de Rouen de la petite bourgade de Quevilly n’a pu empêcher le rapprochement inévitable des deux clubs : l’un, chargé d’histoire, et l’autre, dont les épopées récentes en Coupe de France ont fait vibrer toute une région. L’Union sportive quevillaise devra donc désormais avancer main dans la main avec le Football Club de Rouen. Une décision historique, tant les tentatives de rapprochement entre Diables rouges et Canaris ont été aussi nombreuses qu’infructueuses. Indispensable selon les dirigeants des deux clubs, elle n’est pas vraiment du goût des supporters, qui déplorent une perte d’identité irréversible. Fusion ? Rapprochement ? S.A.S ? Difficile de s’y retrouver dans cette bataille des mots qui brouille un peu les pistes. Pourtant, le constat est simple. Si les deux clubs continuent d’exister individuellement, une seule équipe bataillera au plus haut niveau.
Un mariage plus qu’une fusion
Côté dirigeants, cette entente est d’abord justifiée par la crise sportive qui touche le FC Rouen. Depuis la liquidation financière de juillet 2013, le club évolue en division d’honneur. Elle paraît loin, donc, la belle époque des Diables rouges, qui disputaient la Coupe des villes de foires en 1969. Sportivement bénéfique, cette entente semble financièrement indispensable, explique Pierre Goode, secrétaire général du FC Rouen. « Cela faisait environ six mois que les deux présidents se voyaient pour essayer de trouver une solution à la crise économique qui touchait les deux clubs, majoritairement due aux baisses des subventions des mairies et des collectivités. » Un pari d’ores et déjà gagnant, puisque la métropole de Rouen fournira une subvention de 200 000 euros à la nouvelle structure, qui débutera avec un budget de 1,5 million d’euros la saison prochaine.
Si cette entente marque un rapprochement historique, il ne faut surtout pas la considérer comme une fusion, rappelle monsieur Goode. « Ce n’est pas une fusion ! C’est… comment dire… le mot m’échappe. C’est une entente. Il n’y a que l’équipe de CFA de Quevilly qui change, qui aura un numéro d’affiliation à part et qui sera gérée par une S.A.S, tandis que les deux associations sportives restent en l’état et sont gérées par leurs présidents respectifs. » Dans la pratique, cela signifie que l’équipe de Quevilly qui évolue actuellement en CFA change de nom et devient le Quevilly Rouen Métropole. L’entraîneur, Emmanuel Da Costa, reste en place, tout comme les joueurs. Michel Mallet, président de l’USQ, devient également président du QRM, aidé dans sa tâche par le président du FC Rouen, Fabrice Tardy. Au-delà de cette équipe, rien ne change. « Chaque entité garde son numéro d’affiliation. Le FC Rouen garde le sien, les jeunes de l’US Quevilly, en CFA 2, gardent le leur également. » Au final, cette entente peut être considérée comme un mariage. L’équipe première de Quevilly appose au sien le nom de Rouen, mais les deux individus composant le nouveau couple restent deux individus distincts.
« Jamais on ne pourra acheter notre passion »
Des deux côtés, les avis sont partagés. Pourtant, tout a été fait pour ne pas froisser la sensibilité des groupes de supporters attachés aux valeurs des clubs. À domicile, l’équipe jouera avec le rouge de Rouen, mais à l’extérieur, elle arborera le jaune de Quevilly. Pourtant, la grogne subsiste. « Les dirigeants de cette nouvelle entité essayent de rameuter les supporters des deux camps en disant qu’on pourra toujours crier « Allez les Rouges » à Diochon, mais le QRM ne remplacera jamais la passion que l’on a tous au fond du cœur pour le FC Rouen » explique Clément Foucard, trésorier de la Fédération des Culs rouges et supporters des Diables rouges depuis 1987. La confusion entre fusion et rapprochement n’a, selon Clément, qu’un seul but : dissiper les doutes quant à l’absorption inévitable des deux clubs dans cette entité nouvelle. « Le rapprochement est selon moi une première étape avec l’absorption pure et simple du FC Rouen par la nouvelle entité. Celle-ci sera subventionnée en grande partie par les collectivités qui délaisseront petit à petit les deux associations pour au final les englober dans le QRM » explique-t-il. « Le FC Rouen reste un club à part entière pour la saison prochaine, que ce soit en DH ou en CFA 2 en cas de montée en fin de saison. Malgré tout, la situation du club sera l’an prochain très précaire vu que la nouvelle entité prend possession du Stade Robert Diochon (stade historique du FC Rouen), s’approprie les couleurs ainsi que le logo du club. »
La décision s’est donc prise sans l’aval des Culs rouges, qui refusent catégoriquement d’être associés au QRM. « J’ai connu tous les états avec mon club : des joies, des moments qui resteront gravés à jamais dans ma mémoire, des buts, des instants de tribune, des déplacements en car ou en voiture avec les copains et aussi des galères avec des descentes, des dépôts de bilan, jusqu’à ce terrible jour d’avril où les Jaunes ont pris possession de l’antre rouge avec la complicité des politiques et de certains dirigeants » explique Clément. « Jamais, je dis bien jamais, on ne pourra acheter notre passion. Alors qu’ils fassent le QRM s’ils veulent, mais qu’ils laissent vivre le FC Rouen hors de cette mascarade. Les Diables rouges à jamais dans mon cœur. »
Par Gabriel Cnudde