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Le Maher, qu’on voit danser…
« Le long des golfes clairs... » Si Adam Maher a « des reflets d'argent » tous les week-ends avec la liquette du PSV sur le dos, sa carrière à Eindhoven se compose plus de « reflets changeants » jusqu'ici. L'histoire d'un joueur qui a eu du mal à grandir et qui est comme le Picon : jamais aussi bon que quand on lui met la pression.
18 juin 2014. Porto Alegre, Estádio Beira-Rio. 68e minute de jeu du match Australie – Pays-Bas. Les deux formations sont au coude-à-coude lorsque Memphis Depay, du haut de ses 20 ans, décoche une énorme frappe de l’extérieur. Du pied comme de la surface. Mathew Ryan, le gardien aussie, ne peut rien faire. Les Pays-Bas remportent un match qui avait tout du guet-apens et la hype est sur la route de Memphis. Depuis la reprise de l’Eredivisie, l’ailier gauche poursuit son petit bonhomme de chemin en multipliant les buts et les allers et retours dans son couloir au Philips Stadion. Pour le moment, dix pions plantés pour autant de matchs joués. L’année dernière, c’était un tout autre tube de l’été qui se jouait du côté d’Eindhoven : celui d’Adam Maher. Lorsqu’il signe au PSV pour la coquette somme de 6,5 millions d’euros en provenance de l’AZ Alkmaar, le meneur de jeu débarque auréolé d’un statut de hot prospect, confirmé par une poignée de sélections en équipe nationale acquises sous l’égide du prof Van Gaal. Maher doit prendre à son compte le jeu des Boeren. Sauf que le natif d’Ait Izzou au Maroc n’a que vingt ans et, sur le papier, deux petites saisons d’Eredivisie dans les jambes.
Fils déraciné et retweet maladroit
Surtout, lorsqu’il débarque dans le Brabant-Nord, Maher est hors de ses bases. Enfant de Diemen, une banlieue populaire d’Amsterdam, Adam ne s’est jamais trop éloigné de la capitale. Il a fait ses gammes au SV Diemen puis à l’AVV Zeeburgia, un club amateur d’Amsterdam, avant de s’envoler à onze ans pour Alkmaar, une ville située à cinquante bornes à peine de Diemen, engloutis en quarante minutes. Jusqu’en 2013, son père Ider fait la navette entre l’AFAS Stadion et le foyer familial tous les jours de façon à ne pas bousculer les habitudes d’un Adam en pleine progression et sur lequel des club comme l’OL, l’Inter et le Barça se positionnent alors qu’il n’a que seize ans. À dire vrai, Ider et Latifa Maher font office d’agents de joueur, de coachs personnels et d’inconditionnels supporters pour le joueur. De parents, quoi. En 2013, Ider confiait à la presse néerlandaise que « si tout se passait bien, [la famille] prévoyait de rester ensemble pour toujours. Diemen est notre base, quoi qu’il arrive. Si Adam arrête, il reviendra à Diemen. Et nous aussi. » Plus balises que boulets, les parents Maher permettent au fiston de garder la tête hors de l’eau. À l’issue de la saison 2012-13, Maher remporte le trophée du meilleur espoir d’Eredivisie, bien mérité après ses dix buts et dix passes décisives, et force le club de l’AZ à le laisser partir au PSV. Problème : Diemen, c’est loin d’Eindhoven. Assez, en tout cas, pour perturber le jeune Adam. Malgré des débuts encourageants pendant la saison 2013-14, le meneur de jeu est repositionné en milieu relayeur par le nouveau coach Phillip Cocu, notamment parce qu’un certain Georginio Wijnaldum dirige déjà le jeu. Or, Maher goûte peu son nouveau rôle défensif et finit par perdre sa place dans le onze titulaire du PSV au profit du suédois Oscar Hiljemark. Pis, l’ancienne nouvelle coqueluche apparaît plus souvent dans les colonnes people que sur le terrain du Philips Stadion. Le 27 octobre 2013, Maher retweete un supporter du PSV agacé de voir que Toivonen est titulaire à sa place, avant de se raviser. Trop tard, le mal est fait. Deux mois plus tard, le milieu néerlandais croque la pomme, pris en photo dans une voiture avec une fille qui n’est vraisemblablement pas sa petite amie… À l’issue de la saison, Depay et Wijnaldum s’envolent pour le Brésil. Maher, lui, suivra le Mondial en famille depuis Diemen, voyant Jordy Clasie du Feyenoord évoluer à sa place en back up de Sneijder.
« Je sens définitivement le souffle chaud de mes coéquipiers sur ma nuque »
De cette année noire (durant laquelle il joua néanmoins 37 matchs), Maher tirera un enseignement : il doit faire avec la concurrence. Mieux, cette dernière va devenir un véritable moteur pour le joueur. Lors d’une interview récemment accordée à Metro, le Néerlando-Marocain concédait que « la compétition au milieu est beaucoup plus forte que l’année dernière. Mais je pense que ça nous fait tous progresser. Je sens définitivement le souffle chaud de mes coéquipiers sur ma nuque. Pas de répit pour moi. Je dois rester fort et continuer comme ça. » Dans un milieu pléthorique composé de Stijn Schaars, Oscar Hiljemark, Andrès Guardado venu en prêt de Valence, Marcel Reitzmaier revenu du SC Cambuur et du jeune Jorrit Hendrix, promu en début de saison, Phillip Cocu a préféré redonner sa chance à Maher en qualité de meneur de jeu, bien aidé il est vrai par la blessure de Georginio Wijnaldum qui lui a laissé le champ libre ces dernières semaines. Le coach batave ne s’y est pas trompé : après dix matchs, le PSV est leader d’Eredevisie avec 24 points pris sur 30 et un goal average de +22. Dont six pour le seul et unique Maher, soit un de plus que la saison précédente. Comme un signe du destin, c’est face à son ancien club de l’AZ que Maher renaîtra vraiment de ses cendres le 18 octobre dernier, en claquant deux buts dont un à la conclusion d’une chevauchée folle qui le verra éliminer quatre défenseurs. Avec le retour de blessure de Wijnaldum au milieu, c’est donc un vrai problème de riche qui se profile pour Phillip Cocu. Cette année, Maher et Wijnaldum ont été associés neuf fois, dans le 4-3-3 habituel du PSV ou dans un 4-4-2 expérimental. Au final, six victoires pour trois défaites. Et, presque à chaque fois, un but de Maher. Et si derrière le feu Depay se cachait finalement la maison Maher ?
Par Matthieu Rostac