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Le Mexique face au fantôme de Robben
Sensation au Brésil pour la qualité de son jeu, mais éliminé comme d'habitude en huitièmes, le Mexique d'El Piojo Herrera et de Memo Ochoa a broyé du noir tout l'été, mais n'a pas renoncé à son 3-5-2 ultra-dynamique, malgré l'éclipse du commandant Márquez.
« No era penal. » Le Mexique s’est complu dans la posture de la victime pendant tout l’été. À ressasser ce maudit penalty sifflé dans les arrêts de jeu de son sixième huitième de finale de rang en Coupe du monde. Sa sixième élimination aussi. Robben en a rajouté, c’est un fait, mais Márquez ne l’a-t-il pas aussi légèrement touché ? Quoi qu’il en soit, pour le Mexique, tout du moins pour la grande majorité de ses supporters, « il n’y avait pas penalty » . Alors, plutôt que de s’en prendre au manque de caractère d’El Tri, qui a abandonné le ballon aux Pays-Bas après avoir ouvert le score, les Mexicains ont choisi Arjen Robben, un homme que l’on aime décidément détester, comme un bouc émissaire. Du Hollandais supersonique, on a même fait des piñatas, ces mannequins couverts de papier mâché qu’aiment détruire les enfants mexicains à coups de bâtons lors de leurs fêtes d’anniversaire.
Pénalty ou pas, il faut bien repartir. Et le Mexique est reparti sur le rythme enlevé qui a caractérisé ses prestations brésiliennes. L’adversaire incitait, il est vrai, à presser à tout va, et à se livrer à des échanges passionnés : le Chili de Sampaoli. Le 6 septembre à Denver, les deux équipes latino-américaines ont envoyé du jeu, mais ne sont pas parvenues à faire trembler les filets. Chili-Mexique fut un bon 0-0, mais a privé les spectateurs d’un grand plaisir : pas seulement de fêter un but, mais surtout de voir Miguel « El Piojo » Herrera, la vraie star mexicaine du Mondial avec Memo Ochoa, régaler l’une de ses célébrations dantesques. « Quand je célèbre un but, je ressens quelque chose d’électrique qui me parcourt tout le corps » a récemment confié le sélectionneur au site de la FIFA. La photo de l’une de ses transformations a été élue par The Guardian comme la meilleure du Mondial. Moins anecdotique, et plus vital pour El Tri, l’explosif Herrera a été reconduit pour quatre ans suite à la belle épopée brésilienne du Mexique. L’ex-entraîneur de l’América n’a certes pas fait mieux que ses prédécesseurs en échouant en huitièmes, mais il ne faut pas oublier qu’El Tri revenait de très loin, d’un barrage face à la Nouvelle-Zélande, et d’une campagne éliminatoire calamiteuse.
Cette fois, El Piojo ne disposera pas d’un peu plus de six mois pour préparer un Mondial, mais de quatre ans pour travailler, tout du moins, si les résultats suivent. Avant la Russie, les échéances ne manqueront pas pour juger la forme prise par le projet Piojo : Gold Cup 2015, vitale pour arracher un billet pour la Coupe des confédérations 2017, Copa América 2015 au Chili, Copa América du centenaire aux États-Unis en 2016, et peut-être, donc, la Coupe des confédérations. Ouf ! Pour tenter de bien figurer face à l’ensemble des Amériques, le Mexique devra désormais faire sans Carlos Salcido, qui a décidé de prendre sa retraite internationale, à 34 ans. Rayon ancêtres, Rafa Márquez, lui, n’a pas encore dit stop, mais a demandé à Miguel Herrera de faire une pause. Il n’y aurait toutefois rien d’étonnant à voir la fraîche recrue du Hellas Vérone lors de la Copa América 2015, compétition qui le motive. Une compétition où le Mexique ne pourra envoyer sa meilleure équipe, réservée pour la Gold Cup, compétition beaucoup moins prestigieuse, mais organisée par la confédération à laquelle appartient El Tri. Reste qu’El Piojo compte bien former un ensemble compétitif pour se mesurer aux grands d’Amérique du Sud.
Sans ses meilleurs vieux, le Mexique compte désormais sur une colonne vertébrale constituée par Héctor Moreno, actuellement blessé, Héctor Herrera, devenu le maître du jeu mexicain, et sans doute sur Chicharito, qui a inscrit jeudi face au Honduras (2-0) son 37e but en 67 sélections. Le méconnu Oribe Peralta (América), titulaire lors du Mondial, et l’inconstant Giovani dos Santos ont du souci à se faire, même si de trop longues minutes passées sur le banc merengue pourraient coûter cher à l’ex-super sub de Manchester United. Dans ces circonstances, Raúl Jiménez pourrait, lui aussi, avoir sa carte à jouer, mais comme Chicharito, son statut de remplaçant à l’Atlético Madrid pourrait lui être préjudiciable. Sur le plan tactique, rien n’a changé : El Piojo mise toujours et encore sur son cher 3-5-2 à haute consommation d’énergie, avec ses deux ex-protégés de l’América, Layún et Aguilar, en grands animateurs de couloirs. Dans les buts, Memo Ochoa semble avoir cimenté son statut de titulaire lors du Mondial, au point que ses ennuis à Málaga, où il cire le banc, n’ont pas conduit le sélectionneur a changé ses plans. Ce dimanche, El Tri va rencontrer le Panama à Querétaro, la ville rendue célèbre par Ronaldinho. Il s’agit de l’un de ces matchs qualifiés au Mexique de « molero » , référence aux matchs amicaux joués dans les villages au terme desquels on sert un riz à la sauce « mole » . L’échéance suivante n’aura rien d’un match « molero » . Le 12 novembre, El Tri se trouvera en Europe, pour affronter les Pays-bas de son grand ami, Arjen Robben.
Par Thomas Goubin, au Mexique