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Le pari osé de Benfica
Coup de théâtre à Lisbonne. Alors que Jorge Jesus s'apprête à donner la liste des joueurs qui l'accompagneront à Évian pour le premier stage de la saison, l'entraîneur portugais annonce ne plus compter sur Witsel et Gaitán. Le président du SLB a décidé de vendre deux de ses meilleurs éléments pour soulager la masse salariale du club alors qu'il vient de se payer le jeune Ola John pour 9 millions d'euros...
Fin avril 2012 : les supporters benfiquistas craquent. Alors que leurs protégés possédaient cinq points d’avance sur le FC Porto un mois et demi auparavant, ils laissent le titre s’échapper au profit de l’éternel rival. Des messages de protestation, voire de haine, visent Jorge Jesus et Luis Filipe Vieira, président de Benfica. L’orage durera un mois. 30 jours durant lesquels la presse portugaise aura accouché de tous les scénarios possibles : démission du messie en partance pour Porto, démission de Vieira ou encore complots divers…
Au final, le sacro-saint tandem est toujours en place du côté de la Luz. Mais, à l’aube de la nouvelle saison qui débutera par un stage à Évian, le vaisseau SLB n’a toujours pas quitté la zone de turbulences dans laquelle il est embourbé depuis trois mois maintenant. Et comme si cela ne suffisait pas, Vieira, par la voix du saint Jesus, a fait savoir à tout le monde qu’il comptait vendre Nico Gaitán et Axel Witsel cet été, pour stabiliser la masse salariale des Aguias. Du coup, l’Argentin et le Belge ne boiront pas l’eau à la source avec leurs futurs ex-potes.
Des solutions au milieu, mais…
Aussi bien économiquement que sportivement parlant, le choix de la direction de l’écurie lisboète est largement discutable. En effet, en s’abstenant d’acheter le certes talentueux Ola John (Twente) pour la somme de 9 millions d’euros, Benfica aurait largement eu de quoi payer un an de salaire à l’un des deux intéressés, tout en se séparant du second, histoire de limiter la casse. Car le départ de deux des mastodontes de l’organigramme de Jorge Jesus est un gros coup dur pour ce dernier, ne serait-ce que parce qu’il va devoir s’adapter aux nouveaux venants et partants pour modeler un onze inédit. D’autant plus que Jesus est un adepte du jeu en toque basé sur les automatismes, donc sur une rigueur tactique minutieuse. Le genre de trucs pénibles à inculquer aux joueurs.
Deuxième problème pour l’entraîneur portugais : un joueur de la trempe d’Axel Witsel ne se remplace pas. Ce n’est pas pour rien que « les Manchesters » ou le Real Madrid sont à ses trousses. Ok, il y a le vieillissant magicien Pablo Aimar, son toucher de balle divin et son intelligence supérieure. Ou alors Bruno César, bourrin, mais pas maladroit du tout, sans oublier Nolito, la « touche Barça » des « encarnados » . Mais le Belge sait tout faire aussi bien que ces trois-là, voire mieux. Sa vitesse, sa technique, sa puissance et son volume de jeu font de lui un joueur extrêmement complet. Capable d’évoluer en meneur comme sur les côtés, sa flexibilité est une aubaine pour Jesus en cas de blessure d’un autre de ses hommes ou de reconduction tactique exceptionnelle. Bref, le jeune Ola John va devoir cravacher pour combler le vide laissé par son aîné.
Gaitán out, Salvio in
Le cas Gaitán est sensiblement différent. En deux saisons, il a envoyé le fantôme d’Ángel Di María aux oubliettes grâce, entre autres, à un premier exercice très concluant. L’an passé, il s’est montré un peu plus irrégulier. On peut même dire que l’Argentin choisissait ses matchs en 2011-2012, comme un cancre. Plus il y a de pression, plus c’est fun. C’est pourquoi il brille avant tout lors des grands événements, de préférence en Ligue des champions, comme en témoigne l’amour de « golaço » qu’il inscrit face au Trabzonspor* – sur une passe de Witsel, évidemment. Ou comment draguer Sir Alex Ferguson sans trop se fouler les trois quarts du temps. Le manager des Red Devils serait carrément disposé à donner Anderson et quelques millions d’euros en échange de l’Argentin de poche.
Si la transaction voit le jour, Jorge Jesus aura en sa possession un joueur capable de remplacer Witsel et qui, en plus, vient du FC Porto à la base. Un sacré coup de poker, car si Luis Filipe Vieira réussit à boucler le transfert de Salvio, prêté par l’Atlético aux Lisboètes en 2010-2011, il aura réussi à faire des économies sans toucher au rendement sportif de Benfica. En effet, l’actuel Colchonero ne coûterait que 5 millions d’euros. Une merveilleuse affaire, si l’Argentin de 21 ans se montre aussi bon qu’il y a deux ans dans la capitale portugaise. Si le plan capote, en revanche, Jorge Jesus devra se démerder avec ce qu’il a, c’est-à-dire Aimar, Bruno César, Ola John, Nolito, Matić, Javi García ou encore Melgarejo. Ok, sans Witsel et Gaitán, ça jouera forcément un peu moins bien, mais les pensionnaires de l’Estádio da Luz n’ont pas encore de quoi chialer.
*But de Gaitán vs Trabzonspor
William Pereira