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Le jour où le Paris Saint-Germain a remporté la première édition de la Coupe de la Ligue face à Bastia
Après 25 ans de bons et loyaux services, la Coupe de la Ligue va quitter le monde du football ce vendredi 31 juillet après la dernière finale de l'histoire entre l'Olympique Lyonnais et le Paris Saint-Germain. Un PSG, recordman du victoire dans la compétition, aura ainsi l'occasion de boucler la boucle après avoir remporté la première édition face à Bastia. Retour en 1995.
1994. Après avoir testé plusieurs formats et notamment des Coupe d’été, la LFP décide, à l’image de ce qui se fait en Angleterre, de s’offrir une vraie coupe. Sauf que celle-ci ne va pas tout de suite entrer dans le cœur des gens au même titre que la Coupe de France menée par la FFF. Même si contrairement à son homologue, la Coupe de la Ligue possède un avantage non négligeable, elle ne se dispute qu’entre clubs professionnels et la défaite est donc plus facile à digérer. C’est en tout cas l’avis de Luis Fernandez, entraîneur du Paris Saint-Germain qui va en remporter la première édition : « Quand tu te faisais éliminer par un club amateur, tu ressentais une forme de honte. C’était dur à encaisser car tu devais en subir les conséquences sur le plan médiatique. Une défaite en Coupe de la Ligue était mieux perçue car elle était face à un club pro » . Un avis que partage Didier Santini, ancien défenseur du SC Bastia, finaliste malheureux de cette même première édition : « C’était une coupe sympa. Tu n’avais pas beaucoup de tours, donc moins de fatigue. Et surtout moins de match à pression car tu ne joues pas contre des petites équipes et tu te mets donc moins dans la merde si tu perds. »
Money, money, money
Pour autant, la Coupe de la Ligue a, au départ, du mal à attirer les supporters. La faute à des matchs qui ont lieu en semaine. Et à des équipes de départ souvent remaniés à 80%. « Cette compétition, comme la Coupe de France, sert, pour certains entraîneurs, à faire un turn-over qui peut être utile pour tout le monde, affirme Luis Fernandez.C’est important que tout le monde se sente concerné et ait une opportunité de jouer. Que ce soit le gardien remplaçant ou des joueurs qui ont peu de temps de jeu et qui ont alors un moyen de montrer qu’ils ont des qualités » . Et comme souvent, ce sont les remplaçants qui se coltinent les premiers tours, tandis que les titulaires débarquent dès que le trophée est en ligne de mire. Didier Santini se rappelle parfaitement de cette première édition et du turn-over imposé par Frédéric Antonetti, qui préférait économiser des forces pour le maintien : « En huitième de finale, on joue Nantes qui était alors invaincu en championnat. Et vu qu’on a un match important le samedi, Fred envoie l’équipe bis pour ne pas perdre de l’énergie. Et puis finalement Philippe Lalanne marque un but de folie en reprise de volée et on gagne. Ce sont les joueurs qui jouaient très peu qui nous ont emmené en demi-finale. Et puis après, Fred a fait jouer l’équipe-type, on a pris la compétition au sérieux (rires) » .
Si les équipes sont souvent remaniées, la Coupe de la Ligue est très vite perçue tout de même par les clubs comme un moyen rapide de remporter un trophée. Et la place européenne qui va avec. « Pour une équipe qui fait une mauvaise saison et qui à l’opportunité de la sauver en gagnant une Coupe de la Ligue pour être européen c’est quand même assez magique, poursuit Luis Fernandez. Et puis cela permettait aussi à certaines équipes de se montrer et être aussi un peu dans la lumière. » De quoi oublier la fatigue accumulée par l’addition de matchs à écouter l’ancien milieu du Paris Saint-Germain Vincent Guérin : « On avait un groupe de compétiteurs donc le fait de se retrouver dans une nouvelle compétition, on s’est vite pris au jeu. On prenait cela avec plaisir même si les fins de saison étaient effectivement plus difficiles puisque les matchs étaient répétés et usant physiquement pendant le sprint final. » Heureusement, la Ligue a très vite mis une belle carotte en offrant de jolies primes au vainqueur. « Je sais que cette année-là, la Coupe de la Ligue avait rapporté pas mal d’argent à Bastia, se rappelle Didier Santini. Et je pense que, nous, les joueurs avons eu les plus grosses primes de match avec Bastia à cette époque-là (rires). »
Une finale sous tension
En plus d’être le premier finaliste de l’histoire de la Coupe de la Ligue, Bastia est probablement le club dont les supporters ont été les premiers à adopter cette compétition. « À Bastia, il y a une culture au niveau de la Coupe, affirme l’actuel entraîneur de Béziers. Même la Coupe de Corse c’est culturel. Dès que tu mets le mot Coupe il faut y aller à fond. Et la demi-finale contre Montpellier, le stade était blindé, il y avait une ambiance de folie. » Bien loin de l’ambiance de la finale de cette première édition, disputée le 5 mai 1995 devant « seulement » 24 663 spectateurs. Le Stade de France n’étant pas encore inauguré, c’est au Parc des Princes que le SC Bastia doit affronter le PSG. Mécontent du lieu choisi et de la date – calée entre deux journées de Ligue 1 alors que le Sporting se bat pour le maintien – le club corse menace d’envoyer son équipe réserve. Il n’en sera finalement rien, mais Didier Santini a toujours certaines décisions en travers de la gorge : « On avait été tiré au sort en premier donc logiquement c’est nous qui recevions. Sauf qu’on était quand même dans le vestiaire visiteur. Et puis cette année-là ils avaient aussi dit que le finaliste ferait la Coupe d’Europe si le gagnant était déjà qualifié en Europe. Sauf qu’en voyant que c’était nous, ils ont tout changé. Ils ont inventé beaucoup de règlements ce mois-là avant la finale. »
Si Luis Fernandez « comprend la colère de Bastia » de devoir jouer sur le terrain de son adversaire, l’entraîneur du Paris Saint-Germain affirme pourtant que ceci n’était un avantage pour personne : « Tu as plus de pression car tu es favori, ce n’est jamais facile de gagner à domicile. D’autant plus que les places sont distribuées avec pourcentage égal pour chaque club donc tu joues pas vraiment à domicile, même si c’est vrai que cela reste ton stade et que tu as des repères. » Et finalement, le match donnera raison à Luis Fernandez puisque son équipe aura du mal à bouger les Corses avant de s’imposer finalement 2-0 sur des buts de Alain Roche et de Rai. Un score qui ne reflète pas vraiment la rencontre : Bastia aurait dû revenir au score avant la pause sur un but de Anto Drobnjak, refusé pour un hors-jeu inexistant.
25 ans après, ce pion n’est toujours pas digéré par les Corses et par Didier Santini : « On s’est fait voler un petit peu par l’arbitre. On parle encore de cette action en Corse aujourd’hui. J’ai revu le match en plus pendant le confinement et il n’y a pas hors-jeu du tout. En plus au Parc des Princes tu as des télévisions quand tu rentres au vestiaire alors on a vu à la mi-temps le but refusé et on est devenu fous. » Ajoutez à cela la blessure du capitaine du Sporting – Laurent Casanova – au bout de 10 minutes et vous comprendrez bien que ce n’était pas le soir de Bastia. Peu importe les faits de jeu, Vincent Guérin ne retient que la victoire « après une rencontre âpre » et l’après-match : « Je me souviens qu’on avait fêté ce trophée dignement. On avait fait une belle fête. » 25 ans plus tard, le Paris Saint-Germain espère marcher à nouveau sur les traces de ses aînés qui avaient fait, cette année-là, le doublé Coupe de France-Coupe de la Ligue. Mais surtout une demi-finale de C1. La seule et unique du club de la capitale.
Par Steven Oliveira
Tous propos recueillis par SO.