- Ligue 1 – PSG – Billet d'humeur de Vikash Dhorasoo
Le Président, vraiment ?
Le prince a voulu José Mourinho, Guus Hiddink, Frank Rijkaard, Michael Laudrup ou Fabio Capello. Finalement, début août, c'est Laurent Blanc qui mâchouillera des touillettes sur le banc du Parc des Princes. L'occasion pour le Président de changer de statut, ou de vite redevenir un entraîneur lambda…
Voilà, Laurent Blanc sera le nouveau coach du PSG. Le PSG n’est pas encore le Real Madrid et n’a donc pas pu retenir Carlo Ancelotti. Bienvenue au PSG, où la crise de novembre peut aussi avoir lieu en février, comme en juin. En fait, c’est tout le temps. La saison prochaine, Paris n’aura donc pas une star internationale assise sur son banc, un gars au palmarès bien « fat » , un gars qu’Ibrahimović ou Thiago Silva respecteraient. À la place, le PSG se contentera de Laurent Blanc, un chômeur français. Choix par défaut ? Évidemment non ! Laurent Blanc était quand même le premier Français sur la longue liste des entraîneurs désirés par le prince.
Ce n’est pas très joyeux tout ça. Pas très heureux, non plus. Limite un peu ridicule, même. Il n’y a pas si longtemps, Laurent Blanc faisait l’unanimité. Champion de France avec Bordeaux en 2009, il enchaîne avec une saison moyenne, avant de devenir sélectionneur des Bleus. Tous en chœur ! « Il est l’homme de la situation. Il a été un grand joueur. Il est champion du monde 98 et champion de France comme coach avec Bordeaux. Il va nous faire oublier Raymond Domenech et redorer l’image de l’équipe de France. » Etc. La France du football retrouvait le sourire perdu depuis l’épisode de Knysna et les erreurs de communication du Ray-Strange. Avec lui aux commandes, Ribéry et ses potes devaient se tenir à carreau. Parce qu’à Clairefontaine, plus qu’ailleurs, on respecte « le Président » . Oui mais entraîner, c’est dur. L’Euro 2012 s’est très mal passé et sa crédibilité en a pris un coup. Le Président s’est fait laminer par Nasri, Benzema et les autres. Pas mieux que notre Raymundo, en somme. Pire, l’épisode des quotas a bien failli ternir l’image lisse du Gardois. On l’a même soupçonné d’être raciste. « Impossible » , a répondu sa défense. Il a été un trop grand joueur pour être raciste » .
On n’entraîne pas Paris comme Bordeaux ou les Bleus
Logiquement, depuis, l’enthousiasme est retombé autour du Lolo et l’annonce de son arrivée à la tête du PSG ne fait pas vraiment rêver. Blanc n’est pas glamour, a joué à l’OM et parle avec l’accent du Sud. Pourtant, c’est lui qui a été choisi. Coach, c’est un métier avant tout. Et Lolo voulait retravailler. On demande aux joueurs de s’attacher au maillot, aux couleurs, d’aimer leur club, d’avoir de bonnes stats… Mais qu’est-ce qu’on demande au coach ? Et puis d’abord, c’est quoi être un bon coach ? Entraîner le PSG version qatarie, ce n’est pas coacher Bordeaux. À Bordeaux, peu de pression médiatique, pas de pression populaire, pas d’énorme pression des dirigeants, et pourtant, Blanc a laissé échapper son vestiaire. On n’entraîne pas à Lorient comme on entraîne à l’OM. On n’entraîne pas non plus le PSG comme on entraîne une sélection nationale…
Les doutes concernant Laurent Blanc existent. Son charisme légendaire en a pris un coup depuis son passage à la tête de l’EdF. Est-il capable d’entraîner le PSG ? En a-t-il la carrure ? Est-il capable de gérer les égos du vestiaire, ou plutôt l’égo de Zlatan puisqu’il n’y a qu’un seul égo au Camp des Loges ? Thiago Silva acceptera-t-il les conseils d’un ancien grand défenseur central vu que lui serait, d’après ce que j’entends, le meilleur du monde ? Sera-t-il capable, à l’image d’un Mourinho, de gérer les remplaçants – chose pour laquelle il est, en réalité, payé ? Va-t-il être capable de gérer la pression populaire et médiatique du seul grand club de la capitale ? Résistera-t-il au stress imposé par sa hiérarchie ? Laurent a été un grand joueur et pour certains, ça suffit à répondre à ces questions. Mais l’histoire montre que l’on peut être un bon entraîneur, sans avoir été un grand joueur. Et inversement.
Dans la peau du Mister
Les grands coachs gèrent la pression, savent communiquer. Ils savent parler aux remplaçants. Les grands coachs sont calmes, ne cèdent pas à la panique en cas de défaite. Un grand coach, en somme, c’est un gars qui sait fédérer autour du conflit ou de la complicité. Il s’intéresse à ses joueurs et les protège au niveau médiatique. Le prince a viré Kombouaré, sous entendant que celui-ci n’avait pas la carrure mondiale, celle qui rend un coach incontestable, fort dans le vestiaire et capable d’attirer les plus grands joueurs. Voilà le topo : Paris vire un coach pour prendre un Mister avant de reprendre un coach. Hmmm, où est la logique ? La logique, c’est que, pour le PSG, gagner c’est un minimum presque normal. En achetant Paris, les Qataris sont venus chercher bien plus que la victoire. Le mercato est ouvert et la chasse à la vedette est lancée. On va voir combien le PSG va essuyer de refus avant d’attraper la perle rare et redonner la confiance aux supporters. On critique et on attend beaucoup des meilleurs, des grands. Laurent Blanc fait, semble-t-il, (encore) partie de ceux-ci. Espérons pour lui qu’en fin de saison, coach Blanc sera devenu Mister Blanc.
Par Vikash Dhorasoo