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- 20 février 2007
Le jour où Giggs s’est payé la tronche du LOSC
Le 20 février 2007, le LOSC disputait le plus gros match de son histoire face à Manchester United en huitième de finale aller de la Ligue des champions. Ce soir-là, les hommes de Claude Puel tiennent un bon et honorable match nul. Jusqu’à la 83e minute où Giggs, plein de malice, joue son coup franc rapidement et fait enrager les supporters lillois.
« On n’avait rien à perdre, on se disait tous que l’on pouvait le faire. Claude Puel nous répétait en permanence que si d’autres équipes y sont arrivées par le passé, il n’y a aucune raison que ça ne soit pas le cas pour nous. On ne voyait pas ça comme un moment historique, on se disait simplement qu’on était outsiders dans un gros match de Coupe de France. » Ce « gros match de Coupe de France » dont parle Nicolas Fauvergue, aujourd’hui à la pointe du FC Metz, c’est le plus gros match jamais joué par le LOSC en Ligue des champions face à Manchester United – dont il s’était déjà payé la tête une saison auparavant sur un but d’Acimovic au Stade de France -, dans le cadre des huitièmes de finale.
En ce soir du 20 février 2007, le stade Félix-Bollaert – dans lequel le LOSC, contraint par l’UEFA, joue une partie de ses matchs européens – est plein à craquer. Près de 40.000 supporters ont en effet fait le déplacement dans l’antre de l’ennemi lensois pour voir leurs Dogues affronter le géant mancunien. Et ses nombreuses stars : Rooney, Cristiano Ronaldo, Giggs, Scholes, Évra… C’est donc dans une ambiance assez folle (même si quelques débordements seront à déplorer) que l’on assiste à un match plutôt serré. Les hommes de Ferguson dominent, bien entendu, mais ne parviennent que très rarement à cadrer et viennent en permanence buter sur une arrière-garde lilloise infranchissable. Même problème pour le LOSC, qui défend courageusement mais ne profite pas vraiment de ses rares incursions dans la surface adverse pour provoquer son destin.
« Avec un peu plus d’expérience, on aurait mis quelqu’un devant le ballon »
« On a eu des situations intéressantes. Il y a beaucoup de rythme. Il faut insister, aller de l’avant et surtout ne pas subir. Si on joue trop bas, ils deviennent dangereux. » Optimiste et ambitieux au micro de Canal +, Claude Puel voit toutefois son équipe reculer peu à peu et perdre de plus en plus de ballons au milieu. Pourtant dominé, le LOSC va faire frissonner les caleçons des 4 500 supporters anglais ayant fait le déplacement. On est alors à la 62e minute, et c’est l’heure du premier fait de match : bien aidé par très bon centre d’Obraniak, Odemwingie voit son but de la tête injustement refusé par l’arbitre de la rencontre, le Néerlandais M. Braamhaar, qui se laisse duper par la chute de Vidić dans la surface. Qu’à cela ne tienne, les hommes de Claude Puel continuent de faire sonner tambours et trompettes, et tiennent ainsi jusqu’à la 83e minute. Moment où Ryan Giggs choisit de défier les règles du fair-play et d’envoyer le ballon de sa patte gauche au fond des filets de Tony Silva, qui en était encore à placer son mur. « C’était vraiment un match très serré, on était en train de les accrocher, et là, on se laisse surprendre, affirme aujourd’hui Matthieu Chalmé. « M. Braamhaar nous dit qu’ils vont jouer au coup de sifflet et dit ensuite à Giggs qu’il peut le jouer rapidement. On s’est fait avoir sur un détail de haut niveau. Avec un peu plus d’expérience, on aurait mis quelqu’un devant le ballon. »
Longtemps controversé, le coup franc de Ryan Giggs (devait-il attendre que le LOSC se place correctement ? L’arbitre aurait-il dû le faire retirer ?) est toutefois parfaitement valable pour Louis Saha. Qui revenait sur cette polémique le lendemain du match pour la chaîne officielle de Man U : « C’était évidemment difficile à avaler pour les Lillois, mais les règles sont de notre côté. Ryan a montré son expérience sur ce coup-là. Il n’y a pas besoin du coup de sifflet de l’arbitre, c’est pourquoi il a tiré très vite et marqué un but superbe. »
Peu de malice et trop frustration
Remplacé à la 57e par Yohan Cabaye, Nicolas Fauvergue refuse lui aussi de mettre ce but sur le dos de l’arbitre. Si Lille a perdu ce match, après tout, c’est principalement par manque de malice : « Les matchs de ce niveau, ça se joue sur des détails. Moi, j’étais sur le banc depuis une vingtaine de minutes lorsque Giggs a marqué. Tout le monde a cru qu’il avait triché en tirant son coup franc de la sorte. Même Jean-Pierre Mottet, l’entraîneur des gardiens, a couru sur Puel pour lui dire qu’il fallait porter réclamation. Tout le monde était très frustré parce qu’on savait tous que le match était alors plié. » Frustrés mais pas abattus, Tafforeau, Debuchy, Makoun and co se remotivent pour le match retour, que Manchester « gagnera plus logiquement » selon Chalmé. « On était déjà très heureux d’avoir mené Lille à un tel niveau avec un effectif assez limité. On savait dans tous les cas que jouer Manchester serait très difficile. Mais on n’a vraiment pas à rougir d’avoir perdu deux fois un à zéro. » De son côté, Nicolas Fauvergue avoue d’ailleurs clairement que ce fait de match a nourri sa motivation pour le match retour à Old Trafford : « L’entraîneur était très énervé par le déroulement du match aller. Mais aussi par notre manque de jugeote et d’expérience. Le connaissant plutôt bien aujourd’hui, je pense qu’il a dû ruminer quelques heures, voire quelques jours après ce match. Mais c’est justement cet événement qui nous a poussés à jouer le match d’Old Trafford comme si c’était le dernier de notre carrière. Avec le recul, on peut même se dire qu’on n’était pas loin de créer l’exploit. »
Par Maxime Delcourt, à Lille