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Le jour où Hambourg a refroidi le Roudourou
L'EAG joue sa qualification pour les 16es de finale face à un joli morceau : la Fiorentina. L'occasion de se rappeler qu'en 2009, un autre gros poisson, le Hambourg SV, était venu rendre visite au village breton. Pour une véritable correction.
À la peine en championnat, les hommes de Jocelyn Gourvennec vont aujourd’hui prendre un bol d’air frais. Solidement accroché à la deuxième place du groupe K, l’EAG va une nouvelle fois profiter de son épopée européenne pour s’envoyer un peu de rêve. Ou du moins, tenter de faire vibrer ses supporters. Le défi sera de taille. Au match aller, la Fio – aujourd’hui leader du groupe – avait corrigé à Artemio-Franchi les Costarmoricains (3-0). Ensuite, Guingamp ne reste pas sur une dynamique très favorable : deux défaites consécutives dont une contre le voisin rennais. Enfin, la dernière fois que les Bretons ont accueilli un gros morceau européen, le Hambourg SV, ça s’était mal fini. Une autre époque pour des Hamburger aujourd’hui au fond du trou en Buli.
Du septième ciel à cinq pieds sous terre
Les trois coups de sifflet de l’arbitre retentissent, Guingamp est au paradis. Grâce à un doublé de leur buteur maison Eduardo, tous les membres du pensionnaire de Ligue 2 envahissent la pelouse du Stade de France, les bras tendus vers le ciel. Les Guingampais viennent de remporter la première Coupe de France de leur histoire. Leur victime du soir ? Rennes, le voisin de L1 beaucoup plus riche avec Pinault aux manettes, malgré un Olivier Thomert titulaire et un Pagis sur le banc. Un Rennes bien plus favori en tout cas que l’En Avant. Mais ce soir-là, la magie de la Coupe de France est bien trop grande et l’instinct de buteur d’Eduardo bien trop aiguisé. La victoire est belle et on en oublie presque l’essentiel : Guingamp jouera l’an prochain et la Ligue 2 et la Ligue Europa. Principal artisan de ce succès, Victor Zvunka est toujours fier de cet exploit. « On était super heureux, explique l’ancien entraîneur de Guingamp. Personnellement, ça allait être ma deuxième expérience en Coupe d’Europe après Châteauroux. Mais à ce moment-là, tu ne te projettes pas vraiment sur la Coupe. Pour nous, c’était plus le trophée. Ensuite, j’avoue avoir eu une discussion avec mon président, pour savoir quelles allaient être les ambitions du club. On perdait quand même Eduardo, Wilson Oruma… Mais il m’a dit : « On a gagné la Coupe cette année. L’an prochain, on joue la montée ! » Dans ma réflexion pour prolonger, ça a eu de l’importance. »
Cependant, la vie n’est pas toujours rose et les réalités sportives reprennent le dessus. Depuis 1996 et son match nul obtenu à San Siro contre l’Inter Milan en 32es de finale de la Coupe UEFA, l’EAG n’a plus goûté à l’Europe. Le coefficient UEFA ne jouant pas en leur faveur, les hommes de Victor Zvunka peuvent potentiellement tomber contre une grosse écurie. Pas de pot, l’EAG tire le gros lot : ce sera Hambourg, cinquième de la Bundesliga 2008-2009. « Ayant des origines allemandes, ça me faisait plaisir de jouer contre Hambourg, avoue Zvunka. Mais tomber contre eux, c’était pas du gâteau. D’autant que la finale de la Ligue Europa allait se jouer… à Hambourg ! Là je me dis : « Aïe, aïe, aïe ! Double punition ! » L’année d’avant, ils avaient échoué en demi-finale… Tu sais donc que cette année, ils y vont pour la gagner. » Guingamp s’attend donc au pire et Stéphane Trévisan tient à prévenir ses coéquipiers : « En tant que cadre, je devais faire partager au reste du groupe mon expérience. Il fallait dire aux jeunes de ne pas être spectateurs et d’entrer très vite dans le match. Savourer c’est important, mais il faut savoir se donner le maximum de chances pour bien figurer. » Des conseils qui, avec toute la bonne volonté du monde, ne porteront pas leurs fruits.
« 3-0 en seulement quelques minutes… Là, on a compris ! »
Le 20 août 2009, l’EA Guingamp fait son grand retour sur la scène européenne. Les supporters sont bien évidemment là, pour encourager leurs protégés bien sûr, mais aussi pour observer les stars présentes sur le pré : le prometteur Jérôme Boateng, le champion du monde 2002 Zé Roberto, ou encore son buteur péruvien Paolo Guerrero. Pourtant, Zvunka imagine pouvoir réaliser l’impossible. « J’étais allé chez un ami pour voir leur match de championnat contre Fribourg. Et honnêtement, ils avaient gagné là-bas, mais ils n’avaient pas fait un grand match. Je me suis dis : « Bon, ils sont peut-être pas encore en grande forme… » Tu parles ! En un quart d’heure, on a été balayés. » Dès la septième minute de jeu, Guerrero ouvre le bal offensif des Rothosen. Zvunka décrit : « On prend le but très rapidement bien sûr, mais c’est aussi parce qu’on était en infériorité numérique. Sébastien Grax s’est blessé à la troisième minute et le temps de faire le changement, ils avaient déjà marqué… Quand tu prends un but comme ça en Coupe d’Europe, en plus d’être inférieur à la base, ça te met un coup derrière la tête. » Dans ses cages, Trévisan constate le gouffre entre les deux équipes. « Pour être franc, ça allait vraiment vite dès le début. On n’a pas eu le temps de se mettre en route. Il y avait déjà 3-0 en seulement quelques minutes… Là, on a compris ! »
David se fait démolir par Goliath. À la mi-temps, les onze Guingampais sont tout heureux d’avoir quinze minutes pour souffler, tellement l’intensité de jeu proposée par Hambourg est incompatible avec leurs capacités. « En tant que gardien, on est contents que l’arbitre siffle la mi-temps ! Ça permet de se remettre le cerveau à l’endroit. Ensuite, il faut se forcer à ne pas baisser la tête et à satisfaire notre public. » Toujours trop puissant, malin et rusé, le HSV marque deux nouvelles fois, par Berg et ce diable de Mladen Petrić. 5-0. Toutefois, la fête continuera dans les tribunes jusqu’au coup de sifflet final et sera récompensée d’un but contre son camp de Hesl pour sauver l’honneur local. « Le seul regret que j’ai, c’est qu’à cette époque, on devait passer par les barrages, analyse Zvunka. Si on avait pu se qualifier directement pour les poules, on aurait pris plus de plaisir. » Et Victor de terminer par un jugement abrupte, mais honnête : « En tant que club de Ligue 2, on n’avait pas le niveau. »
Par Antoine Donnarieix