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Le jour où JPP a fêté sa première sélection en équipe de France
Il y a trente et un ans, le 26 février 1986, l’homme que l’on allait finir par surnommer JPP chantait pour la première fois La Marseillaise dans un Parc des Princes visiblement déjà conquis. Et c’est bien là la seule raison qui explique que l’on se souvienne aujourd’hui encore de ce match, fermé et peu engagé, contre l’Irlande du Nord.
Lors de la saison 1985-1986, Jean-Pierre Papin a déjà de sérieux arguments à faire valoir : après une première saison professionnelle plutôt solide en D2 avec Valenciennes (15 buts en 33 matchs), l’attaquant français quitte la France, monte en grade et rejoint le FC Bruges où sa folie à l’entrée de la surface fait des merveilles. En point d’orgue : un triplé en octobre 1985 contre Boavista en 32e de finale de la C3. Si bien que lorsque José Touré se blesse quelques jours avant le rassemblement de l’équipe de France en février 1986, Henri Michel n’hésite pas à faire appel à ce petit Nordiste de vingt-deux ans pour affronter l’Irlande du Nord.
De simple anonyme à futur leader
Pourtant, au sein du groupe France, la convocation de celui que l’on ne surnomme pas encore JPP est loin d’être une évidence. La vérité, c’est qu’aucun des Bleus ne connaît son nom, ni son visage. « À l’époque, il n’y avait pas autant de matchs retransmis à la télé qu’aujourd’hui, on n’avait donc pas d’informations de Belgique et on ne savait pas qui il était » , lâche Manuel Amoros, comme une évidence. Avant de préciser : « Malgré tout, Henri Michel lui faisait confiance et ça nous suffisait pour l’adopter. D’autant qu’il donnait déjà l’impression d’être un sacré buteur dans cette façon de prendre les initiatives et de ne pas se préoccuper de l’endroit où il était pour tirer. »
« C’est un peu loin tout ça » , sourit de son côté Alain Giresse, avant que la machine à remonter le temps ne se mette lentement en place et que tout refasse surface peu à peu : « Avant, le match, je me souviens que l’on avait tous apprécié son attitude, son enthousiasme et sa sympathie. Je ne dis pas ça en l’air : après le match contre l’Irlande du Nord, Michel Platini est venu me confier qu’il avait aimé sa générosité sur le terrain, il trouvait également sa sympathie très attachante. Mais ce n’est pas très étonnant quand on connaît un peu Platini : il a toujours apprécié les attaquants qui demandent perpétuellement le ballon et font constamment des appels en profondeur. »
« Il a continué à impressionner au fil des mois »
Le match en question se déroule dans un Parc des Princes enneigé : la rencontre est fermée, les Nord-Irlandais sont clairement venus pour défendre et les occasions se font plutôt rares. Au point d’insérer le doute dans la tête de Jean-Pierre Papin ? S’il avoua une légère déception après la rencontre, le Boulonnais a malgré tout de quoi être confiant au retour des vestiaires : auteur d’un match plein, constamment volontaire et dynamique, il a fait le boulot. Et Alain Giresse est aujourd’hui là pour confirmer : « On avait le même groupe depuis 1982, on était champions d’Europe en titre, on avait pour habitude de maîtriser nos matchs et ce n’était qu’un match amical. C’était donc surtout un moyen pour de jeunes joueurs comme lui de gagner un peu d’expérience. » Enthousiaste, l’actuel sélectionneur du Mali poursuit : « Après cette première sélection, il avait déjà convaincu pas mal de monde. On sentait qu’il avait de l’appréhension, mais c’était compréhensible. Et puis ça n’a pas perturbé sa concentration. D’ailleurs, il a continué à impressionner au fil des mois. »
Vrai : JPP impressionne tellement le staff d’Henri Michel qu’il gagne en seulement cinq mois sa place pour la Coupe du monde 1986 au Mexique. Audacieux et instinctif, il est même titularisé pour le premier match contre le Canada et marque l’unique but de la rencontre. C’est sa première réalisation, elle lui permet d’étaler son potentiel à la face du monde, mais n’est pas encore suffisant pour lui assurer une place de titulaire indiscutable. Si Alain Giresse prétend qu’il « devait en mettre trois ce soir-là » et qu’avec un « Papin plus mature, la France aurait été en finale » , le discours de Manuel Amoros diffère quelque peu. « On a été surpris qu’il ne soit pas titulaire pour le deuxième match contre la Russie, ni pour les matchs suivants, s’étonne-t-il encore.Cela dit, c’était le choix d’Henri Michel, il fallait le respecter, rester soudés et ça ne l’a pas empêché de marquer à nouveau contre la Belgique dans le match pour la troisième place. Il était déjà aux portes de la grande carrière qui l’attendait et, avec nous, il était dans un schéma où il pouvait donner le meilleur de lui-même. » Le meilleur de lui-même, JPP va le donner en équipe de France. Mais derrière ses trente buts en 54 sélections pointe certainement toujours le même regret : ne pas avoir su amener les tricolores à la consécration internationale.
Par Maxime Delcourt