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- 27e journée
- Monaco/PSG
Le jour où Frédéric Déhu a réveillé Louis-II
Monaco-PSG, c'est un classique du championnat de France. Un match qui a d'ailleurs rarement souri aux Parisiens (4 victoires en Principauté, seulement). En 2001, le PSG était mené 2 à 0 par l'ASM de Didier Deschamps à l'heure de jeu. Puis Frédéric Déhu est entré en scène. Par un ciseau. Direction les ficelles. Score final : 2-2.
18 août 2001, Louis-II. On joue la 66e minute, et le PSG est mené 2 à 0 (Nonda 38′, Giuly 54′) en Principauté. Comme à chaque fois que les Parisiens se déplacent sur le Rocher durant les vacances estivales, le parcage visiteur est plein. Les Parisiens sont torses nus pour la plupart. Bronzage crevette. Sur son banc, Luis Fernandez gesticule comme à son habitude. À trente mètres sur la droite du but monégasque gardé par Flavio Roma, Mikel Arteta hérite de la gonfle dos au bus. Vladimir Jugović, cheveux gris façon Clooney, arrive par derrière et désosse le jeune Espagnol. Coup franc que l’actuel capitaine d’Arsenal balance dans le paquet. Tête de Gabriel Heinze qui remet dans l’axe. Pierre-Fanfan, alors monégasque, éloigne le danger de la tête. La balle est en l’air, au niveau de l’entrée de la surface de réparation. Tout semble sous contrôle. Sauf que Frédéric Déhu décide d’envoyer un ciseau retourné dans les ficelles de Roma, qui n’a pas bougé. 2-1.
Aloísio égalisera 5 minutes plus tard. Déhu a réveillé son équipe par un but digne du « Top but » de Téléfoot. « Sur l’aspect esthétique, oui, c’est sans doute le plus beau but de ma carrière » raconte Frédéric Déhu à l’autre bout du fil, qui s’est depuis reconverti dans le management en entreprises via DGT Formations dont il est le cofondateur. « Tout est beau dans ce but, la réalisation, le timing, la gestuelle. Surtout qu’en tant que défenseur central, je n’ai pas eu souvent l’occasion de tenter ce genre de folie en plein match, alors qu’à l’entraînement, je me régalais un peu plus » , se souvient celui qui vit aujourd’hui à Valbonne, près d’Antibes. « Je me souviens très bien de ce but. Il fait suite à un coup franc et il revient dans l’axe, alors que je suis déjà en train de remonter vers ma moitié de terrain. Là, je ne me pose pas de question et je tente le ciseau. Sans réfléchir. On est dans l’instinct, là. Dès le départ, je sais qu’elle part bien et laisse Roma sans réaction. »
« Le PSG 2001-2003 ? Un gâchis »
D’autres auraient fait six tours de terrain après une telle merveille. Pas Déhu. Il court en vitesse vers son but. Le PSG doit réagir. Le but de l’ancien Lensois va réveiller l’équipe. « Je ne manifeste pas énormément de joie sur le but, car on était dans le dur à ce moment-là. C’est vrai qu’il y a un peu de frustration de ne pas pouvoir pleinement profiter du fait d’avoir marqué un but comme ça. Surtout que je sais que je ne vais pas en remettre souvent… » Le PSG va donc ramener un point du Louis-II dans ce match estival. Dans la voix de l’ancien capitaine parisien, la déception est encore là treize ans après. Sur le terrain, Luis Fernandez envoie un énorme braquet : Ronaldinho, Okocha, Heinze, Pochettino, Hugo Leal, Anelka, Letizi, Arteta and co.
Pourtant, cette équipe ne sera pas championne. Pis, le PSG ne terminera jamais sur le podium. « On peut facilement parler de gâchis quand on voit les individualités que l’on alignait à l’époque. Encore aujourd’hui, j’essaie de comprendre pourquoi la mayonnaise n’a jamais pris, poursuit Déhu. Tout ce potentiel, à tous les postes, et ne pas réussir à en faire une vraie équipe… Cela prouve que le football, ce n’est pas seulement des noms. » Cette équipe était capable de renverser des montagnes certains soirs – le 7-2 contre Rosenborg en Ligue des champions, par exemple –,mais sur le long terme, ça ne fonctionnait pas. Déhu toujours : « Les exigences du haut niveau demandent énormément au quotidien, et nous, à l’époque, on n’était pas capables de répéter les efforts sur la longueur » . Moralité, le PSG va terminer 4e de Ligue 1 en fin de saison et ne disputera jamais la Ligue des champions avec cette équipe de malades. Au Louis-II, Déhu a sans doute marqué le plus beau but de sa carrière et réveillé ses collègues dans un match pourtant bien mal embarqué. « C’est drôle, car personne ne me parle de ce but » , conclut-il avant de raccrocher.
Par Mathieu Faure