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Le Quartier Libre : « J’attends le Italie-France dans lequel Balotelli va mettre un missile »

Matthieu Rostac
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En matière de musique, Le Quartier se divise en deux : Jiken et Gianni aka Reziztanza. Mais quand il s'agit de parler foot, seul Gianni sort le bleu de chauffe. « Cible mouvante de l'AS Drancy » à ses heures perdues, le MC est avant tout un immense fan de la Squadra Azzurra et de la Juventus de Turin. Ou d'Alessandro Del Piero, c'est au choix. Une histoire d'amour franco-italienne plus italienne que française et qui, étonnamment, commence mal et finit bien.

Ton kiff, c’est le foot italien, c’est ça ?

Oui. Je suis supporter de la Squadra Azzurra et en club, je suis fan de la Juventus, et ce, depuis ma plus tendresse adolescence. Comme tout bon fan de foot, c’est mon père qui m’a converti dès mes douze ans. Mon père est d’origine italienne. Je viens de Montreuil et pour les basses classes comme la mienne, ce sport est un élément fondateur. Et c’est une preuve d’amour entre mon père et moi. C’est pour ça que ça ne s’explique pas. Avant, tu faisais le même boulot que ton père, tu vivais dans la même ville et maintenant, il y a une dissémination culturelle. Mais le foot reste une valeur-refuge. Bref, ça a commencé par le Coupe du monde 1994. Donc par une énorme souffrance, un traumatisme. Immédiatement, j’ai été balancé dans ce qui représente le supporter : j’ai vu Roberto louper son péno. Je venais de le voir terrasser le Nigeria à lui tout seul et là, je le vois s’effondrer. Je comprends pas. J’ai pleuré. Tu vois ton idole s’échouer… On l’a jamais oublié. Lui-même dit qu’il n’a jamais oublié. T’imagines ? C’est affreux ! Le mec, il achète sa baguette et on vient le voir pour ça. « Ouiii, je saiiis, j’étais blessé à la cuisse… » Et le fait est qu’à l’heure qu’il est, on aurait dû prendre cette Coupe du monde et on devrait avoir cinq étoiles. Pour se la raconter autant que le Brésil.

Le Brésil méritait pas de gagner en 94 ?

Même la Bulgarie méritait de gagner en 1994. Rien que pour le côté funky, destroy et rock’n’roll de l’équipe. Mais pas le Brésil, quoi ! Tout le temps le Brésil… C’est désespérant. En plus, c’est chez eux cette année ! Je les déteste d’avance. Être supporter de la Squadra Azzurra, c’est avant tout un défi face au monstre du football mondial qu’est le Brésil. C’est un combat. Depuis les années 2000, notre adversaire est devenu la France, on s’est beaucoup tapés avec eux. Mais bon, 1-1, une Coupe du monde partout et je trouve ça normal. Bon, maintenant il y a l’Es… Bon, ne mettons pas le mot Espagne dans cette interview. Je trouve ça honteux de tout truster, de tout gagner. Vous sortez d’où les mecs ?! Beaucoup de ressentiment pour l’Espagne, donc. Notamment en 2012, où j’ai bien morflé, avec Thiago Motta qui se blesse à la cuisse – encore une fois – en rentrant. On l’a tous détesté à ce moment-là. On s’est dit qu’il avait blousé l’entraîneur parce qu’il rentre, il se claque. Ça veut dire qu’il s’est mal échauffé, qu’il a pas été pro. Il aurait du fermer sa gueule et ne pas rentrer. Et il est rentré. Ceci dit, ce qui m’a fait plaisir avec cet Euro 2012, c’est les liens resserrés entre ces deux équipes fratricides et en même temps très sœurs que sont la France et l’Italie. Plein d’amis supporters de la France m’ont alors avoué qu’ils aimaient l’équipe d’Italie.

Quels autres événements t’ont marqué ?

J’ai fait des trucs à la limite de la rationalité, parfois. En 2002, je me souviens de ce vol contre la Corée du Sud. Je tiens à rajouter : encore une Coupe du monde volée pour nous ! Donc on en est à six étoiles et je pense qu’à la fin de l’interview, en toute logique, l’Italie aurait dû remporter toutes les Coupes du Monde ! Non, je rigole, en 1986, l’Argentine méritait ! (rires) Il y a eu 2000, également. Une grande source de quolibets pour nous, supporters italiens, avec la fameuse blague « Comment reboucher une bouteille de champagne ? » Et surtout, en 2008, énième affrontement Italie-France. On était tous les deux grave dans le caca et je le répète une nouvelle fois, l’Italie et la France sont des nations sœurs. Très inégales, mais en même temps, capables de répondre présentes dans les grands événements en même temps. Par exemple, elles se plantent en 2010 alors qu’elles sont en finale en 2006. Le soir de la finale, j’étais chez mon père à Montreuil et je gueule « Campioni del mondo ! » par la fenêtre et un mec me hurle « Ta gueule, pédé ! » Je commence à descendre dans les rues de Paris avec le maillot de la Squadra sur le dos. Ma meuf me disait de rentrer à la maison, elle avait trop peur. J’allais de pizzeria en pizzeria pour me réfugier et à un moment, j’entre dans une située dans le IXe arrondissement et les mecs me regardent : « On est français… » Comme tout supporter, j’ai une théorie sur l’événement Zidane-Materazzi. Déjà, c’est un sujet à prendre avec des pincettes. Je ne me ferai l’avocat ni de l’un ni de l’autre. Les deux sont des cons. Évidemment, ce serait hypocrite de ma part de dire que quand j’ai vu Zidane prendre un rouge, je n’ai pas eu un sentiment de satisfaction. Ce qui me déçoit, c’est qu’on considère qu’on a gagné parce que Zidane est sorti. Et quand tout le monde s’est emballé, je rappelle juste que Bixente Lizarazu a rappelé que, du premier match quand t’es ado jusqu’au dernier match de ta vie, ton but, c’est de faire craquer l’autre. Alors oui, il est évident que Materazzi est fielleux. Tout comme Zidane. C’est un homme que je classe au Panthéon des meilleurs joueurs avec Pelé et Baggio, mais c’est aussi un mec connu pour prendre des rouges sur des coups d’humeur. Materazzi, c’est la crapule, le défenseur de l’Inter de base. Et Zidane, c’est le mec calme, mais quand il pète un plomb… Donc Materazzi a insulté sa sœur et il savait qu’il ne fallait pas faire ça. Materazzi, il est venu le prendre, son coup de boule. Et quand mes amis supporters de la France me disent que ce qu’a fait Materazzi est innommable, je leur rappelle qu’un coup de boule, c’est vrai que c’est beaucoup mieux, hein !

Du coup, t’as pas terminé ton histoire de 2008.

Oui ! En 2008, j’en ai eu marre de regarder les Italie-France à la télévision, donc j’ai décidé d’aller à Rome avec un pote, Raffaelo D’Errico. Sur un coup de tête total, sans papiers, etc. On a déboulé au moment de Roumanie-Italie et on venait de se faire massacrer par la Hollande. On se disait que c’était bon, « jouez, jouez les Roumains » . Au final, 1-1 avec un penalty arrêté par Buffon à la 89e. On se retrouve à errer dans les rues de Rome à pleurer sur la qualité de jeu italienne. Bref, on se retrouve pour le match Italie-France dans un bar romain blindé à boire du Caffè Borghetti, une liqueur de café. On commence à se tuer avec cette boisson et on s’est dit que c’était chaud parce qu’on allait peut-être se retrouver à nouveau dans les rues à errer à moitié-bourrés, éliminés au premier tour. Finalement, le match se passe bien, même si je regrette qu’il n’y ait que des buts sur coups de pied arrêtés, notamment le penalty sur Luca Toni. Toni n’est que l’ersatz malsain de Christian Vieri. On gagne 2-0. Mais bon, j’attends toujours le Italie-France de la rédemption dans lequel Balotelli va mettre un missile de trente mètres et Rossi montrer tout son talent, si jamais il peut jouer. Si on n’a pas Giuseppe à la Coupe du monde, je suis en bad.

D’ailleurs, ton prono ?

En tant que supporter de l’Italie, je ne peux que les voir finir vainqueurs. Tu veux que je te donne une analyse objective ? Déjà, il y a l’Espagne qui gagne tout. Le Brésil, qui est évidemment surchaud. Ça m’arrache la gueule de le dire, mais ils sont favoris. L’Allemagne, oui, aussi. À part si on les croise et qu’on les bat, comme depuis quarante ans. L’Italie, on sait que c’est quand ils sont au fond du trou qu’ils font quelque chose. On l’a vu en 1982 avec Paolo Rossi qui sort de taule et qui devient meilleur buteur, ou en 2006 avec le Calciopoli. Et là, pas de scandale, pas de mec en taule… Mais un groupe assez furieux avec l’Angleterre – qui n’est plus qu’un nom –, mais surtout l’Uruguay, avec Suárez et d’autres gars, qui vont nous faire mal à l’anus. Moins que Jordi Alba, mais quand même ! Je l’admets : on n’est pas favoris. Mais on a l’équipe la plus rock’n’roll. On a un gardien qui est une légende, un paradigme. On a une défense, bon, quand t’as eu des Maldini, des Cannavaro, des Baresi… Chiellini, il a une sale gueule.

Baresi n’était pas un Apollon, hein !

Ouais, vrai. D’ailleurs, il y a un mec qui sort en ce moment et qui ressemble un peu à Baresi : Paletta. La trentaine, calvitie naissante. Il a joué le Italie-Espagne et il a sauvé les meubles. Il a pris son ticket pour le Mondial en un match ! Bon après, on a Bonucci qui est nickel pendant 89 minutes et qui, à la fin, décide de faire une tête sur l’attaquant adverse. Bonucciade ! On a évidemment un superbe milieu, avec Andrea. Tous ceux qui détestent l’Italie aiment Andrea Pirlo, on le remercie pour ça. Le mec NE COURT PAS. La classe incarnée. Ça me rappelle cette anecdote de l’Euro 2012, quand Pirlo tire un penalty contre l’Angleterre. Le journaliste lui demande : « Pourquoi vous avez fait une cuccare à Joe Hart ? » Et Pirlo, dans sa magnificence habituelle, qui répond : « Je le trouvais un peu excité, j’ai voulu le calmer. » Le mec se sent humilié et voilà. Ensuite, j’espère voir Verratti à côté, mais bon, ils ont un peu le même profil. J’aurais bien vu Diamanti, mais j’y crois pas vu qu’il est parti faire du fric en Chine. Il aurait été parfait, l’ancien toxico. Parce qu’il est grillé, hein, avec sa petite rasta et son « absence pour problème pulmonaire » du foot… À mon avis, ça devait être un pote de Miccoli et ils devaient traîner dans le Sud du Salento et fumer des gros buzz dans les festivals reggae. C’est un shlag. Ça pourrait être ton pote DJ qui mixe soit du hardcore soit du dub, qui joue à FIFA avec des bangs de super skunk. Et puis bon, Mario, quoi ! Mais quel Mario on aura ? Le rageux invisible du Milan AC moribond ? Ou le Mario génial de l’Euro 2012 qui crucifie l’Allemagne d’une frappe limpide ? Mais pas Osvaldo. Lui, je l’aime pas, il me vénèr ! Faut savoir qu’en Italie, les Oriundi sont italiens quand ils jouent bien. Camoranesi : Italien. Sivori : Italien. Osvaldo : pas Italien. (rires) On a quand même une équipe assez marrante.

Passons à la Juve.

Alors… Tout a commencé en 1996 ou 1997. Je regardais un bon L’Équipe du dimanche avec mon père et j’attendais religieusement 23h35 qu’arrive le moment de la Serie A. Qui, à l’époque, passait plus tôt parce que le championnat n’était pas en déclin, que tout le monde ne se branlait pas sur les Clásicos et sur Manchester ou Dortmund. Un Inter-Milan AC était considéré comme un match européen important et pas un truc de seconde zone dégueulasse. Maintenant, tu regardes Ciro Immobile planter trois buts dans un Torino-Livorno, c’est limite plus intéressant. Ou alors, si tu veux voir les bons joueurs italiens, tu regardes un match de Paris ! (rires) Bref, on est devant L’Équipe du dimanche et mon père me dit : « Regarde ce joueur, c’est l’avenir de l’équipe d’Italie. » Je vois Alessandro Del Piero. Mon amour de jeunesse, quoi. J’ai même monté un groupe Facebook qui s’appelle : « Rendez le Ballon d’or à Alessandro Del Piero. » On parle du foot comme d’un sport romantique, avec cet aspect ontologique de la vie, d’affronter les hauts et les bas. Et Alessandro, c’est ça : il a tout gagné, mais il a aussi tout perdu. Il a gagné toutes les épreuves possibles – sauf l’Euro –, mais il en a joué beaucoup d’autres et les a perdues. Il a été honni. Si tu dois résumer Del Piero, c’est le mec qui dribble magnifiquement trois gars, mais qui met la balle sur le poteau. Et l’un de mes plus beaux souvenirs de foot, avec ce fameux voyage en 2008 en Italie, c’est lorsque Del Piero plante en demi-finale du Mondial 2006 contre l’Allemagne en prolongation. J’ai vu la revanche d’Alessandro sur le monde, qui tue une énorme équipe avec un superbe geste technique. Soulagement pour moi. J’ai pleuré toutes les larmes de mon corps. Mais de joie, cette fois-ci. Donc supporter de la Juve par ascendance, mais bon, je suis beaucoup moins maintenant. Déjà, on est sortis de cette phase de mercato pété avec Diego, Felipe Melo, etc. Je me lamentais en lisant La Gazzetta. Encore que, Llorente étant espagnol, je ne peux l’adouber. Quant à Tévez, il a repris le numéro d’Alessandro. Ceci dit, Alessandro lui-même – le joueur bienveillant par essence, à l’inverse d’un Francesco imbuvable – a dit : « Beaucoup critiquent le fait que Tévez reprenne mon numéro. Quand j’étais enfant, mon rêve était d’être le n°10 de la Juve et je pense qu’il faut laisser ce rêve à tous les enfants du monde. » Le mec a la classe. Bâché par ma propre idole, quoi ! (rires) Pour revenir à la Juve, je regarde les matchs, mais avec douze points d’avance, c’est pas très fun. En revanche, il y a la Ligue des champions. Mais se faire sortir par Galatasaray… Qu’est-ce qui manque à la Juve pour revenir en Champions ? Un peu d’argent, tout simplement. Lichsteiner est un bon gars, j’ai rien à lui dire. Ogbonna, on peut rien lui reprocher. Pareil pour Marchisio ou Giovinco. Mais si jamais un Indonésien ou un Moldave rachète la Juve, il pourra se payer Marco Verratti, qui est un fou de la Juve. Il nous faut un Mario calmé. Faudra peut-être l’envoyer en Écosse pendant un an avant, histoire de se faire taper par des mecs plus costauds que lui. Et faudra Giuseppe.

Qu’il faudra envoyer dans une clinique ?

À vie, ouais. Faudrait le tremper dans le formol !

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