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Le jour où Mendieta a fait taire le Camp Nou
Pendant quelques années, Gaizka Mendieta a fait d'excellentes choses avec Valence. Mais si on ne doit en retenir qu'une, c'est assurément cet envoi venu du ciel qui offre la victoire à Valence sur la pelouse du Barça. Mais si, voyons, rappelez-vous !
L’année 1998 n’est pas que celle des Français. C’est aussi un énorme souvenir dans les mémoires des supporters blaugrana, qui ont vu Figo, Rivaldo et même Fernando Couto réaliser le doublé. La saison suivante, alors que les Blaugrana trônent encore en tête de la Liga aux deux tiers du championnat, ils voient Valence se mettre sur le chemin de sa seconde Copa del Rey d’affilée. Du côté du club ché, Claudio Ranieri est venu mettre de l’ordre en se débarrassant des capricieux Ortega et Romário. La saison précédente, l’Italien avait d’ailleurs réussi à sauver un exercice pourtant mal embarqué en plaçant Valence à la 10e place. Après quelques années difficiles, le club est donc en pleine renaissance. En août 1998, il remporte même son premier trophée (la Coupe Intertoto) depuis près de 20 ans. En route vers sa quatrième place finale en Liga, Valence vient de battre Villarreal, mais doit se rendre dans un Nou Camp qui sort tout juste d’une plantureuse victoire contre l’ennemi madrilène (3-0). Certes, la mission s’annonce difficile. Mais, c’est bien connu, dans un match de coupe, tout est possible.
Un athlète à la baguette
Dans le onze de base valencien, un certain Gaizka Mendieta, 24 ans. Formé à Castellon, le Basque d’origine en est à sa septième saison à Valence et sort d’une campagne 97-98 à dix buts. Pourtant, le talentueux milieu de terrain aurait pu ne jamais être footballeur. À 14 ans, le jeune Gaizka tourne ainsi le dos au football et embrasse… l’athlétisme, pour deux années seulement. Le temps, néanmoins, de décrocher le record d’Espagne junior sur 2000 mètres, avant de retrouver les prés en signant en D2 à Castellon. « Je n’étais pas si bon, déclarait Mendieta au Daily Mail en octobre 2014. J’étais un bon athlète, donc je pouvais plus facilement courir et couvrir une grosse partie du terrain que faire une simple passe. Je me suis donc entraîné tous les jours. J’allais au terrain avec mes frères et mon père pour m’exercer. J’allais sur des terrains de squash avec une balle et je tirais, je tirais, je tirais… » Une petite saison plus tard, le beau blond est repéré, puis signé par le FC Valence. Après un temps d’adaptation somme toute logique, il devient une des pièces maîtresses des merengots et participe même aux JO d’Atlanta avec l’équipe nationale. Aux côtés des expérimentés Canizares, Angloma et Djukic, Mendieta fait partie des cadres d’une équipe valencienne dont peu de gens anticipent déjà les futurs résultats probants.
Au Camp Nou, en plein milieu du mois de février, tout commence mal. Servi par le petit Sergi (véritable prédécesseur de Jordi Alba pour sa taille), Patrick Kluivert se permet une aile de pigeon qui trompe Canizares. Le Barça prend les devants juste après la pause, et tout le monde se dit que le match est plié. « Balivernes » , se dit sûrement Claudio López, qui renverse la situation en six minutes. D’abord grâce à un excellent travail de Mendieta, qui chipe le ballon à Figo avant que l’Argentin ne canonne à l’entrée du rectangle. Lopez résiste ensuite à la charge de Frank de Boer, et ponctue son action par une frappe toute molle qui s’en va tranquillement dans les filets après plusieurs rebonds. Pas le temps de souffler que Rivaldo égalise sur coup franc. Le match nul est alors un bon résultat pour les visités, mais pas pour Mendieta, qui s’apprête à sortir un coup de génie absolument hallucinant.
Et puis vint le coup de génie
On joue la 80e minute quand les ouailles de Ranieri obtiennent un corner sur la gauche. Pour le botter : Adrian Ilie, un des seuls transferts de l’été précédent. « C’est marrant parce que ce coup de pied arrêté n’était pas du tout préparé, avouera par la suite Mendieta au magazine anglais Four Four Two. C’était improvisé au moment où le corner a été botté. J’ai remarqué que j’étais seul à l’entrée du rectangle, donc j’ai demandé la balle à Ilie. Il a ensuite effectué un centre parfait et j’ai juste frappé. » La frappe du milieu de terrain est absolument phénoménale. À une vitesse presque incalculable, le ballon vient se loger dans la plus pure lucarne possible, coiffant pour le coup le pauvre Sergi qui, raison gardée, ne tente rien d’inutile. Mendieta l’a fait. Après le 3-4 de l’année précédente, il s’est sublimé pour offrir à Valence une deuxième victoire consécutive en terres catalanes.
Au retour, de nouveau emmenés par un Mendieta de feu et un Claudio López double buteur, les Valenciens remettront le couvert avec un 4-3 sentencieux à Mestalla. Adieu le doublé pour le Barça, bonjour le rêve pour Valence. Un rêve concrétisé quelques semaines plus tard par la victoire finale contre l’Atlético Madrid. Un 3-0 grâce à la même recette : doublé de Claudio López et goal dantesque de Gaizka Mendieta. La légende de Valence est enclenchée. En cinq ans, le club va remporter six trophées et atteindre deux finales de Ligue des champions. Trois jours après le match retour de Coupe, le scénario se répète en Liga et Valence gagne 2-4 au Camp Nou. Entre janvier 1998 et début mai 2000, Valence remporte 7 de ses 11 duels face au Barça. Le plus grand fait d’armes étant ce jour où le Barça ira jusqu’à mener 3-0 à la 69e minute avant une remontée folle : quatre réalisations en même pas vingt minutes. Après une carrière à la réussite mitigée – qui l’a notamment vu porter les couleurs blaugrana – Mendieta s’est reconverti en DJ. Pas si étonnant que ça pour un ancien chef d’orchestre.
Par Émilien Hofman