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- TSV 1860 Munich
Le M1860 ne répond plus
L'autre club de Munich est au plus mal depuis plusieurs années. Cette fois, il n'a pas su sauver sa peau à la dernière minute et file vers une place en D4 très loin de son rang et de son histoire. L'autre locataire de l'Allianz Arena est le nouveau monstre sacré de l'Allemagne perdu dans les bas-fonds.
« Je ne peux pas décrire ce qui vient de se dérouler. C’est un cauchemar. » Sascha Mölders n’a pas les mots au lendemain d’une soirée d’enfer. Ce mardi 30 mai 2017, ils étaient 62 200 spectateurs dans les travées de l’Allianz Arena pour un match de barrages entre une D2 et une D3. D’un côté, Sechzig, club historique et membre de la première mouture de la Bundesliga. En face, le modeste voisin de Ratisbonne, un club qui n’a jamais connu l’élite et possède des moyens largement inférieurs. Pourtant, après le match aller (1-1), c’est Munich 1860 qui n’est pas au niveau. Rapidement menés 2-0, les locaux n’ont plus grand espoir de se maintenir et filent vers le troisième échelon national. Une descente presque méritée pour un club qui vivote dans le grand n’importe quoi depuis plusieurs années et se laisse remarquer uniquement par ses sauvetages de dernière minute et une instabilité chronique qui risque d’aller en empirant. Sascha Mölders : « Personne ne sait comment cela va continuer ici. Le fait est que je n’ai plus de contrat(…)et que je souhaite donc vous dire au revoir. » Retour sur un gâchis complet.
Le petit Bayern
À l’origine co-constructeur de l’Allianz Arena, Munich 1860 est un club ambitieux. Malheureusement, la relégation en 2004 contrarie les plans des Bleu et Blanc. Depuis, le club se trimbale son outil immense comme un boulet – dont il a été contraint de se désengager en revendant ses parts au Bayern Munich. À côté du stade, les arguments pour réussir sont pourtant nombreux. Le centre de formation est l’un des plus performants du pays depuis des années, capable de concurrencer le FCB sans avoir une équipe-fanion de premier plan. En plus des jeunes du club – comme dernièrement Weigl, les deux Bender, Kevin Volland ou encore Daniel Baier –, le recrutement est souvent judicieux. De nombreux joueurs de Bundesliga font leurs premiers pas avec Sechzig, comme les buteurs Bobby Wood et Yuya Osako. Tout indique que le club n’a pas vocation à rester en 2. Bundesliga. L’ambition est de redevenir un concurrent réel et direct du Bayern Munich. Le résultat est une misère sans nom.
Malaise TSV
La situation revient pour beaucoup à l’instabilité sportive. Après l’arrivée de Pep Guardiola en Bavière, 1860 se permet par exemple un recrutement axé sur la Masia et ses jeunes pousses. Ilie Sánchez et Edu Bedia rejoignent les Löwen pour être coachés par Ricardo Moniz. La mayo ne prend pas comme chez le voisin de la Säbener Straße. La lubie espagnole ne fait pas long feu et 1860 ne se bat jamais pour les premières places. Au contraire, le club paraît en fait de plus en plus pourri de l’intérieur. Le feu des critiques s’abat sur le projet de l’investisseur Hasan Ismaik (souvent visé par les chants des ultras, façon « merde au Cheick, merde à son argent » ), sans la moindre visibilité à long terme en dehors des effets d’annonce farfelus. Arrivé en 2011, le Jordanien (qui a racheté 60 % des parts du club pour obtenir 49 % des droits de vote) jongle avec les idées et varie d’un mois à l’autre. Contrairement au boulot abattu par Red Bull à Salzbourg et Leipzig, le mécène de Munich ne parvient pas à donner une ligne directrice claire et efficace. Sur le banc, les coachs et les annonces (Erikson et Magath, qui ne viendront jamais) se succèdent à un rythme délirant. Dans l’administration du club, ce n’est guère mieux. Et par deux fois, le club doit sa survie à un sprint final réussi. La troisième fois aura donc été celle de trop.
Galérien Ismaik
L’été dernier, Ismaik assure pourtant que le club va retrouver la Bundesliga et même « bientôt la Ligue des champions » . Le budget est délirant. C’est le deuxième du championnat, devant Hanovre. Le recrutement se veut chatoyant. L’attaque des routiniers Ivica Olić-Sascha Mölders doit être un feu d’artifice. Tout est fait pour marcher sur les adversaires. Malgré cela, Munich 1860 vit une saison difficile de plus, dans une 2. Bundesliga toujours aussi âpre et homogène. Sans attendre, dès le mois de novembre, le nouvel entraîneur Kosta Runjaić est prié d’aller voir ailleurs. Daniel Bierofka tient la barre, comme avant sur le terrain, comme la saison précédente sur le banc le temps d’un intérim et de faire venir pendant l’hiver Vítor Pereira. L’homme n’a pas l’effet Conceição avec lui : la fin de saison est un cataclysme, alors que les Löwen étaient restés au-dessus de la ligne de danger jusque-là. Avec seulement 1,05 point en moyenne par match, la zone rouge devient une vraie préoccupation. Les deux dernières défaites de la saison l’entérine, avant le cauchemar des barrages. Logiquement, les Löwen coulent… et plus personne ne souhaite assumer. Alors que les finances sont dans le rouge, le club est déserté : le président Peter Cassalette est parti dès la mi-temps du match contre Ratisbonne, le DG Ian Ayre a démissionné un mois après son arrivée en Allemagne, presque tous les joueurs sont libres de partir et la licence pour la 3. Liga n’a pas été payée par Ismaik – sans que le magnat ne se désengage pour autant. Munich 1860 doit abandonner le monde professionnel et repartira de la 4e division, un cran plus bas que le modeste voisin d’Unterhaching, pour jouer contre la réserve du Bayern. Aujourd’hui, Munich 1860 n’a plus aucune certitude, si ce n’est qu’il est grand temps de partir de l’Allianz Arena et de réapprendre à être autre chose que l’ombre du Bayern. Pour 2018, Munich 1860 doit reprendre de zéro.
Par Côme Tessier
Propos de Sascha Mölders tirés de l'Abendzeitung.